L’Azerbaïdjan attaque l’Arménie pour la Turquie
« Sur décision du gouvernement, la loi martiale et la mobilisation générale sont déclarées dans la République d’Arménie. J’appelle le personnel attaché aux troupes à se présenter à leurs commissariats de circonscription. Pour la patrie, pour la victoire. » L’Arménie est en guerre.
Cette guerre se trouve encore, pour quelques jours, quelques heures peut-être, dans un cadre un peu flou, parce que les combats n’ont pas encore lieu sur le territoire national légal arménien. L’objet du litige est le contrôle du Haut-Karabakh, région historiquement arménienne, qui a fait sécession de l’Azerbaïdjan en 1991. La proportion d’Arméniens qui y réside est d’environ 95 %.
Toujours est-il que l’Azerbaïdjan considère que ce territoire est sien, et attaque à chaque décennie pour le reprendre, déclenchant à chaque fois une réaction militaire de la population locale appuyée par l’Arménie. Dimanche, l’Azerbaïdjan a entamé un assaut en règle, prenant par surprise plusieurs localités et une partie des cols. Les soldats arméniens ont mené de violentes contre-attaques, notamment articulées autour de tirs d’artillerie. Depuis le déclenchement de l’attaque, l’Azerbaïdjan a perdu une centaine de chars, et un millier de soldats. Des chiffres relativement élevés, et qui sont révélateurs d’une doctrine opérationnelle manifestement inadaptée de la part des Azéris. Sur les nombreuses images disponibles sur internet, on peut observer des chars T-72 azéris dans des formations tout à fait curieuses, très rapprochés les uns des autres et sans couverture d’infanterie efficace, se faire pulvériser par des missiles antichars individuels de moyenne portée arméniens. Il semble que l’emploi de chars sur des terrains aussi découverts soit désormais un suicide tactique, d’autant que les drones ne coûtant pas grand-chose, la reconnaissance est extrêmement facilitée.
« Le Haut-Karabakh c’est l’Azerbaïdjan, l’Azerbaïdjan c’est la Turquie » scandaient des manifestants turcs à Paris lundi. Difficile de ne pas voir derrière les manœuvres azéries la main de Recep Tayip Erdogan. Le néo-sultan poursuit son rêve de réunification de l’empire ottoman en 2024, et l’Arménie est un obstacle géographique à son rêve. Dès lors, l’attaque azérie est probablement une attaque en service commandé par Ankara. Pour preuve, des F16 turcs ont violé l’espace aérien arménien, et des drones de reconnaissance turcs sont en permanence en vol sur la frontière sud-ouest de l’Arménie. D’autre part, des « conseillers militaires » turcs sont officiellement en Azerbaïdjan. Conseiller militaire, c’est un nom de code diplomatique depuis la guerre du Vietnam pour signifier déploiement de forces spéciales et don de matériel, bref appui militaire direct. Le gouvernement turc a, par la voix de son président, assuré Bakou de son soutien.
De leur côté, les Arméniens regardent du côté de Moscou. L’Arménie ne pourra pas résister seule éternellement à une offensive conjointe des Turcs et des Azéris. La Russie pourrait bien intervenir pour empêcher la jonction entre Turquie et Azerbaïdjan, laquelle menacerait directement la Géorgie et tout l’équilibre du Caucase, faisant courir le risque d’une nouvelle guerre de Tchétchénie, ce que Moscou veut éviter à tout prix. Mais attention au jeu des alliances : la Turquie fait bel et bien partie de l’OTAN, et si les Russes les attaquent pour défendre Erevan, nos traités nous obligent théoriquement… à défendre les Turcs. Les Iraniens, dont l’attitude est toujours ambiguë, ont monté des troupes par camion pour les pré-positionner le long de leur frontière commune avec l’Arménie et l’Azerbaïdjan.
Pour l’instant les Arméniens semblent déterminés et capables tactiquement de repousser les Azéris. Espérons que ce pays chrétien dans un Orient dangereux tienne le choc. Et que l’Occident ne laissera pas son ami seul face au drapeau rouge au croissant de lune. •
Benoît Busonier
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Extrait de: Source et auteur
On oublie souvent de mentionner qu’Israël arme aussi l’Azerbaïdjan, notamment en matière de drones “tueurs”. Ah oui, l’Occident, tout ça, nos meilleurs alliés…
Tous mes voeux de victoire aux vaillants Arméniens !
Un deuxième génocide des Arméniens se prépare, on verra si les grands donneurs de leçons occidentaux se bougent cette fois-ci !