Des manifestants qui s'essoufflent, un mouvement qui faiblit, des actes qui peinent à rassembler... Depuis le début de la mobilisation, les Gilets jaunes n'ont pas toujours bénéficié de l'optimisme des observateurs, médiatiques ou politiques.
Pourtant, plus de cinq mois après son lancement, le mouvement est loin d'avoir disparu, malgré l'accumulation d'éléments dissuasifs à chaque rassemblement : risques physiques, coût des déplacements ou encore mises en garde de l'exécutif.
En dépit de ces freins à la mobilisation, à l'occasion de l'acte 23, entre autres marqué par des tensions à Paris et à Toulouse, des Gilets jaunes ont choisi de reprendre les actions locales, se positionnant notamment sur des ronds-points, lieux emblématiques de la genèse du mouvement. Dès le début de celui-ci, la mobilisation des ronds-points avait rapidement irrité le camp Macron, au sein duquel certains hauts responsables n'avaient pas hésité à faire appel à la manière forte. «Le combat, c'est fini», déclarait ainsi Richard Ferrand au mois de décembre 2018, réclamant l'intervention des forces de l'ordre sur les ronds-points.
Qu'à cela ne tienne, avec le début des beaux jours, des actions locales ont repris sous le soleil, comme en témoignent des publications de la presse quotidienne régionale ainsi que celles d'internautes sur les réseaux sociaux.
Ainsi, dans le département du Nord, des Gilets jaunes se sont par exemple rassemblés sur des ronds-points d'Avesnes-sur-Helpe ou encore de Leers. Dans cette dernière commune de 10 000 habitants, des citoyens vêtus de jaune s'étaient déjà réunis au rond-point de l'Egalité le 18 avril, en amont de l'acte 23, envisageant d’y revenir, chaque samedi soir, après les manifestations à Lille.
Les Gilets jaunes de retour sur « leur » rond-point. #Leershttps://t.co/2rwQzrQEispic.twitter.com/tMICwKV3Ul
— VDN Roubaix (@VDNRoubaix) 19 avril 2019
Toujours dans le nord de la France, à Glisy, dans la Somme, Le Courrier Picard rapporte qu'«une quarantaine de Gilets jaunes [...] étaient réunis ce samedi» sur l’un des ronds-points occupés pendant des semaines cet hiver. «Ce samedi, pendant que certains distribuaient des tracts aux automobilistes, d’autres, venus en famille, préparaient un barbecue révolutionnaire», décrit le quotidien régional.
Près d’une centaine de Gilets jaunes se sont retrouvés sur le rond-point de Rochefort-sur-Nenon dans le Jura, explique de son côté Le Progrès, qui décrit une ambiance joviale avec «barbecue, kermesse et musique».
A Montbéliard, dans le Doubs, plusieurs dizaines de Gilets jaunes se sont positionnés aux abords du principal rond-point de la zone commerciale du Pied des Gouttes.
#acte23 : les #GiletsJaunes toujours mobilisés à #Montbeliard dans le #Doubs. Une centaine d’entre eux bloquent le principal rond-point de la zone commerciale du Pied des Gouttes où se trouvent #Leclerc, #Decathlon#Intersport ou #Darty. @F3FrancheComtepic.twitter.com/kfh9LS7zIk
— Maxime Meuneveaux (@Maxmvx) 20 avril 2019
Après la destruction de leur cabane par les forces de l'ordre le 17 avril, des Gilets Jaunes de Clermont-Ferrand ont de nouveau réinvesti le rond-point du Brézet, «pacifiquement», précise France-Bleu Auvergne, qui a publié plusieurs photos et vidéos de cette action locale. L'une d'entre elles montre des Gilets Jaunes se regrouper autour du rond-point à l'arrivée de la police. «Les Gilets jaunes ont fait le tour du rond-point en marchant, avant d'effectuer une chaîne humaine», explique l'antenne locale de France Bleu.
Autour du rond-point les #GiletsJaunes font une chaîne humaine #ActesXXIII#Acte23pic.twitter.com/H12rw4V2Fu
— France Bleu Pays d'Auvergne (@FBAuvergne) 20 avril 2019
Dans le Morbihan, en Bretagne, des Gilets jaunes de Lorient ont réinvesti leur rond-point, comme en témoigne le syndicaliste Gérard Filoche, présent sur place. «Les Gilets jaunes c'est l'avenir, c'est la révolution» a-t-il tweeté.
Lorient une journée entière passée avec les gilets jaunes de Lorient, de 13 h à 16 h sur le rond point, à 17 h forum en ville, à 20 h 30 meeting débat. Quels passionnants échanges ! les gilets jaunes c'est l'avenir, c'est la révolution dont nous avons tous besoin pic.twitter.com/ltAlXsG8LX
— Gerard Filoche (@gerardfiloche) 20 avril 2019
«Le mouvement des Gilets jaunes du pays de Lorient a repris pied, le mercredi 17 avril 2019» rapportait Ouest-France quelques jours plus tôt.
En Loire-Atlantique, au nord de Nantes, à Orvault, des citoyens vêtus de jaune se sont relayés sur le rond-point du Croisy comme le rapporte le quotidien régional Presse Océan. «On ne lâchera pas, on n’a pas le choix. On informe les gens qui réagissent très bien. On est là pacifiquement», témoigne l'un des participants au rassemblement.
Non loin de Nantes toujours, des Gilets jaunes étaient présents au rond-point de Grandlieu. «Depuis des mois, les gens viennent nous rencontrer, on discute, et il y a un climat de confiance avec les gendarmes» témoigne Philippe, l'un d'entre-eux, comme le rapporte le quotidien régional.
À #Nantes, des gilets jaunes remontent une cabane près de l'aéroport https://t.co/xzG8N5vtMa via @presseocean
— DIRECTPO (@DIRECTPO) 20 avril 2019
Au sud-ouest de Toulouse, dans la Haute-Garonne, une action locale a été menée sur le rond-point d'Estancarbon, rassemblant quelques dizaines de Gilets jaunes au cours de la journée.
#GiletsJaunes#ActeXXIII#Acte23#StGaudens#estancarbon#Toulouse
Rond point d'Estancarbon à Saint-Gaudens pic.twitter.com/KVrPpgw3ge
— Neuilly (@Doriphoroi) 20 avril 2019
Ces actions locales, parmi d'autres, annoncent-elles le retour aux sources d'un mouvement né sur les ronds-points ?
En tout état de cause, si la succession des actes en ville a permis aux Gilets jaunes de maintenir la pression de «la rue» sur le gouvernement, les rassemblements ruraux apportent une image pacifiste à la mobilisation citoyenne, les médias se focalisant régulièrement sur les violences récurrentes qui émaillent les cortèges urbains.
Fabien Rives
Extrait de: Source et auteur
Il était évident, dès décembre dernier, que les manifestations urbaines étaient de véritables traquenards : d’une part parce que la police de Macron pouvait enfermer les manifestants dans des souricières afin de les frapper et en arrêter nombre afin de faire des exemples, d’autre part parce que les “ultra-gauches” (comprenez : des petits-bourgeois désœuvrés, nazillons trotskystes et staliniens) pouvaient infiltrer les foules et se livrer à des saccages destinés à déconsidérer le mouvement.
Le plus sage est bien de revenir sur les ronds-points, tout en organisant des blocages tactiques et stratégiques là où l’on peut le mieux gêner le gouvernement sans trop nuire à la population.
Quant à l’acte XXIII, il eût mieux valu laisser Paris tranquille durant cet unique samedi, après le drame de Notre-Dame. C’eût été une décision respectueuse d’un symbole national, un acte de foi, un geste de panache, quitte à redoubler d’ardeur pour l’acte XXIV, car même dirigé par des énergumènes sans foi ni loi, un peuple peut conserver le sens de l’honneur.