Après Viktor Orbán, c’était jeudi au tour du premier ministre polonais Mateusz Morawiecki d’envoyer une lettre à la présidence allemande du Conseil de l’UE ainsi qu’à la présidence de la Commission et du Conseil européen, pour signifier le refus du mécanisme d’État de droit convenu entre Berlin et le Parlement européen. Un accord qui avait suscité l’enthousiasme des eurofédéralistes le 5 novembre, un enthousiasme résumé en ces termes par le négociateur en chef du PE, le Finlandais Petri Sarvamaa: «Pour la première fois, nous avons créé un mécanisme permettant à l’UE de cesser de financer les gouvernements qui ne respectent pas nos valeurs…». Or si elles seraient prêtes à accepter un nouveau mécanisme portant sur les garanties d’utilisation honnête et transparente des fonds européens, la Pologne et la Hongrie – échaudées par des années de procédures en tout genre et de rapports du Parlement européen critiquant tout et n’importe quoi – refusent que ce mécanisme puisse porter sur les critères flous liés à l’État de droit en général. Un mécanisme qui permettrait par exemple à la Commission européenne de suspendre les versements à la Pologne au titre du budget européen au prétexte que ses réformes de la justice seraient contraires à l’État de droit. Pour avaliser une telle décision de la Commission, il suffirait de l’approbation de 15 pays de l’UE sur 27 habités par au moins 65% des habitants du bloc, alors qu’en vertu des traités européens il faut l’unanimité de tous les autres pays pour sanctionner un pays membre accusé de violer l’État de droit.
Comme la Hongrie, la Pologne menace donc d’opposer son veto à l’adoption du budget 2021-27 de l’UE ainsi que du plan de relance « Next Generation EU ». Dans sa lettre adressée à la chancelière allemande Angela Merkel, au président du Conseil européen Charles Michel et à la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, le Polonais Mateusz Morawiecki explique que la Pologne ne peut pas accepter des mécanismes «fondés sur des critères arbitraires motivés politiquement » qui feraient que les «décisions budgétaires très ambitieuses négociées (…) en juillet peuvent être réduites à néant dans la pratique».
Si ce mécanisme faisant dépendre le versement des fonds européens du respect de l’État de droit pourra probablement être approuvé à la majorité qualifiée du Conseil, peut-être même dès lundi, il faut l’unanimité des États membres pour adopter le cadre financier pluriannuel, c’est-à-dire le budget pour la période de 2021 à 2027. Quant au plan de relance anti-Covid qui prévoit, pour la première fois, des emprunts européens, il doit être approuvé par tous les États membres et aussi ratifié par les parlements nationaux. Si le budget et le plan de relance ne sont pas adoptés d’ici à la fin de l’année, c’est le cadre financier pluriannuel des années 2014-20 qui continuera de s’appliquer.
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