Jonathan Ariel soutient que la débâcle américaine en Afghanistan est attribuable au fait que Washington, il y a des décennies, n'a pas su empêcher le Pakistan de soutenir les talibans, un soutien qui a parfois été caché mais n'a jamais faibli. Son analyse a été publiée ici.
« Les graines de l'humiliant retrait américain d'Afghanistan ont été semées peu après l'invasion américaine du pays à la suite des attentats du 11 septembre, lorsque les États-Unis se sont abstenus d'ordonner au Pakistan de cesser de soutenir ses affidés talibans.
Le mouvement des talibans a été fondé en 1980 dans le cadre d'un effort conjoint américano-pakistanais-saoudien pour combattre les troupes soviétiques en Afghanistan après l'invasion de l'Afghanistan par l'URSS en décembre 1979.
Le Pakistan a fourni une base de repli et une réserve presque inépuisable d'effectifs, principalement des Pachtounes, qui représentent environ 40% à 45% des Afghans et environ 20 % des Pakistanais. Environ 85% d'entre eux vivent au « Pachtounistan », une région à cheval sur la ligne Durand. Les États-Unis ont fourni les armes tandis que l'Arabie saoudite apportait le financement pour les acheter ces armes et couvrir les coûts des camps de réfugiés afghans au Pakistan.
Les talibans à majorité pachtoune sont rapidement devenus la composante la plus importante et la mieux armée des moudjahidines, l'organisation faîtière des rebelles afghans combattant les troupes soviétiques en Afghanistan. (…) »
Autrement dit, les talibans se composent presque entièrement de Pachtounes ethniques, qui sont répartis entre l'Afghanistan et le Pakistan ; la frontière – délimitée par la ligne Durand – n'existe pas pour eux : ils franchissent à volonté cette frontière poreuse. Les Pachtounes du Pakistan ont aidé les Pachtounes afghans dans le mouvement « Taliban » que les États-Unis, le Pakistan et l'Arabie saoudite ont créé ensemble pour combattre les Soviétiques en Afghanistan. Cet effort s'est révélé fructueux ; les talibans se sont avérés être les combattants les plus nombreux et les meilleurs contre les Russes en Afghanistan.
Une fois que les Russes ont quitté l'Afghanistan, une guerre civile a éclaté entre les talibans et les autres groupes moudjahidines, des islamistes moins fanatiques. Or le Pakistan a continué, par le biais de ses sinistres services de renseignement interservices (ISI), à soutenir les talibans en leur fournissant des armes, une formation et, si nécessaire, des refuges. L'ISI a maintenu cette politique même après que les talibans se sont mis à coopérer avec Al-Qaïda. Le Pakistan n'en avaient cure. Beaucoup de Pakistanais soutenaient d'ailleurs Al-Qaïda.
Après le 11 septembre, il n'était plus possible que les Américains perçoivent le Pakistan comme allié des talibans, un groupe terroriste qui avait donné refuge à Al-Qaïda, qui venait d'assassiner 3 000 Américains. Aussi le Pakistan s'est-il livré à des subterfuges, faisant semblant de mettre fin à son soutien aux talibans, mais continuant en réalité à les aider. L'ISI a persuadé les talibans de quitter l'Afghanistan et, sans engager les forces américaines dans la bataille - ce qui se serait soldé par une défaite écrasante pour les talibans - de se replier au Pakistan où ils pourraient vivre à l'abri des attaques américaines, établir leurs camps d'entraînement et attendre le moment où les forces américaines auraient été suffisamment réduites, ou peut-être se seraient complètement retirées, pour rentrer en Afghanistan et le reconquérir. C'est exactement ce qui s'est passé en août dernier.
« Le Pakistan, avec le soutien financier saoudien, a continué à maintenir les talibans en tant que force viable pouvant être déployée le jour où les États-Unis se lasseraient de la guerre sans fin dans le pays et commenceraient à s'en dégager. En outre, le Pakistan a continué à jouer un double jeu avec les États-Unis en permettant au réseau Haqqani, soutenu par l'ISI, de poursuivre ses opérations au Pakistan. Khalil Haqqani, malgré une prime de 5 millions de dollars sur sa tête en tant que terroriste recherché, était depuis longtemps un visiteur régulier du siège de l'ISI, et il est désormais l'un des nouveaux dirigeants de l'Afghanistan. »
La duplicité du Pakistan ne s’est donc pas bornée à continuer de soutenir les talibans tout en faisant croire aux Américains qu'il les avait abandonnés. Le réseau terroriste islamique Haqqani tire son nom de celui d'une famille. Jalaluddin Haqqani était le fondateur de ce groupe de musulmans purs et durs ; les Haqqani étaient des alliés des talibans, et, fait encore plus accablant, d'Al-Qaïda. Malgré cela, Khalil Haqqani, le principal collecteur de fonds du groupe, était « un visiteur régulier » du QG de l'ISI, où il recevait du Pakistan à la fois de l'argent et des armes. Haqqani vient maintenant de refaire surface comme l'un des dirigeants talibans de l'Afghanistan.
« Il est clair que même jusqu'en juin 2021, si les États-Unis avaient clairement indiqué au Pakistan que, s'il ne faisait pas en sorte que les talibans autorisent un retrait pacifique et ordonné de tout le personnel américain et de leurs alliés afghans souhaitant quitter le pays, il le paierait très cher, cette débâcle n'aurait jamais eu lieu. Les États-Unis ont une influence presque illimitée sur le Pakistan, qu'il s'agisse de lui infliger des sanctions paralysantes ou de laisser entendre qu'ils donneront à l'Inde le feu vert pour reprendre les parties du Cachemire (Gilgit-Baltistan) qui sont sous occupation pakistanaise non reconnue depuis 1948. »
Le Pakistan a été depuis des décennies l'enfant gâté de la politique étrangère américaine. Ses généraux à la Terry Thomas, moustachus et fanfarons, étaient considérés par leurs homologues américains comme de splendides camarades, tellement plus dignes de confiance que les Indiens de tendance soviétique, tels que Jawaharlal Nehru et Krishna Menon. De plus, raisonnait Washington, ces musulmans pakistanais détestaient les communistes. C'est vrai; mais ils détestaient aussi les Infidèles! Le pays a été un important bénéficiaire de l'aide américaine, année après année. Ce sont les dollars de l'aide américaine qui ont payé le programme nucléaire du Pakistan.
Les Américains avaient investi tellement d'argent et de confiance dans le Pakistan qu'ils ne voulaient pas croire à la duplicité d'Islamabad. Les États-Unis auraient pu lire au Pakistan la "loi sur les émeutes" et lui dire d'exiger des talibans qu'ils assurent un retrait sans hâte et organisé des Américains et de leurs alliés afghans, mais ils ne l'ont pas fait. Ils auraient pu menacer de couper toute aide, d'imposer des sanctions économiques, de donner à l'Inde le signal qu'elle devait aller de l'avant, avec la bénédiction américaine, et reprendre des parties du Cachemire que le Pakistan occupe illégalement depuis 1948. Rien de tout cela n'a été tenté.
« Au vu de l'énorme disparité entre les capacités pakistanaises et américaines, les capacités nucléaires limitées du Pakistan auraient compté pour beurre, car 165 ogives montées sur des missiles Shaheen-3 à relativement courte portée (2650 kilomètres) ne constituent pas une menace réelle pour les États-Unis. Les généraux pakistanais ont peut-être du culot mais ils sont des professionnels compétents, pas des fous suicidaires. Face à une menace américaine crédible, ils auraient cherché une solution diplomatique. (…) »
Le Pakistan possède 165 têtes nucléaires, les États-Unis en ont 5550, soit plus de 34 fois plus. Mais plus important, il n'y a aucun risque qu'elles atteignent les États-Unis: les missiles Shaheen-3 du Pakistan ont une portée de 2650 km alors que la distance entre le Pakistan et les États-Unis est de 12'350 km.
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En revanche, les planificateurs militaires israéliens sont particulièrement inquiets au sujet de l'énorme arsenal de 150'000 roquettes, dont certaines à guidage de précision, que le Hezbollah possède maintenant, caché dans tout le sud du Liban. Ils ne veulent pas qu'elles soient lancées dans une série de tirs massifs contre les centres de population civile israéliens : des milliers lancées chaque jour pendant un mois seraient beaucoup trop difficile à gérer pour le système de défense antimissile Iron Dome.
« Ce n'est cependant pas la seule raison, car militairement, Israël a la capacité de vaincre les deux groupes soutenus par l'Iran. Afin de détruire le Hamas, Israël devrait reprendre le statut de puissance occupantde Gaza, ou s'assurer à l'avance qu'une forme quelconque de force multinationale serait disponible et capable d'assumer la responsabilité de Gaza. Aucune force de ce type n'a de chance de naître de sitôt. Une occupation israélienne unilatérale de Gaza serait possible, mais à un prix prohibitif économiquement, diplomatiquement et en termes d'opinion publique. »
Les Israéliens ne veulent pas de l'énorme souci que serait une réoccupation militaire de Gaza, même si c'est le seul moyen d'assurer la destruction complète du Hamas plutôt que d'aller de temps en temps "tondre l’herbe" à Gaza. Il n'y a aucune force de l'ONU capable d'intervenir pour faire le travail ; il y a juste eu de quoi trouver une poignée de casques bleus pour patrouiller inefficacement dans le sud du Liban. Une fois qu'Israël aurait vaincu le Hamas à Gaza et que Tsahal aurait établi sa présence dans la bande, il appartiendrait alors à Israël, en tant que puissance occupante, d'empêcher le chaos, tout d'abord en fournissant un soutien économique aux habitants de Gaza appauvris. Israël serait sûr d'être attaqué sur le plan diplomatique, dans les différents organes de l'ONU, de l'Assemblée générale au Conseil des droits de l'homme de l'ONU, au Conseil de sécurité, et aussi d'être étrillé dans les médias du monde entier, qui décriront l'État juif comme un agresseur et un « occupant » devant être chassé de Gaza.
« Pour détruire le Hezbollah, Israël devrait détruire la moitié du Liban, puisque le Hezbollah est un État dans l'État, plus puissant que l'État légitime lui-même. Militairement, cela serait possible, mais cela créerait un désastre humanitaire et un désastre d'image. Israël mise donc sur ne politique d'endiguement et de gestion, étant parvenu à la conclusion que les sacrifices et les répercussions économiques, diplomatiques et militaires de l'autre solution seraient trop coûteuses. (…) »
Le Hezbollah s'est tellement enraciné dans la population civile du Liban, en cachant ses 150'000 roquettes et lance-roquettes à l'intérieur d'écoles, d'hôpitaux, de bureaux et d'immeubles d'habitation, que s'il s'efforçait de détruire le plus d'armes possible, Israël détruirait également une grande partie de l'infrastructure civile du pays. Cela deviendrait pour Israël, comme le dit Jonathan Ariel, "un désastre humanitaire et de relations publiques". Les Israéliens ne veulent pas non plus subir les pertes - les soldats de Tsahal morts et blessés - qu'entraînerait une intervention terrestre à grande échelle.
En traitant le Pakistan comme un allié, au lieu d'y reconnaître un partisan trompeur des talibans, les États-Unis ne pourront jamais anéantir ces derniers, qui pourront toujours trouver refuge, se regrouper, et continuer à s'entraîner en toute sécurité, à l'intérieur du Pakistan.
Jonathan Ariel soutient qu'Israël ne peut plus compter sur l'"endiguement" de la menace du projet nucléaire iranien: il doit "neutraliser" – c'est-à-dire détruire entièrement – la menace d'un Iran nucléaire. Le Mossad israélien a réussi pendant plus d'une décennie à ralentir à plusieurs reprises – pour la "contenir" – la course à la bombe de l'Iran. Le Mossad a introduit le ver informatique Stuxnet qui a provoqué la perte de contrôle de 1000 centrifugeuses et leur destruction. Des agents du Mossad ont assassiné cinq des meilleurs scientifiques nucléaires iraniens. Les agents du Mossad ont volé toutes les archives nucléaires de l'Iran et les ont ramenées en Israël, où l'étude des documents a montré à quel point le programme nucléaire iranien avait été étendu et bien caché. Le Mossad a provoqué la destruction, par sabotage, de deux usines de centrifugation à Natanz, l'une en 2020 et l'autre, sa remplaçante construite à 50 mètres sous terre, en 2021.
Israël a également ébranlé le régime iranien en provoquant une série d'explosions et d'incendies inexpliqués dans des usines pétrochimiques, des centrales électriques et d'autres infrastructures importantes dans tout le pays.
Mais bien qu'Israël ait ralenti le programme nucléaire de l'Iran, les Iraniens ne se sont pas découragés : ils continuent de cacher des installations nucléaires à l'AIEA, et enrichissent rapidement de l'uranium, qui dans l'Accord de Vienne ne devait pas dépasser une teneur de 3,7%, mais maintenant les Iraniens en sont à 60%, si bien que la fabrication d'une bombe est désormais, selon certains – dont le secrétaire israélien à la Défense Benny Gantz – une question de mois et non plus d’années.
La débâcle en Afghanistan aurait dû ouvrir les yeux des Israéliens : ils ne peuvent pas compter sur Biden & Cie pour empêcher l'Iran de produire une bombe. Biden aura beau promettre solennellement que sous sa surveillance l'Iran n'aura pas le bombe, mais compte tenu de son comportement récent, quelles sont les chances qu'il entre en guerre pour empêcher l'Iran de devenir une puissance nucléaire, alors qu'il est si déterminé à quitter aussi le Moyen-Orient ?
La leçon de l'Afghanistan, désormais sous le joug des talibans après un retrait américain précipité, mal planifié, confus et ignominieux, qui a convaincu de nombreux musulmans du déclin américain et de la montée en puissance des musulmans, est pour l'État juif très simple et très dure : Israël, tu es seul.
Source: https://www.jihadwatch.org/2021/09/the-lesson-of-the-afghanistan-debacle
Traduction Albert Coroz pour LesObservateurs.ch
1) A Nuremberg, on a fait un procès au national SOCIALISME qui rend bête et méchant (et menteur au point de se prétendre d’extrême droite), et on l’a interdit.
2) A Paris, on fera un procès de 9 mois à la CHARIA qui rend bête et méchant.
3) En représailles après l’attaque des 19 saoudiens le 11 septembre 2001, c’était évidemment la Mecque qu’il fallait bombarder, et non pas l’Afghanistan.
Finalement les USA ont financé les gens qui tuaient leurs soldats