Dans un exemple d'hypocrisie qui restera dans les annales, David Cameron plaidera pour le maintien de la Grande-Bretagne au sein de l'Union Européenne.
La tournée européenne du Premier Ministre britannique dans plusieurs capitales pendant quatre mois s'acheva en fin de semaine par un sommet européen qui devait sceller le futur de la relation entre le Royaume-Uni et les autres pays de l'UE, et à travers lui de nouvelles relations potentielles entre membres. Tout cela participait à sa grande stratégie de "changer le système de l'intérieur" et de ne conclure un accord "qu'en obtenant ce dont la Grande-Bretagne a besoin".
Auréolé d'une réputation d'âpre négociateur, il sortit victorieux d'un sommet de 30 heures en annonçant qu'il ferait désormais campagne "avec tout son cœur et toute son âme pour persuader le peuple britannique de rester dans l'Union européenne réformée".
L'Union européenne réformée? Un bien grand mot pour les concessions que M. Cameron parvint à obtenir. La presse anglaise ne fut d'ailleurs pas tendre avec les accords passés. «Maigre gruau», titra l'éditorialiste du Times. «Maigres gains» pour The Daily Telegraph. Le Daily Express posa carrément la question: «Tu appelles ça un accord, Dave?»
Au moins les Britanniques sont fixés sur la date du référendum. Celui-ci aura lieu le 23 juin. Mais s'il y a encore de nombreuses incertitudes - rappelons que les réformes obtenues par M. Cameron doivent encore être avalisées d'ici-là par tous les gouvernements des pays membres de l'UE - sur quelle "nouvelle relation" les citoyens vont-ils donc s'exprimer?
Les points de l'accord semblent varier autant que les sources qui en parlent, ce qui donne une idée du flou artistique entourant un texte composé à l'arraché pour tenter de sauver les meubles de l'Union. Quitte à piocher une source, voyons ce qu'en disait à chaud Le Matin:
Immigration - Cameron a obtenu une clause de sauvegarde de sept ans sur certaines aides sociales pour les nouveaux migrants, qui permet de limiter graduellement les versements. Les allocations familiales aux enfants de migrants ne résidant pas en Angleterre dépendront du niveau de vie du pays où ils vivent.
Cameron demandait un moratoire de quatre ans pour toutes les allocations sociales à destination des migrants européens candidats aux aides et logements sociaux, et l'arrêt du versement d'allocations familiales pour ceux dont les enfants ne sont pas en Angleterre. C'est donc un échec puisque non seulement la marge de manœuvre est bien plus faible, mais le mécanisme est limité aux sept prochaines années.
Le Carton Rouge - David Cameron a obtenu pour le Royaume-Uni une exemption qui permet d'utiliser un système de "carton rouge" pour opposer des vétos à Bruxelles. Le système doit être inscrit dans les traités en cas de remaniements de ceux-ci. Toutefois, le "carton rouge" sera compliqué à brandir : il est présent sous condition d'une alliance de 55% des votes alloués aux parlements nationaux. Cameron a indiqué qu'il prévoyait de prendre de nouvelles mesures pour protéger la souveraineté britannique.
Cameron demandait que les parlements nationaux puissent opposer un veto à toute législation européenne et ne semble même pas satisfait sur ce point-là. Les conditions associées à l'emploi de ce carton rouge le rendent totalement impraticables puisqu'il implique une majorité... On est donc complètement à l'opposé d'un système permettant à un pays isolé, ou même plusieurs pays en minorité, de se défendre.
Politique de la Zone Euro - David Cameron revendique avoir obtenu des protections pour la City contre toute discrimination des pays utilisant l'euro. Il a estimé que l'UE reconnaît "pour la première fois" avoir plusieurs monnaies. Toutefois, le vocabulaire du texte reste vague: les institutions de l'Union "faciliteront la coexistence entre plusieurs perspectives". Jean-Claude Juncker a insisté que l'accord n'accordait aucun veto à Londres en matière de décision.
Il fallait bien la menace d'un éclatement de l'UE pour qu'elle admette l'existence de plusieurs monnaies sur son sol... Mais Cameron n'a strictement rien obtenu au-delà d'une déclaration de principe juridiquement non contraignante.
Et c'est tout. Comparé à ses revendications initiales, la récolte s'avère bien faible. Pas de quotas d'immigration. Pas de retrait de l'objectif d'une Union "sans cesse plus étroite" du Traité de Rome de 1957. Pas de renforcement du marché unique par exemple dans le domaine numérique. Pas de possibilité de retour dans les parlements nationaux de compétences abandonnées à Bruxelles. Pas de réduction de la lourdeur administrative européenne.
Au bout du compte, et même si cela constitue un énorme effort de la part d'une Union Européenne sclérosée, ces modifications ne représentent pas grand-chose. Les titres de la presse anglaise sont peut-être acerbes, mais ils sont sincères. Malgré les déclarations hyperboliques d'un Premier Ministre satisfait, le peuple anglais reste sur sa faim. Ces réserves ne concernent pas que les simples citoyens. Nigel Farage, leader du parti UKIP qui taille des croupières aux Conservateurs depuis quelques années, qualifie l'accord de "pathétique" et on n'en attendait pas moins de lui. Mais la rébellion gronde largement jusque dans les rangs du Parti Conservateur. Pour l'instant, cinq Ministres et une Conseillère d’État se sont ainsi rangés en faveur du divorce. Dimanche soir, le célèbre maire de Londres, le conservateur Boris Johnson, annonça "qu'après une longue conversation avec lui-même" il plaiderait lui aussi pour quitter l'UE.
A ce stade l'issue de la partie est incertaine et les Bookmakers se frottent les mains. David Cameron n'aura pas la partie facile. Il devra faire face à forte opposition jusque dans ses propres rangs. Parviendra-t-il à faire rêver ses concitoyens en leur parlant d'Europe? Les effrayera-t-il en leur expliquant que ce continent en perdition, englué dans des crises toujours plus violentes, est l'unique planche de salut de l'économie anglaise? Quel public sera assez complaisant pour gober que l'accord arraché à Bruxelles le 19 février est exactement ce qu'il fallait à la Grande-Bretagne?
David Cameron aurait pu passer à la postérité pour être l'homme qui a démoli cette construction collectiviste antidémocratique qu'on appelle Union Européenne. Il aurait pu être, sur les traces de Margaret Thatcher, l'homme qui rendit sa fierté et son indépendance au Royaume-Uni. A la place, des calculs politiques piteux pour sa réélection de 2015 le font jouer perdant sur tous les tableaux.
Soit le Royaume-Uni quitte l'Europe et David Cameron clôturera sa carrière politique sur cet échec mortifiant, soit il y reste du bout des lèvres et David Cameron passera alors à la postérité comme un politicien sans saveur de plus, prétendant opposer une résistance farouche à l'Union Européenne mais s'accommodant du premier os qu'elle lui jette.
Stéphane Montabert - Sur le Web et sur Lesobservateurs.ch, le 22 février 2016
L’intimidation a commencé:
http://blogs.piie.com/realtime/?p=5423
Le digne héritier de Chamberlain.
Hélas, il n’y a pas, aujourd’hui en Grande-Bretagne, d’héritier de Churchill. Sauf peut-être Nigel Farage; le problème est que son parti, quoiqu’en progression, reste minoritaire.
Cela dit, ne perdons pas espoir. Notre monde n’est pas figé, et les mentalités non plus. Il va falloir attendre que les Britanniques se réveillent pour de bon, et alors là…
GBR :
http://www.dailymail.co.uk/news/article-3461862/Boris-Johnson-offered-job-David-Cameron-EU-poll-despite-thrashing-Commons.html
Le modèle politique et juridique anglais est trop diffèrent de la majorité des états du continent, Napoléon n’a pas pu y entrer. Une raison historique qui fait de l’Angleterre un cas à part. Il aurait fallu dès le départ en faire un partenaire est non un membre, et pourquoi pas revenir à cette option en lui faisant payer une cotisation proportionnel à ses bénéfices Economique avec l’union comme le Danemark.
Quand je vois ce qui se passe sur le GBP, je me dis qu’un Swisxit pourrait être la solution pour faire baisser le CHF.
Cher Monsieur Montabert. L’important pour nous Européens n’est pas de savoir ce que veut le peuple anglais vis à vis de ses relations passées, présentes et à venir envers l’U.E. mais de ce que veulent les peuples de l’Europe continentale en matière d’Union Européenne. Une union fédérale ou une union confédérale. La première que nous ont concoctées nos élites depuis le départ du Gal de Gaulle ne semble pas, mais alors pas du tout, conforme aux aspirations des jeunes européens que nous étions en 1960… On est loin du compte. Cette fausse union qui n’ est d’ailleurs reconnue comme entité étatique par aucune organisation internationale, est vide de toute substance intellectuelle, confessionnelle et démocratique qui aurait pu alors fédérer des volontés des concitoyens des nations de ces pays pour en faire une ‘patrie’ commune. Elle est morte née. Par ailleurs, si les six premiers pays qui composaient la CEE acceptaient un leadership franco-allemand dans la gestion de cette Europe là, ce n’est plus le cas aujourd’hui où justement de nombreux pays qui la composent se méfient comme de la peste de ce leadership. Alors, quoi ? Que la Grande Bretagne fasse cavalier seul ou bien continue de jouer au chat et à la souris avec cette curieuse Union, cela importe peu. C’est dépassé. On a voulu nous faire croire que l’ U.E. pourrait être un clone des USA, ce n’est pas le cas et ce ne sera jamais le cas. Même en continuant de faire entrer des millions d’étrangers auxquels la nationalité locale sera accordée afin qu’ils puissent faire pencher la balance du côté des sectes internationalistes, voir cosmopolites qui prennent leurs rêves pour des réalités, le souverainisme séculaire des nations de l’ Europe continentale reprendra toujours le dessus. Alors, que reste-t-il me direz vous ? La réponse est simple, soit la naissance d’une véritable confédération soit la naissance d’une nouvelle Europe qui se fera comme d’habitude dans le sang.
à Christian Pougnier
“il faut être fou pour demander son avis au peuple”
pourquoi donc ?
que voulez vous dire ?
de quel côté vous placez vous ??…………………….
les britanniques vont subir une intense propagande pour qu’ils votent “bien” !
la dramatisation va être à son comble. Les USA aussi vont mettre la pression pour que la G.B. reste dans l’UE.
le monde du fric se mobilise déjà, la Livre sterling est entrain de baisser. C’est si facile de manipuler la monnaie.
nous allons voir si les britanniques ont un peu de jugeote…………..
Excellent , tout à fait d’accord avec vous.
Je serai très surpris que les anglais disent oui à cet accord.
Avec ce que vit l’Europe actuellement,il faut être fou pour demander son avis au peuple.