Lorsque les assaillants surgissent dans l'église pour l'égorger, qu'est-il en train de faire, le Père Hamel ? Une chose toute simple : il est en train, au milieu d'un tout petit nombre d'amis, de dire une messe. Ils sont très peu, ils n'en constituent pas moins une "ecclésia" : c'est cela, l'Eglise, la communauté de quelques âmes, avant d'être un bâtiment.
La messe catholique n'est pas une réunion mondaine, ni une assemblée de notables. Elle est le rassemblement de quelques-uns, dont le point culminant s'appelle "Eucharistie", destiné à rappeler le sacrifice du Christ. Depuis deux mille ans, jour après jour, cette liturgie est accomplie.
Chacun d'entre nous est parfaitement libre - doit absolument l'être - de croire ou non, d'adhérer ou non, à cela.
L'attaque se déroule donc contre un homme au coeur de sa mission. Accomplissant l'acte le plus totalement central de sa vocation. Le tuer à ce moment-là, c'est faire de lui, au sens le plus puissant, un témoin. En grec, "témoin" se dit "marturos", un martyr.
Les assassins, dit-on, aspirent au martyre. En l'espèce, ils en créent un dans la personne de la victime. En plus d'être abominable, leur acte est un échec, conférant à la victime un statut qu'ils auraient voulu pour eux-mêmes. Beaucoup de gens, depuis avant-hier, en France et dans le monde, doivent penser à ces choses-là, toutes simples : qu'était-il en train de faire, le Père Hamel, que signifie ce sacrifice, ce rappel renouvelé depuis deux millénaires ? Que signifie ce sacrifice dans le sacrifice ?
La mort du Père Hamel rejoint toutes les morts d'attentats, et du reste toute mort humaine. Le témoin, le "martyr", ne se signale pas tant par l'exception de son expérience que par l'universalité vécue, incarnée. Il n'est pas au-dessus de nous, dans une Olympe, mais AVEC nous.
Les assassins du Père Hamel ont réveillé quelque chose de très fort. Qui commence à remuer une conscience enfouie de la spiritualité, en France et dans le monde. Par son sacrifice, ce témoin entre dans la lumière. Et nous éclaire.
A lui, à tous les autres, nos pensées, nos prières. Notre présence, simplement.
Pascal Décaillet, 28.7.2016
Et vous, qu'en pensez vous ?