L’information circulait déjà dans les cercles bien renseignés : la Turquie a orienté le flux de djihadistes syriens qu’elle évacuait d’Idlib vers la Libye, en direction du Haut-Karabagh. En juillet, la Turquie avait même profité, avec un esprit de provocation scandaleux, d’une opération de blocus des côtes libyennes menée par l’Otan (opération Sea Guardian) pour escorter des porte-conteneurs de munitions, de véhicules… et de djihadistes. Pour rappel, à cette occasion, un bâtiment turc avait même « illuminé » avec son radar de conduite de tir une frégate française, le Courbet, qui allait inspecter un de ces fameux bateaux.
D’où provient le conflit du Haut-Karabagh ? Il remonte à Staline et l’URSS, lorsqu’en 1924, le bureau caucasien du Comité central du parti bolchevik décide d’attribuer cette région historiquement arménienne à l’Azerbaïdjan. Staline, lui-même géorgien, ne pouvait pas ignorer que cette décision serait un facteur de division. Il n’est pas improbable qu’il s’agisse d’une stratégie délibérée, destinée à affaiblir par la haine et la rancœur cette région stratégique riche en points de passage obligés et verrou sud de l’URSS. Une situation comparable à celle de la Crimée, donnée arbitrairement à l’Ukraine dans un contexte comparable.
Toujours est-il que ce cadeau d’outre-tombe du communisme offre un prétexte en or massif pour la politique de Recep Tayyip Erdogan. Cette politique semble régie par la mécanique des fluides. Il utilise le robinet à migrants pour racketter l’Union européenne et déstabiliser la Grèce, et utilise le robinet à djihadistes pour déstabiliser Libye et désormais Arménie. Pour un musulman, une terre qui a été terre d’Islam le reste à jamais. Pour cette raison, puisque le Haut-Karabagh a été sous juridiction légale azérie, les musulmans considèrent que le lieu leur appartient, au mépris de la réalité historique. Comme dans les Balkans et le Kosovo, où, coïncidence, l’héritage communiste est également présent. Autre exemple, l’Islam considère toujours que l’Espagne, Al Andalus, est toujours leur, par droit de conquête.
La présence de djihadistes importés par avion sur le front a été confirmée par Emmanuel Macron, qui l’a vivement dénoncée. Vladimir Poutine, lui aussi, a récemment demandé un arrêt immédiat des hostilités. Recep Tayyip Erdogan a posé le retrait des troupes arméniennes comme préalable à un cessez-le-feu. L’Arménie est un pays qui s’est fait dépouiller de 90 % de son territoire depuis le début de son histoire plurimillénaire. Dès lors, l’évacuation du Haut-Karabagh n’est absolument pas une option pour le moment.
Les conséquences diplomatiques commencent à se faire sentir. L’Arménie a récemment rapatrié son ambassadeur d’Israël, à cause du soutien de ce pays à l’Azerbaïdjan, en particulier par la vente d’armement extrêmement difficile à contrer, comme les drones suicides. Plus de détails à ce sujet en page 7. D’autre part, c’est à souligner, le soutien diplomatique de Viktor Orban à l’Azerbaïdjan fait tache pour un pays qui se targue d’être un bastion catholique. Rappelons cette vérité, qui sera rappelée dans tous les articles futurs au sujet de la Turquie et de ses pays satellites : si on ne stoppe pas le Turc à ses frontières, nous le stopperons au pied des murs de Vienne. Suite au prochain épisode. •
Benoît Busonier
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