De notre correspondant en Amérique latine. Bolivie tout d’abord, où le président Evo Morales a fait une reculade spectaculaire devant les mouvements de grogne populaires (comme quoi, la mobilisation ça peut payer) en demandant aux deux chambres d’abroger son très répressif nouveau Code Pénal (Présent du 17 janvier). Chose faite devant le Congrès, après une séance houleuse de 11 heures qui s’est terminée à 3 heures du matin hier mercredi. Le Sénat devait valider la chose dans l’après-midi, on ne désobéit pas à Morales.
Avec cette mobilisation, Morales a senti le vent du boulet passer tout près de sa tête. Outre sa reculade, il multiplie les discours remplis de promesses économiques, il retoque son cabinet, il fait des sourires et ne parle pas des choses qui fâchent, comme sa candidature à la présidentielle alors qu’un référendum tenu en 2016 l’avait fermement rejetée. Et c’est bien là que se situe le problème de Morales, sa candidature est la pilule qui ne passe pas pour les Boliviens. Morales a constamment les mots « démocratie populaire » sur les lèvres, mais il refuse de jouer le jeu. Astucieux et connaissant bien son peuple, il sait que, dorénavant, il va devoir jouer serré. Les mouvements populaires, de leur côté, ont décidé de maintenir leurs actions destinées à paralyser le pays.
Maduro pressé
Pour l’autre figure du socialisme dur en Amérique latine, Nicolas Maduro, c’est une fois de plus une course contre la montre pour sauver sa peau, épreuve dont il est devenu un spécialiste. On le sait, le Venezuela c’est le pays du chaos, économique, social, politique… Et les choses empirent rapidement chaque jour en ce début d’année, les pillages sont devenus monnaie courante et, avec la fermeture de la municipalité de Caracas, les ordures ne sont plus ramassées, ce qui a donné lieu à la création d’un marché du recyclage des ordures alimentaires (ce sont les écolos qui vont être contents). Les choses pressent donc pour Maduro car, si nombre de Vénézuéliens aiment toujours bien sa figure de colosse souriant, ils pourraient finir par se lasser.
C’est pourquoi Maduro a décidé d’avancer la date des prochaines élections présidentielles prévues fin 2018 et de les tenir avant le 30 avril. Il compte aussi sur les faiblesses d’une opposition en complet désarroi et qui aura bien du mal à dénicher un candidat unique sérieux, ses trois figures de proue, Leopoldo Lopez, Henrique Capriles et Antonio Ledezma, ayant été respectivement emprisonné, interdit d’élection et contraint à l’exil.
Autre problème de temps pour Maduro, avec le massacre en direct d’Oscar Perez le 15 janvier dernier (Présent du 18 janvier) et de ses neuf compagnons, dont une femme enceinte, par pas moins de 500 membres des forces spéciales ! Au-delà du choc ressenti dans le pays par l’emploi d’une telle violence, ce sont bien des citoyens vénézuéliens protégés par l’Article 350 de la Constitution qui ont été assassinés en public par les forces gouvernementales, ce qui devrait enfin permettre une enquête dans les plus brefs délais de la Cour pénale internationale, pouvant conduire à un mandat d’arrêt international contre Maduro.
Pierre Barbey
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