Le PiS va faire adopter le Plan de relance de l’UE sans son allié mais avec les voix de La Gauche

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Pologne – Mardi, les commentateurs proches du gouvernement comme de l’opposition semblaient d’accord : la coalition Droite unie conduite par le PiS tiendra jusqu’aux prochaines élections législatives en 2023. Un accord semblait en effet avoir été trouvé entre, d’une part, les partenaires de la coalition sur un nouveau programme pour la période 2021-23 et, d’autre part, entre le PiS et Lewica (La Gauche) pour un vote positif au parlement sur le plan de relance de l’UE. Outre les difficultés avec le parti Porozumienie (Entente) du vice-premier ministre et ministre du Développement, du travail et de la technologie Jarosław Gowin, le PiS de Jarosław Kaczyński était confronté au refus du ministre de la Justice Zbigniew Ziobro et de son parti Solidarna Polska (Pologne solidaire) de voter la ratification du plan de relance Next Generation EU. Cette divergence, en plus de quelques autres, semblait de nature à menacer l’existence de la coalition Droite unie et donc de la majorité absolue du groupe PiS (auquel appartiennent les députés de Gowin et de Ziobro) à la Diète. L’idée d’un gouvernement minoritaire ou d’élections anticipées était de plus en plus souvent évoquée, alors que les sondages montrent que le PiS, avec ou sans ses alliés, n’avait plus aucune chance de reconduire sa majorité absolue après un an de gestion covidienne très discutable (même si les commentateurs de gauche expliquent plutôt la baisse durable d’une dizaine de points de la popularité du PiS par la décision du Tribunal constitutionnel d’interdire les avortements eugéniques). Quant aux partenaires du PiS, Solidarna Polska n’était pas sûr d’atteindre le seuil des 5 % pour envoyer des députés à la Diète tandis que Porozumienie était sûr de ne pas l’atteindre, au vu des sondages.

Dans ces conditions, les trois partenaires de la coalition Droite unie étaient condamnés à s’entendre. Leurs leaders – Jarosław Kaczyński, Zbigniew Ziobro et Jarosław Gowin – se sont donc réunis la fin de semaine dernière et ont annoncé dimanche, par la voix du président du Comité exécutif du PiS Krzysztof Sobolewski, que les trois partis étaient satisfaits de leur bilan depuis 2015 et qu’ils allaient travailler ensemble dans les jours qui viennent à la préparation d’un nouveau programme commun pour la période 2021-2023.

Les divergences sur le plan de relance ont de toute évidence été entérinées et ne devraient pas conduire à un éclatement de la coalition. Le projet de loi de ratification a été adopté mardi en Conseil des ministres à la majorité des voix (sans celles des deux ministres de Solidarna Polska). Dans un communiqué publié mardi, le parti de Zbigniew Ziobro a expliqué qu’il s’opposait à ce plan de relance à cause du mécanisme conditionnant le versement des fonds à l’état de droit qui accompagne ce plan et qui risque de conduire à des décisions arbitraires de Bruxelles pouvant menacer la souveraineté de la Pologne. Le communiqué mentionne également l’impact négatif sur l’économie polonaise qu’auront les objectifs climatiques de l’UE pour 2030, intégrés dans la construction du budget de l’UE pour 2021-27. Cependant, poursuit le communiqué, la Droite unie conserve une vision commune pour la Pologne.

Jarosław Kaczyński avait déclaré dans un récent entretien qu’une défaite du PiS sur le vote du Plan de relance sonnerait la fin de la coalition. Mais malgré l’opposition de Solidarna Polska sur ce vote, l’adoption du plan de relance polonais, qui vaudra aussi ratification du plan européen Next Generation EU (une ratification obligatoire en raison de sa nouveauté : l’émission de titres de dette commune), semble désormais assurée grâce à l’accord trouvé mardi avec le parti Lewica (La Gauche). En échange du soutien de ce parti à la Diète et au Sénat, le premier ministre Mateusz Morawiecki a accepté d’intégrer les propositions de Lewica au plan de relance : la construction de 75 000 appartements qui seront mis en location, l’affectation de l’équivalent de 850 millions d’euros aux hôpitaux des powiats (l’échelon administratif entre la voïvodie et la commune), au moins 30 % des fonds de l’UE entrant dans le cadre du plan national de relance qui seront mis à la disposition des collectivités locales, ainsi que l’affectation de 300 millions d’euros supplémentaires aux secteurs ayant le plus souffert de la pandémie, comme l’hôtellerie et la restauration. La Gauche a également exigé qu’il y ait un plan détaillé de la manière dont les fonds seront dépensés, afin de pouvoir s’assurer de la mise en œuvre de ce qui a été convenu.

Si les leaders de Lewica mettent en avant leur succès – ils ont réussi à exercer une réelle influence sur l’utilisation des fonds européens – les libéraux de la Plateforme civique (PO) et de leur Coalition civique (KO – alliance de la PO, de Nowoczesna et des écologistes), y compris Donald Tusk depuis Bruxelles, ne cachaient pas leur colère mardi. La négociation menée par La Gauche fait qu’ils n’ont plus les moyens d’exercer eux-mêmes une influence sur ce plan de relance ni de faire tomber le gouvernement de Mateusz Morawiecki. Leurs positions de plus en plus inconditionnellement européistes étaient toutefois difficilement compatibles avec leur menace de bloquer la ratification du plan européen alors qu’il faut la ratification des 27 parlements nationaux pour que la Commission européenne puisse commencer à mobiliser les fonds. Ainsi que l’a fait remarquer sur Twitter le nationaliste Krzysztof Bosak, de Konfederacja (La Confédération) : « Nous avons une majorité pro-UE à la Diète. Il était donc prévisible que le transfert de nouvelles compétences à l’UE (eurodette, eurotaxes) contre de l’argent trouverait le soutien nécessaire. »

Le chef de la PO s’est pourtant dit surpris des négociations menées en solitaire par La Gauche. Des négociations qui scellent l’échec de la stratégie d’opposition unie sous le leadership de la PO, à un moment où la Plateforme civique est dépassée dans les sondages par le nouveau parti Polska 2050 du « catholique progressiste » Szymon Hołownia et critiquée pour sa dérive à gauche sur le plan sociétal et pour le radicalisme excessif de ses positions contre le PiS.

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