Correspondant permanent aux Etats-Unis. Depuis dix jours, le président Donald Trump ne décolère pas. Que ce soit au cours de ses « points de presse », à l’issue de ses très fréquentes allocutions, dans des conversations privées rapportées par des témoins ou dans des messages passés sur Twitter, il se montre déçu, ulcéré, indigné. Et affirme : « Le précédent gouvernement a infiltré et fait surveiller ma campagne électorale. Pour des raisons politiques. Pour que ma concurrente gagne. C’est indigne. C’est un scandale qui va plus loin que celui du Watergate. Imaginez un espion placé au cœur d’une lutte serrée par des gens et un parti appartenant au pouvoir en place. Et tout cela pour tenter d’obtenir un avantage, des gains électoraux. »
Trump a demandé que l’équipe – spécialement le ministère de la Justice et son bras armé, le FBI, la police fédérale – qui a gouverné le pays jusqu’au 19 janvier 2017 soit placée sous enquête officielle. Son porte-parole à la Maison Blanche a précisé : « Il faut que le peuple américain sache que son président est furieux parce qu’il a été traité d’une manière déloyale et illégale. »
Le geste a produit les secousses d’une bombe sur l’opinion. Il est, en effet, extrêmement rare qu’un président en exercice se voit obligé de demander des comptes à celui qui l’a précédé pour des raisons qui touchent à la dignité de la fonction : faire espionner un adversaire politique pour améliorer les chances de son « héritière » manque singulièrement d’élégance. Cependant, ce dérapage dans les bas-fonds nauséeux de la politique n’a étonné que ceux qui ont voté Hillary Clinton le 8 novembre 2016. Les autres – ceux qui ont choisi Trump ou Bernie Sanders, le frère ennemi d’Hillary – ont toujours su à quel type de personnage – fuyant, sournois, calculateur – appartenaient l’Américano-Kenyan et l’ex-secrétaire d’Etat. Ils n’ont été surpris ni par le genre d’accusations, ni par l’identité des suspects. De même qu’ils s’attendaient à l’éditorial que le New York Times proposa hier à ses lecteurs : « c’est une diversion, écrit-il, imaginée par Trump pour faire oublier que sa victoire est due à une intervention russe. »
Trois faits
Argument tellement énorme qu’il en est vide de sens. Voilà plus d’un an, que le procureur spécial, Robert Mueller, fouille tous les recoins de la campagne électorale de Trump sans rien trouver de significatif. Pas la moindre preuve décisive. Pas le moindre témoignage compromettant. En revanche, dans cette affaire d’infiltration et de surveillance, trois faits légitiment le courroux de Trump :
– James Clapper, directeur de la National Intelligence sous Obama, vient de reconnaître que l’intrusion d’officiels dans la campagne électorale de Trump pouvait être appelée de l’espionnage.
– Mark Meadows, l’un des ténors du parti républicain à la Chambre des représentants, a demandé que soit livré au public le nom de celui qui a ordonné cette intrusion. Remarquons en passant qu’il tient pour acquise ladite intrusion. – Adam Schiff, collègue du précédent mais dans le camp démocrate, n’a pu cacher sa gêne lorsqu’il donna la version de l’histoire vue de l’opposition. Il a admis l’existence d’une intrusion mais a discuté le terme d’espion qui lui paraît « inapproprié ».
Débat d’arrière-garde. L’essentiel est qu’il ait reconnu que quelqu’un avait été recruté pour suivre Trump et son équipe au moment où Hillary Clinton était en danger. Restent les preuves. Un ou plusieurs suspects confondus ou des aveux spectaculaires. Dans l’un ou l’autre cas, l’affaire dépasserait, comme Trump l’a remarqué, le scandale du Watergate.
Photo : Trump va demander des comptes à son prédécesseur.
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