«Notre travail? Fermer la route migratoire en Libye»

Défi humanitaire – Le nombre de nouveaux arrivants en Europe a baissé, mais en Libye la situation est alarmante.

Alors que les gardes-côtes libyens sont en train de repêcher des migrants risquant de se noyer, le bateau d’une ONG apparaît. Les migrants sautent, à nouveau, à l’eau pour tenter de rejoindre les humanitaires, qui, ils le savent, sont leur seule porte d’entrée en Europe. «Nous avons perdu des vies comme cela», se désole Ayub Ghassem, commandant de la marine libyenne, en montrant la vidéo du sauvetage. «Nous sommes obligés d’intervenir, rétorque l’employé d’une ONG. Car s’ils retournent sur le territoire libyen, les migrants feront à nouveau face aux mauvais traitements.»

Formés plus étroitement par l’Union européenne depuis quelques mois, les gardes-côtes libyens limitent les traversées de la Méditerranée. «Notre travail, c’est de fermer la route migratoire. Quand il y en a cent qui arrivent en Europe, il y en a mille qui entrent en Libye», se défend Ayub Ghassem, pointant l’absence de solution réelle: si les arrivées en Europe par la mer diminuent, les migrants passent toujours la frontière sud libyenne, si difficile à contrôler. D’ailleurs, les morts seraient bien plus nombreuses dans le désert que dans la Méditerranée, même si aucune statistique n’est possible.

L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) estime que 700 000 migrants se trouvent en Libye. Certains s’installent et travaillent, au moins pour quelques mois. D’autres veulent aller directement en Europe. Tous sont la proie des trafiquants, qui les kidnappent pour obtenir une rançon. Mercredi dernier, une centaine de migrants se sont enfuis d’un camp où ils étaient détenus et torturés par des trafiquants à Bani Walid, une ville de l’ouest du pays.[...]

Faciliter les visas

En 2017, l’OIM a rapatrié 19 370 migrants volontaires. En 2018, elle envisage d’atteindre les 30 000. Ces personnes, originaires d’Afrique subsaharienne ou du Bangladesh, se sont lancées dans l’aventure pour améliorer les conditions de vie de leur famille. Face aux difficultés en Libye – détention, traversée avortée de la Méditerranée – certains acceptent de rentrer chez eux et bénéficient d’un accompagnement de l’OIM pour se réintégrer professionnellement. Mais selon l’OIM, la moitié, au mieux, de ces migrants dits «économiques» désirent rentrer chez eux.

«Pour nous, c’est une option mais pas une solution», affirme Othman Belbeisi, chef de mission de l’OIM en Libye, qui préfère mettre en avant d’autres pistes. «Si les processus d’obtention de visa étaient facilités, les migrants hésiteraient à prendre un bateau. Ils envisageraient d’attendre des mois chez eux pour avoir la chance de partir légalement.»

L’augmentation des tensions et conflits dans le monde joue également un rôle dans cette crise. Plus de 50 000 réfugiés et demandeurs d’asile ont été enregistrés par le HCR en Libye. Impossible de proposer un retour au pays aux Syriens, Érythréens, Sud-Soudanais… 1342 personnes ont ainsi été évacuées par le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) depuis novembre et 5000 devraient l’être en 2018 grâce à un mécanisme de transit d’urgence mis en place en novembre.

L’Europe prise à partie

«Il consiste à envoyer les gens dans un pays tiers, le Niger. Leurs dossiers sont étudiés en vue d’une installation dans des pays qui ont offert généreusement de la place», détaille Roberto Mignone, chef de mission du HCR en Libye. Or le camp du Niger est déjà saturé, car les réinstallations dans des pays tiers sont lentes. À tel point que Niamey a montré son inquiétude en arrêtant, pendant quelques semaines en mars, les arrivées.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes: sur les 1342 personnes vulnérables évacuées, 1020 sont encore au Niger, alors que dans les pays européens on les compte plutôt en dizaines. À la mi-avril, à Tunis, Amin Awad, directeur du bureau du HCR au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, s’inquiétait: «Si la communauté internationale ne s’unit pas pour soutenir le pays et créer des passages légaux de réinstallation et d’admission, le Niger pourrait se sentir de moins en moins enclin à nous accueillir. Et alors que nous voulons étendre ce système à d’autres pays, nous avons vraiment besoin de réussir au Niger pour présenter un exemple positif.»


Au Niger, la Suisse trie ses migrants africains

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Source: 24 heures et Tribune de Genève

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