L'Institut Libéral, après avoir consacré cette année sa journée libérale romande, le 12 novembre dernier, à Lausanne, à La liberté et la tolérance, les défis contemporains, édite un livre collectif sur un thème qui lui ressemble.
Les libéraux devraient, en principe, tolérer l'intolérance de manière illimitée, mais, ce faisant, ils risquent sérieusement d'être détruits par ceux qui ne sont pas tolérants et ne se gêneront pas d'en abuser comme d'une faiblesse:
C'est le fameux paradoxe de la tolérance décrit par Karl Popper dans La société ouverte et ses ennemis.
Alain Laurent rappelle que cette notion de tolérance, apparue au XVIe siècle, a dérivé et qu'elle peut être aujourd'hui une lâcheté, une façon de refuser le conflit et de céder à la facilité, pour éviter de faire preuve d'autorité.
Mathieu Creson explique que cette conquête de l'individu rationnel et autonome ne peut être qu'une valeur individuelle. Si l'individu se laisse entraîner par des meneurs mal intentionnés, il peut de tolérant devenir intolérant.
Pour Arkadiusz Sieron, le principe de non agression permet individuellement de répondre à l'intolérance d'un autre: l'individu ne doit en aucun cas tolérer l'intolérance de celui qui se livre délibérément à une agression contre lui.
En résumé d'une recherche empirique menée sur les institutions économiques à travers le monde, Niclas Berggren et Therese Nilsson disent que la liberté économique est capable de générer la confiance sociale et la tolérance.
Olivier Kessler montre que, dans les sociétés du risque zéro, les échecs ne sont pas tolérés et que les leçons n'en sont donc pas tirées, si bien que d'autres risques apparaissent, qui sont plus graves que ceux que l'on voulait éviter.
La liberté d'expression, défendue fermement par John Stuart-Mill, rappelle Camille Dejardin, repose sur les nécessaires rationalité, connaissance et esprit critique, sans lesquels il n'est pas de liberté ni d'ouverture d'esprit.
La liberté d'expression, limitée par la loi suisse, qui protège vie privée et honneur, est aujourd'hui malmenée, selon Alexandre Curchod, par les nombreuses dérives numériques, où s'expriment indignations collectives et morales:
Des mesures publiques tenant avant tout à l'éducation paraissent devoir s'imposer.
À la régulation, Pierre Schweitzer préfère le boycott par tous les moyens privés et non-violents des expressions manifestement porteuses de projets nuisibles ou mortifères, sans renoncer à dialoguer, à convaincre et à écouter.
La seule universalité possible est le respect de toutes les singularités individuelles et l'acceptation de la liberté des uns de faire différemment des autres, dit Thierry Aimar, sauf si le comportement de l'un empêche celui des autres.
Jean-Pierre Chamoux s'inquiète du contrôle social. Il ne pense pas que la tolérance soit une valeur de société mais une vertu personnelle qu'il faut bien mettre entre parenthèses en temps de guerre mais exercer en temps de paix.
Francis Richard
Faut-il tolérer l'intolérance? - Défis pour la liberté, Sous la direction de Nicolas Jutzet, 188 pages, Éditions Institut Libéral
Publication commune LesObservateurs.ch et Le blog de Francis Richard
Et vous, qu'en pensez vous ?