Mot éculé dans la bouche de journalistes moralisateurs, le terme de populiste est employé à tort et à travers pour catégoriser la pensée autorisée d'élites autoproclamées, face à un autre mode de pensée, forcément de moindre valeur, mais avec lequel il "faut bien vivre". Le terme de populiste, vous l'aurez remarqué, ne désigne jamais des populations mais toujours des meneurs, des politiciens, des tribuns mais aussi toute forme d'appartenance active à un groupe populaire.
L'élite, qu'elle soit intellectuelle, politique, financière, entrepreneuriale ou culturelle, considère le peuple comme une sous-catégorie intellectuelle aux comportements et choix peu responsables, de pauvres embrigadés, donc pas maîtres de leur propre système de valeurs. Outre les célèbres "je ne condamne pas les électeurs mais ceux qui les ont amenés à voter pour cette personne", il est une catégorie plus subtile mais aussi plus malhonnête de ce sectarisme des élites envers le peuple : Je veux parler des journalistes.
Une brillante démonstration a eu lieu cette semaine dans Le Temps. Outre l'acharnement déguisé contre ce qu'ils considèrent comme un illégitime (Oskar Freysinger), brillamment élu par un peuple ébloui, Le Temps manipule l'opinion en cachant l'information essentielle de toute cette affaire : le fameux Piero San Giorgio œuvrait depuis janvier dernier, soit 11 mois avant de se répandre en affirmations provocatrices et imbéciles sur "la faculté des peuples à se transformer en Waffen SS" (Sic.) Le Temps savait bien évidemment que ses ouailles n'iraient pas contrôler la véracité des faits, et qu'il y avait une très grosse probabilité que ceux qui le feraient, ne réaliseraient pas forcément que cette vidéo n'avait que dix jours. Le Temps sait parfaitement la faiblesse de la datation des événements sur les réseaux sociaux, certes dûment écrite, mais en tout petit, un peu comme sur les contrats mirobolants des vendeurs de bonnes affaires.
Le populisme est sans aucun doute le mauvais remède contre l'élitisme. Mais à ne plus distinguer les véritables élites, à force de voir des journalistes fantasmer à l'improbable mais tristement réelle schizophrénie du faiseur d'opinion, le peuple est en train de mettre en place ses réponses, Trump, Brexit, etc... Le Temps du "Nous nous excusons après de nos lecteurs" n'est pas venu, n'est pas le New-York Times qui veut. Il se pourrait bien que, pour paraphraser la célèbre formule populiste de leur publicité(1), un jour ou l'autre, Le Temps vous mettra en tort, avant de retrouver la raison.
Christian Addy, 4.12.2016
*1) Un jour ou l'autre, le Temps vous donnera raison
justement, la défaite de Matteo Renzi n’est pas le fait du populisme uniquement, lira-t’on dans le Temps de ce matin. Ouf! On est sauvé: les Italiens ne vont donc pas sombrer dans une coalition entre le parti 5 Star et la Ligue du Nord, comme tant craint par la presse bienséante!