Les conventions migratoires signées avec le Maroc et la Turquie, et l’extrême bienveillance à l’égard des populations musulmanes les plus radicales, alimentent le clientélisme politique de la gauche belge. Couve ainsi une bombe démographique qui pourrait faire de la Belgique le premier État musulman d’Europe.
« On n’est pas là pour évaluer les mérites du gouvernement belge en matière de lutte contre le terrorisme. » Ce rappel, formulé par le président de la Cour d’assises spéciale, au cours du procès des attentats du 13-Novembre à Paris, visait à alléger la tension alors que l’audition de l’enquêteur de la police fédérale belge tournait au procès des autorités belges. Les propos du policier avaient mis en lumière la naïveté sidérante, voire l’aveuglement de son gouvernement face à l’islamisme, y compris dans ses expressions les plus violentes.
C’est désormais bien connu, la Belgique a été la base arrière des attentats de Paris et ceux qui les ont commis sont en majorité belgo-marocains. Mais pire encore, si le commanditaire des attentats, Oussama Atar, a pu mener à bien ses projets meurtriers, c’est en partie grâce à l’incroyable mansuétude des autorités belges. Arrêté en Irak par l’armée américaine pour son appartenance à Al-Qaïda en 2005, condamné à perpétuité en 2007 et emprisonné entre autres à Abu Ghraib, l’homme a bénéficié d’une intervention directe du gouvernement belge demandant sa libération pour motif humanitaire. Renvoyé en Belgique en 2012 sous la promesse d’un contrôle des autorités, le terroriste, dont la dangerosité était pourtant avérée, a été laissé en liberté, sans la moindre surveillance. Le gouvernement belge lui a même fourni un passeport. Il a donc pu très facilement retourner à ses premières amours terroristes et rejoindre Daech en 2013. C’est ainsi que cet émir de l’État islamique a pu tranquillement planifier, en Syrie, les attentats de Paris de 2015 et ceux de Bruxelles de 2016.
Complaisance
Une telle complaisance de la part d’un gouvernement choque, mais n’est pas si étonnante. En Belgique, les islamistes disposent de relais importants dans la classe politique locale, mais aussi à l’intérieur de la Commission et du Parlement européens. Leur influence est telle que, dans le cas d’Oussama Atar, ils n’ont même pas eu à monter au créneau : la campagne de victimisation larmoyante baptisée « Sauvons Oussama » qui a abouti à sa libération a été orchestrée par des députés appartenant au parti Écolo, au PS et à la CDH (parti centriste). Sans surprise, les mêmes partis soutiennent ouvertement des candidats islamistes à des postes de pouvoir.
En mai 2021, Sarah Schlitz, secrétaire d’État belge à l’Égalité des genres et membre des verts, a nommé une femme voilée, Ihsane Haouach, au poste de commissaire du gouvernement auprès de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes. Que la gauche prétende défendre en même temps l’émancipation des femmes et leur aliénation par le voile, on est habitués. Que cette confusion accède à la dignité gouvernementale, c’est autre chose.
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Peut-être enivrée par sa réussite, Ihsane Haouach dévoile un peu vite son jeu. Dans un entretien au Soir, elle déclare que la conception de la laïcité dépend de la démographie. En langage islamiste, canal Frère musulman, cela signifie que quand les musulmans seront majoritaires, ils seront les arbitres de la laïcité. Dans une autre interview, donnée à l’European Forum of Muslim Women, la section féminine des Frères musulmans, elle revendique l’organisation des musulmans en force politique autonome. Cependant, sa carrière fait rapidement pschitt ! quand une note de la Sûreté de l’État belge révèle ses « contacts étroits avec les Frères musulmans ». Même pour la Belgique, c’est trop. Madame Haouach démissionne le 9 juillet, six semaines après sa nomination.
On aurait pu penser que ces diverses mésaventures avaient instruit les autorités belges. Erreur ! Leur dernier exploit en la matière a consisté à donner à la ville de Bruxelles le visage d’une femme voilée, également proche des milieux fréristes. Fatima Zibouh a en effet été choisie pour porter la candidature de Bruxelles au titre de capitale européenne de la culture. Or cette femme, militante Écolo et très soutenue par ce parti, a fondé en 2013 l’association Empowering Belgian Muslims (EMBEM), une structure proche du CCIF dissous en France par Gérald Darmanin et ranimé en Belgique sous le nom de Collectif contre l’islamophobie en Europe (CCIE). Une des personnalités les plus connues d’EMBEM est une députée belgo-turque, bien sûr voilée, Mahinur Özdemir, proche de la branche turque des Frères musulmans. Recep Tayyip Erdogan lui a même fait l’honneur d’assister à son mariage. Depuis, l’EMBEM a été dissoute – après avoir invité nombre de conférenciers appartenant à la mouvance frériste ou proches d’elle, comme Marwan Muhammad, François Burgat et Hajib El Hajjaji, et mis à l’honneur les conférences de Tariq Ramadan.
La ceinture musulmane de Bruxelles
Reste à comprendre les raisons d’une telle complaisance de la part des autorités belges. C’est simple : la démocratie, c’est la démographie. La population d’origine arabo-musulmane pèse très lourd en Belgique, particulièrement dans la région de Bruxelles. D’autant plus lourd que cette population est étonnamment homogène en termes d’origine. L’écrasante majorité de la population musulmane belge (80 à 90 %) est en effet issue de la convention bilatérale signée en 1964 avec le Maroc et la Turquie. Les Marocains sont aujourd’hui la minorité ethnoculturelle la plus importante du pays. Cette immigration marocaine, essentiellement venue du Rif, est fortement sous influence islamiste, ne serait-ce qu’en raison de l’hostilité historique des Rifains au régime chérifien. Cela les rend sensibles à tout ce qui pourrait déstabiliser le pouvoir marocain. Or, depuis que la Belgique a adopté une politique d’intégration facilitant grandement l’obtention de la nationalité, cette population est un enjeu électoral. Les islamistes jouent habilement le jeu du clientélisme politique. Ils capitalisent leur entrisme dans les partis et institutions belges à travers leur stratégie d’influence auprès de l’Union européenne, comme l’explique Florence Bergeaud-Blackler dans son nouveau livre, le Frérisme et ses réseaux.
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En 2020, selon Statbel, l’office belge de statistique, 67,7 % de la population belge était composée de Belges d’origine belge. Il y a dix ans, la part de la population d’origine belge était de 74,3 %. La baisse est donc notable en quelques années et devrait s’accélérer. Quant à la proportion de musulmans dans la population, elle devrait au contraire s’accroître fortement. Selon le Pew Forum of Religion and Public Life, la Belgique compterait ainsi 1,149 million de musulmans en 2030, soit une augmentation de 80 % par rapport à 2010 (population évaluée à 638 000). La dynamique démographique joue en faveur de cette population. À noter également que les musulmans, très inégalement répartis sur le territoire, se concentrent essentiellement dans la région de Bruxelles. Selon une étude datant de 2016, certains quartiers seraient particulièrement investis par la population arabo-musulmane (49,3 % à Saint-Josse, 41,2 % à Molenbeek-Saint-Jean, 38,5 % à Schaerbeek…). C’est ce que l’on appelle la ceinture musulmane de Bruxelles.
Une autre étude, publiée en 2020 par la Fondation Jean-Jaurès et intitulée « En immersion chez la jeunesse belge », montre que si la jeunesse bruxelloise dans son ensemble est ouverte et tolérante, les élèves arabo-musulmans se situent à l’inverse de cette tendance. Bien qu’ils votent majoritairement à gauche, clientélisme oblige, ils sont 81 % à se déclarer pratiquants, 38 % considèrent que la religion prime sur la loi civile et leurs valeurs sont bien plus conservatrices que celles de la population belge. Leur image de la femme notamment est conditionnée par la tradition religieuse et son infériorité, revendiquée. Autre donnée, leur absence de connaissances historiques, mais en cela ils rejoignent le reste de la jeunesse belge – et même européenne. L’étude montre aussi que la vision de l’islam de ces jeunes est celle des mouvements les plus radicaux, notamment les Frères musulmans. Cette forte influence de l’islam politique expliquerait aussi le fort sentiment de victimisation ressenti par 65 % des jeunes musulmans alors que la population bruxelloise montre à leur endroit une volonté d’accueil et un fort sentiment compassionnel. Ainsi, malgré la tolérance des Belges, une partie notable de la population d’origine arabo-musulmane, en particulier la jeunesse, est sous l’influence de l’islam politique. On peut en conclure que si la Belgique est devenue la base arrière du djihadisme, c’est qu’elle est à l’avant-garde de l’islamisme. Or, la démographie ne peut qu’accentuer ce positionnement. Dans ces conditions, il devient difficile d’affirmer que le grand remplacement est un fantasme. En réalité, il est le cauchemar de la droite et de l’extrême droite et le rêve des islamistes qui espèrent bien faire de la Belgique le premier État musulman d’Europe. Ce qui explique largement la séduction qu’ils exercent sur la jeunesse.
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