Dominique de Villepin : «L’Europe et la Russie ont des intérêts communs»

post_thumb_default

 

Dominique de Villepin a été ministre des Affaires étrangères en France de 2002 à 2004, et Premier ministre de 2005 à 2007. Son discours du 14 février 2003 devant le Conseil de sécurité des Nations unies, par lequel il s'opposait à l'intervention américaine en Irak, est considéré comme un moment crucial de la diplomatie française contemporaine. Il a publié Mémoire de paix pour temps de guerre à l'automne 2016.

La Libye en 2011, le Mali et la Centrafrique en 2013, la Syrie en 2014... autant d'interventions militaires qui prouvent que «la France ne tire pas les leçons de l'Histoire», selon Dominique de Villepin. Il estime qu'elle a rompu avec «la vocation historique de médiation indépendante» qui était la sienne depuis la présidence du général de Gaulle, en renonçant à dialoguer avec tous les Etats et à porter une vision politique. «La France marginalise, isole et refuse le dialogue, notamment avec la Russie ou la Chine», déplore-t-il, estimant qu'elle suit en cela la tendance plus générale qui affecte toutes les démocraties occidentales qui «ont renoncé à faire de la politique».

«Nous devons parler à tout le monde»

«Je veux croire que Donald Trump est un homme de réalisme et de pragmatisme qui comprendra la nécessité de partager la gouvernance mondiale», affirme Dominique de Villepin, rappelant que Barack Obama, s'il a limité les interventions militaires américaines, n'a pas pour autant renoncé à «la politique de containment vis à vis de la Chine et de la Russie» – une erreur selon l'ancien Premier ministre, qui appelle de ses vœux «une Europe plus indépendante» et porteuse d’initiatives de dialogue. Evoquant la question de la sécurité internationale, il souligne que «l'Occident tend à oublier que le terrorisme frappe également la Russie, la Chine, l'Inde, la Turquie et en premier lieu les pays musulmans» : il y voit une raison supplémentaire de ne refuser de s'adresser à personne. 

Selon Dominique de Villepin, la nécessité du dialogue s'étend aujourd'hui jusqu'à l'intérieur de l'Europe elle-même, traversée par des crises qu'il ne juge «pas insolubles». Prenant l'exemple des négociations pourtant difficiles entre l'Union européenne et le Royaume-Uni après le Brexit, il affiche sa confiance : «Il y a une voie qui permet de prendre en compte les intérêts britanniques et européens.»

«Seules la Russie et l'Europe peuvent enrayer la crise ukrainienne»

La crise ukrainienne constitue une opportunité de coopération entre l'Union européenne et la Russie, selon Dominique de Villepin, qui souhaite dépasser les crispations entre les deux parties. «L'accord d'association entre l'Europe et l'Ukraine ne prenait pas en compte la Russie et constituait un jeu inégal», estime-t-il, tout en affirmant que «la poussée de l'OTAN vers l'Est a causé des tensions et des malentendus». Il considère désormais que toute discussion autour d'une éventuelle sortie de crise en Ukraine se doit d'impliquer la Russie ainsi que les autres partenaires régionaux : il évoque notamment «un grand accord économique eurasiatique incluant également le Kazakhstan, la Biélorussie, l'Ukraine...»

La situation de «faillite de l'Etat ukrainien» est pour Dominique de Villepin le signe que «seules la Russie et l'Europe peuvent enrailler la crise» qui déchire le pays : la recherche d'un accord satisfaisant doit donc prendre en compte les inquiétudes de tous les acteurs présents. Concernant le futur de l'Ukraine, Dominique de Villepin évoque la piste d'un «fédéralisme autonomiste» qui permettrait de mettre un terme au conflit qui sévit dans la région du Donbass depuis 2014. De manière plus générale, «l'Europe et la Russie ont des intérêts communs» sur de nombreux autres sujets selon Dominique de Villepin, qui cite notamment le dossier syrien : «Il n'y a pas de solution à la crise syrienne sans la Russie.»

«François Fillon peut constituer une chance pour la France, s'il sait s'adresser aux classes populaires»

Réagissant à la victoire de François Fillon à la primaire de la droite et du centre, Dominique de Villepin se montre élogieux à l'égard de son successeur à Matignon, avec lequel il n'a pourtant pas toujours entretenu de très bonnes relations. «François Fillon fait l'unité et croit en la politique», assure Dominique de Villepin, qui rejette les critiques formulées au programme économique du candidat, estimant qu'il porte «une politique intelligente et moderne des services publics».

Néanmoins, la perspective voir le Front national «capter l'électorat des classes populaires» n'est pas à exclure, d'après Dominique de Villepin, qui admet que l'enjeu pour François Fillon sera de parvenir à s'adresser aux Français les plus défavorisés. 

 

Extrait de: Source et auteur

Suisse shared items on The Old Reader (RSS)

3 commentaires

  1. Posté par Vautrin le

    Hum, hum…. “Un homme de courage et de droiture intellectuelle”… qui a déclaré en son temps que l’islam est une religion d’amour, de tolérance et de paix. No comment

  2. Posté par Théodore J Berseth le

    Un homme de courage et de droiture intellectuelle éliminé par le système et un certain Sarko !

  3. Posté par Vautrin le

    Tonnerre de Brest ! Villepin aurait-il enfin été touché par la Grâce ? Ou convoite-t-il un maroquin dans une administration Fillon ?

Et vous, qu'en pensez vous ?

Poster un commentaire

Votre commentaire est susceptible d'être modéré, nous vous prions d'être patients.

* Ces champs sont obligatoires

Avertissement! Seuls les commentaires signés par leurs auteurs sont admis, sauf exceptions demandées auprès des Observateurs.ch pour des raisons personnelles ou professionnelles. Les commentaires sont en principe modérés. Toutefois, étant donné le nombre très considérable et en progression fulgurante des commentaires (259'163 commentaires retenus et 79'280 articles publiés, chiffres au 1 décembre 2020), un travail de modération complet et exhaustif est totalement impensable. Notre site invite, par conséquent, les commentateurs à ne pas transgresser les règles élémentaires en vigueur et à se conformer à la loi afin d’éviter tout recours en justice. Le site n’est pas responsable de propos condamnables par la loi et fournira, en cas de demande et dans la mesure du possible, les éléments nécessaires à l’identification des auteurs faisant l’objet d’une procédure judiciaire. Les commentaires n’engagent que leurs auteurs. Le site se réserve, par ailleurs, le droit de supprimer tout commentaire qu’il repérerait comme anonyme et invite plus généralement les commentateurs à s’en tenir à des propos acceptables et non condamnables.

Entrez les deux mots ci-dessous (séparés par un espace). Si vous n'arrivez pas à lire les mots vous pouvez afficher une nouvelle image.