Loi Avia : l’État veut s’occuper de tout !

 

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Par Nicolas Lecaussin.
Un article de l’Iref-Europe

Il y a eu d’abord, le 20 mars 2019, la proposition déposée par plusieurs dizaines de députés, qui visait à « lutter contre la propagation des discours de haine sur internet ».

Elle a obtenu un vote favorable en première lecture à l’Assemblée nationale le 9 juillet 2019, affirmant que « la lutte contre la haine, le racisme et l’antisémitisme sur Internet constitue un objectif d’intérêt général qui justifie que le législateur prévoie des dispositions fortes et efficaces. »

Il s’agit là d’imposer des contraintes aux plateformes numériques et des sanctions très sévères en cas de dérogation.

L’article 1 par exemple définit « un nouveau régime de responsabilité administrative applicable aux opérateurs de plateformes à fort trafic, selon un seuil de connexion mensuel sur le territoire français qui sera déterminé par décret. Cette disposition impose à ces opérateurs de retirer ou de rendre inaccessible, dans un délai maximal de 24 heures après notification, tout contenu comportant manifestement une incitation à la haine ou une injure discriminatoire en raison de la race, de la religion, du sexe, de l’orientation sexuelle ou du handicap. Le manquement à cette obligation est passible d’une sanction déterminée et prononcée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel et susceptible d’atteindre 4 % du chiffre d’affaires annuel mondial de ces opérateurs. »

L’article 4 fixe des obligations de transparence aux opérateurs de plateformes. Il s’agira par exemple de « communiquer le nombre de signalements reçus, la répartition des délits visés, le nombre de signalement abusifs ou encore les moyens humains et financiers engagés dans la lutte contre la haine sur internet. Il reviendra au régulateur de déterminer la liste des informations qui devront être rendues publiques, ainsi que leur temporalité. »

L’article 6 permet « d’obtenir une première décision de blocage et de déréférencement des sites illicites et, d’autre part, de confier le pouvoir à une autorité administrative d’enjoindre au blocage des sites miroirs identifiés, sur le fondement de la décision de justice initiale. »

L’État veut tout voir

Le rapport sur cette loi publié trois mois plus tard, le 19 juin 2019, présente et commente la loi. Il est question d’instaurer une régulation administrative des grandes plateformes en ligne en matière de lutte contre les contenus haineux ; il est question aussi d’un plan national de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, de l’amélioration des moyens d’enquête et de jugement et même de la révision du cadre européen applicable à la régulation des contenus en ligne.

Tout cela sous le contrôle du CSA avec obligation de se conformer à ses recommandations. Le texte a été voté en juillet 2019 à l’Assemblée mais le Sénat l’a retoqué mi-décembre, retirant le mécanisme principal qui imposait aux plateformes de retirer les contenus haineux dans un délai de 24 heures (!) sous peine d’une amende pouvant atteindre 4 % de leur chiffre d’affaires mondial.

À juste titre, deux points ont inquiété les sénateurs, la remise en cause de la liberté d’expression et l’énormité de la sanction : 4 % du CA de Facebook représentent environ 2,5 milliards de dollars !

Même la Commission européenne, le 22 novembre dernier, a considéré que cette loi allait créer « une charge disproportionnée » sur les plateformes et « un risque de suppression excessive des contenus ». Elle serait contraire aussi à un principe du droit communautaire, qui interdit aux États membres d’instaurer une surveillance généralisée des réseaux.

Quelle hypocrisie ! Les lois liberticides mènent toujours tout droit à l’autoritarisme

En réalité, cette loi s’inscrit dans la tradition réglementaire et étatiste française. L’État (les politiques) contrôle, décide et censure. Un organisme public fait le travail de surveillance (en l’occurrence le CSA) et décide des sanctions. La loi s’en prend aux GAFA (une autre manière de les attaquer, en plus de la fiscalité) afin de les obliger à revoir leur modèle économique, et instaure un mécanisme de surveillance contraire à la liberté sur le Web.

Il s’agit d’un texte liberticide (comme la loi sur les fake news) qui renforcerait le pouvoir de Big Brother sur les individus. Une surveillance 24 h/24, l’accès à tout ce que dit et écrit chacun de nous : l’État en rêve, l’État tente de le faire ! S’il réussit, les plateformes numériques n’auront d’autre choix que de nous censurer par précaution, afin d’éviter les sanctions et les amendes.

Ou alors il faudra appliquer la méthode Poutine : tout serveur internet russe est obligé de passer par l’agence de surveillance des télécoms et médias (Roskomnadzor) et par les services spéciaux (FSB).

Non, l’État n’a pas à se mêler de tout cela sauf dans les cas extrêmement graves comme les menaces terroristes, les incitations flagrantes à la violence, la pédopornographie… D’ailleurs, quelle hypocrisie de la part de cette gauche moralisatrice qui veut aujourd’hui contrôler les plateformes numériques et qui a naguère admis, voire encouragé, des comportements ignobles à l’égard des enfants !

Sur le web

 

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