La très nette victoire du parti de centre droit ÖVP et le fort recul du parti national-conservateur FPÖ pourraient paradoxalement compliquer les choses pour Sebastian Kurz. Le jeune chef de l’ÖVP, qui avait perdu un vote de défiance au parlement autrichien en mai dernier, après la sortie du FPÖ de son gouvernement, a été chargé lundi par le président Alexander Van der Bellen (Vert) de former un nouveau gouvernement. Aux élections anticipées du 29 septembre, l’ÖVP de Kurz a obtenu 37,5 % des voix, en progression de six points de pourcentage par rapport aux élections de 2017, et 71 sièges sur 183 au Conseil national, la chambre basse de l’Assemblée fédérale. Son partenaire au sein de la coalition gouvernementale qui dirigea l’Autriche de 2017 à mai 2019, le FPÖ, n’a obtenu que 16,2 % des voix, en recul de près de dix points, et 31 sièges. Ce sont donc les sociaux-démocrates du SPÖ qui sont arrivés deuxièmes malgré leur faible résultat : 21,2 % des voix, en recul de 5,6 points, et 40 sièges. Le deuxième vainqueur des élections, ce sont en réalité les Verts. Avec 13,8 % des voix, ils ont progressé de dix points et font leur entrée au Conseil national avec 26 sièges.
Ce qui a plombé les résultats du FPÖ, c’est une nouvelle affaire de dépenses abusives, sortie juste avant les élections, concernant son ancien leader Heinz-Christian Strache. La démission de ce dernier, à la suite de la vidéo à l’origine de l’affaire dite de l’Ibizagate, (voir Présent du 23 mai) sur laquelle on voyait Strache, alors qu’il n’était pas encore vice-chancelier, mener des négociations louches avec une fausse nièce d’oligarque russe, avait permis à Sebastian Kurz de saborder la coalition qu’il dirigeait en cherchant à reprendre au FPÖ le ministère de l’Intérieur dont le titulaire n’était pourtant pas impliqué dans l’Ibizagate. Mais Kurz semble propice aux retournements de veste puisqu’il avait déjà sabordé la grande coalition du centre droit et des sociaux-démocrates en 2017, alors qu’il était ministre des Affaires étrangères du gouvernement ÖVP-SPÖ.
Du coup, le nouveau leader du FPÖ, Norbert Hofer (celui qui avait failli remporter la dernière élection présidentielle face à Van der Bellen), a estimé que son parti devait se refaire une santé dans l’opposition et il a exclu pour le moment une nouvelle coalition avec l’ÖVP de Kurz. Ce dernier a donc pour le moment le choix entre un retour à la grande coalition ÖVP-SPÖ, sur le modèle de la coalition CDU-SPD en Allemagne, ou une coalition avec les Verts. Ceci à un moment où la pression migratoire s’accentue rapidement en Grèce et en Italie, et alors que Sebastian Kurz dit placer la lutte contre l’immigration illégale en Autriche et en Europe au centre de ses priorités. Or, pour les Verts comme pour le président autrichien, la priorité des priorités, c’est la lutte contre le changement climatique. Et aussi bien les Verts que le SPÖ n’envisagent une coalition avec le parti de Kurz si celui-ci n’effectue pas « un changement politique radical », y compris sur l’immigration. Mais c’est justement pour reprendre des électeurs au FPÖ que Kurz avait fait prendre à l’ÖVP un net virage à droite. Kurz sera-t-il le Sarkozy autrichien ? •
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