La France a-t-elle été attaquée pour ce qu’elle représente ou en raison de ses interventions militaires en Irak et en Syrie contre l’organisation Etat islamique (EI) ? Cette question traverse le procès des attentats du 13-Novembre depuis son commencement. Elle a été soulevée le 15 septembre, au sixième jour d’audience, par le principal accusé, Salah Abdeslam : « François Hollande dit que nous combattons la France pour vos valeurs et pour vous diviser. C’est un mensonge manifeste. Quand François Hollande a pris la décision d’attaquer l’Etat islamique, il savait très bien que sa décision comportait des risques. »
Deux mois plus tard, la déposition de l’ancien président de la République, entendu comme témoin le 10 novembre, sonnait comme une réponse à ces propos venus du box : « Ce groupe terroriste nous a frappés non pas pour nos modes d’action à l’étranger, mais pour nos modes de vie ici même. » Il n’a pas toujours été aisé, au cours des audiences, de trancher entre ces deux explications. La complexité des faits, la chronologie parfois flottante de certains intervenants et la durée même du procès ont rarement permis d’appréhender cette question dans sa globalité. Au fil des semaines, les débats ont cependant égrené de nombreux éléments de réponse.
Les attentats étaient-ils une réponse à l’intervention en Syrie ?
Le 28 octobre, un extrait audio d’un dictaphone abandonné par un spectateur, qui a enregistré les deux heures et demie de la tuerie du Bataclan, a été diffusé à l’audience. On y entendait, entre deux tirs, un terroriste justifier les attentats : « Pourquoi on fait ça ? Vous bombardez nos frères en Syrie, en Irak. (…) Vous pourrez vous en prendre qu’à votre président, François Hollande. »
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Pour l’ancien président, la chronologie des événements de l’année 2015 suffit à déconstruire l’argument présentant ces attaques comme une réponse à l’intervention française en Syrie : « Les dates sont très importantes pour le procès. La première frappe n’interviendra en Syrie que le 27 septembre 2015, le commando s’était organisé bien avant. Nous savons que les attentats étaient préparés depuis fin 2014. »
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Par-delà la chronologie des événements, c’est sans doute l’EI lui-même qui donne la meilleure réponse à la question qui agite ce procès. Dans un numéro de son magazine de propagande Dabiq, en juillet 2016, le groupe avait publié un article intitulé « Pourquoi nous vous haïssons, pourquoi nous vous combattons ». Après avoir énuméré plusieurs justifications aux attentats visant l’Occident, le texte se concluait sur cette clarification : « Ce qu’il est important de comprendre, c’est que, même si certains assurent que votre politique extérieure est à l’origine de notre haine, cette cause est secondaire (…). En réalité, même si vous cessez de nous bombarder (…), nous continuerons à vous détester parce que la cause principale de cette haine ne cessera pas tant que vous n’aurez pas embrassé l’islam. »
Il y a eu un bon exemple donné pour vous par Abraham et ceux avec lui, quand ils ont dit à leur peuple : Nous sommes innocents de vous et de ce que vous servez en dehors de Dieu. Nous vous avons rejetés, et il semble qu’il y aura de l’animosité et de la haine entre nous et vous jusqu’à ce que vous croyiez en Dieu seul. A l’exception de la parole d’Abraham à son père : Je te demanderai pardon, mais je n’ai aucun pouvoir pour te protéger de Dieu. “Notre Seigneur, nous avons mis notre confiance en toi, et nous nous tournons vers toi, et vers toi est le destin final.”
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