Militantisme engagé ou science, dérives idéologiques à l’UNIL ?

Jean-François Dupont
Ingénieur-physicien EPFL
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Militantisme engagé ou science, dérives idéologiques à l’UNIL ?

Les Observateurs ont signalé dans un article du 20.03.2021 que :

« L’ Université de Lausanne veut « encadrer » la parole militante de son corps enseignant: RTS.ch 19.03.2021, Journal de midi »

https://lesobservateurs.ch/2021/03/20/l-universite-de-lausanne-veut-encadrer-la-parole-militante-de-son-corps-enseignant-rts-ch-19-03-2021-journal-de-midi/

L’UNIL se préoccupe donc d’une possible dérive idéologique et politique de certains de ses enseignants. Dans le Journal de midi de la RTS du 19.03.2021, cité par Les Observateurs, Dominique Bourg rejette ces accusations de manière véhémente.

Quelques réflexions sur cette affaire.

 

Une figure de proue.

Dominique Bourg est probablement la figure de proue de ces enseignants qui pratiquent ce militantisme engagé qui envahit l’UNIL.

Deux exemples clairs de ce militantisme engagé.

  • Dans un séminaire à l’UNIL sur la « finitude des ressources » sous la responsabilité de Dominique Bourg, un transparent annonçait la couleur : « Sachez que cette question de la finitude des ressources n’est pas technique, c’est une question de morale »

Donc les scientifiques de la faculté des géosciences et de l’environnement (longtemps sous la responsabilité de Dominique Bourg) nous disent en clair : sur la finitude des ressources nous ne ferons pas de science, nous ferons de la morale. C’est grave, il faut récuser cette morale, morale de pharisiens par ailleurs. Parce que cette question suppose bien une analyse de l’état lieux, pour évaluer si la civilisation a encore et combien de marge de développement, ou si elle est déjà trop loin, dans une impasse. Suivant les résultats de cette analyse il faudra alors prendre des mesures politiques, qui pourront être faciles ou douloureuses. Là il faudra peut-être de la politique, et aussi de la morale, mais certains préfèrent imposer a priori, sans analyse, une morale de décroissance. Ce n’est pas ce qu’on attend d’une UNIVERSITÉ : le citoyen veut une recherche éclairée et libre, pas de l’intégrisme idéologique.

  • Le prof. Dominique Bourg s’est exprimé publiquement à plusieurs reprises, et dans son blog, sur les causes de la pandémie. Il affirme que cette pandémie est la faute de l’Homme : les deux péchés principaux sont selon lui : le progrès scientifique et l’économie libérale ! Assez incroyable cette position comme universitaire : des pandémies terribles ont déjà existé bien avant l’ère industrielle et avant le capitalisme. Concernant les progrès techniques de la science ainsi que les apports de l’économie, ce sont des outils dont l’essentiel est d’en faire un bon usage, ils ne sont ni à idéaliser, ni à diaboliser. En cela la position de M. Bourg est à l’opposé d’une attitude scientifique, même au sens des sciences humaines et sociales : son attitude est politique. Ce n’est pas ce que les citoyens attendent de leurs professeurs universitaires.

 

L’écologie politique n’est pas une science.

Dominique Bourg incarne une politique écologique, qui est très idéologique et peu scientifique. Le philosophe Luc Ferry a fait une analyse remarquable de l’écologie politique dans son livre « Le nouvel ordre écologique ». Il dénonce un antihumanisme : l’écologie politique s’oppose en particulier à deux faces de l’humanisme, le progrès scientifique (déjà évoqué) et la démocratie parce que certaines décisions seraient trop difficiles à prendre (l’écologie politique aime parler de crises, proclamer l’état d’urgence et confier les pleins pouvoirs à l’État).

On trouvera un éclairage intéressant sur deux systèmes de pensées qui s’affrontent dans Philosophie Magazine avec cette interview croisée de Luc Ferry et Dominique Bourg : https://www.philomag.com/articles/luc-ferry-dominique-bourg-le-debat-durable  (copie en annexe).

 

L’angoisse du scientifique.

Sur le fond, on peut constater qu’un scientifique est « normalement » angoissé au moment où il explique une réalité sur laquelle il travaille. Son angoisse tient dans cette question :

« Ce que je comprends, ou croit comprendre, est-ce le reflet de la réalité, ou le reflet de mes préférences ?»

Honneur aux scientifiques habités par cette angoisse, que visiblement Dominique Bourg ne connaît pas : il est habité par ses préférences

 

Les interventions à la RTS : jusqu’ici de l’autojustification.

L’évolution de cette affaire naissante de « parole militante des enseignants de l’UNIL » sera intéressante à suivre. Jusqu’à aujourd’hui la RTS a donné la parole, en dehors de la rectrice Mme Nuria Hernandez, à deux enseignants : Antoine Chollet (https://www.rts.ch/play/radio/forum/audio/la-volonte-dencadrer-la-parole-militante-des-professeurs-a-lunil-fait-reagir?id=12038698)   et Dominique Bourg. Constat : dans les deux cas ce sont précisément des enseignants militants qui s’expriment : ils versent dans l’autojustification et confirment la critique qui leur est faite.

Le thème est probablement délicat à traiter pour les médias : ils sont eux-mêmes soupçonnés de pratiquer d’avantage le militantisme engagé au profit de positions politiques que l’analyse rigoureuse de la réalité, cette fameuse investigation journalistique dont ils aiment se réclamer. L’enseignant militant est probablement pour eux un miroir dérangeant.

Il faut espérer que l’on entende par la suite aussi des voix critiques et lucides s’exprimer, à l’intérieur et à l’extérieur de l’UNIL, sur cette dérive idéologique.

Honneur à Madame Suzette Sandoz, ancienne professeur de droit à l’UNIL, qui avait déjà tiré la sonnette d’alarme dans son blog le 26.10.2019 :

https://blogs.letemps.ch/suzette-sandoz/2019/10/26/lettre-ouverte-aux-81-academiques-qui-ont-signe-la-declaration-de-soutien-a-extinction-rebellion/

JFD/21-03-2021

 

 

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