Après l’attentat déjoué en France qui ciblait, dit-on, deux églises catholiques de Villejuif (Île de France), on apprend qu’un réseau islamiste projetait un attentat contre le Vatican. Etabli en Sardaigne, ce réseau a été démantelé ainsi que 18 personnes arrêtées, parmi lesquelles deux anciens gardes du corps d'Oussama Ben Laden, a annoncé la police italienne le 25 avril dernier.
Le responsable des services de renseignement à Cagliari en Sardaigne, Mario Carta, a indiqué qu'il n'y avait pour l'heure « aucune preuve », mais « une forte présomption » quant à un projet d'attentat contre l'Etat pontifical en 2010. Grâce à des écoutes téléphoniques, les enquêteurs ont pu s'intéresser sérieusement à ce projet d'attaque après avoir identifié des conversations mentionnant la « via della Conciliazione », la principale rue qui conduit au Vatican, ainsi que des propos « ironiques » tenus à l’encontre du pape. « Le jihad part d'Italie » affirme notamment l'un des suspects pendant une conversation enregistrée.
Accusées d'avoir pris part à des actions terroristes au Pakistan, les 18 personnes arrêtées appartiendraient à « une organisation dédiée aux activités criminelles transnationales s'inspirant d'Al-Qaïda et à d'autres factions radicales prônant la lutte armée contre l'Occident et l'insurrection contre l'actuel gouvernement du Pakistan ». D'après les enquêteurs italiens, le réseau « Tabligh Eddawa », dirigé par un imam résidant dans le nord de l'Italie, disposait « d'armes en abondance » ainsi que « de nombreux affiliés prêts à mener des actes terroristes au Pakistan et en Afghanistan, avant de se replier ensuite en Italie et dans d’autres pays européens ».
Ces différents éléments sont d’une extrême importance et devraient être traités comme tels par les services compétents sans forcément nourrir une médiatisation exponentielle et non maîtrisée. En effet, en Italie comme en France et ailleurs, les médias et autres chaines de télévision « continue » se sont rués sur ces informations. Les pouvoirs publics en ont fait aussi des tonnes sur l’évolution de la menace qui, après avoir ciblé les communautés juives, s’en prend maintenant aux Chrétiens. Les responsables catholiques interrogés ont heureusement bien réagi en tenant à peu près ce langage : « les Chrétiens ne sont pas menacés par les Musulmans et inversement… » Alors que plusieurs responsables politiques italiens et français déploraient l’impossibilité de surveiller l’ensemble des lieux de culte chrétien, les médias continuaient à en rajouter sur le « nouveau péril jihadiste »…
Certes, la menace existe et évolue de manières rhizomatique et plastique ! Mais faudrait-il aussi rappeler que les attentats islamistes ont fait et continuent à faire bien plus de victimes dans les pays musulmans qu’en Europe et plus largement en Occident. Depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, ce genre d’attaques a fait certainement moins de victimes - dans les pays occidentaux -, que celles des accidents de la route et de la drogue…
Que n’importe quel pouvoir exécutif communique sur la menace islamiste et les mesures à prendre en conséquence est une chose, mais qu’il en amplifie l’intensité pour gagner quelques points dans les indices de satisfaction ou pour dévier une attention légitimement monopolisée par la montée du chômage et de la pauvreté en est une autre… La communication politique, commerciale et associative a envahi notre quotidien, et ce le plus souvent, au détriment d’une hiérarchisation raisonnable des questions à traiter ; au détriment du contrat social ; au détriment de la citoyenneté et d’un patriotisme éclairé, sinon responsable…
Mais attention ! Car à trop vouloir crier au loup !... ne risque-t-on pas de tomber droit dans le piège tendu par les maîtres d’œuvre idéologique du terrorisme salafo-jihadiste. Leur stratégie peut être décomposée en trois phases : favoriser un amalgame spontané, ignorant et indifférencié entre une minorité de sectes radicales et l’ensemble des communautés musulmanes ; communautariser les problèmes sociaux, économiques et culturelles qui se posent à n’importe quel pays dans notre monde post-Guerre-froide globalisé et régit par une course effrénée à l’argent ; enfin, monter les communautés, sinon les confessions, les unes contre les autres afin d’affaiblir les Etat-nations, les appareils d’Etat et d’une manière générales les administrations publiques pour créer un climat de guerre civile généralisée… autrement dit pour fluidifier la circulation de la haine, de l’intolérance et du capital !
Obsédées par le calendrier de leurs réélections de plus en plus rapprochées, les responsables politiques des vieilles démocraties-témoins ne jouent-ils pas avec le feu ? En amplifiant les questions sécuritaires au détriment des dossiers de fond et du temps long (développement économique et durable, réchauffement de la planète, flux migratoires, lutte contre la pauvreté, etc.), nos pouvoirs publics ne se transforment-ils pas en alliés objectifs, sinon en agents propagandistes des architectes de la terreur ? Tout au contraire, ne devrait-on pas redécouvrir les vertus de la longue durée chère à l’historien de la Méditerranée Fernand Braudel ? Ne devrait-on pas privilégier la mise en chantier d’une hiérarchisation de nos défis communs sur la base de nos Lumières du XVIIIème siècle, sur la base de l’Islam des lumières, comme sur celles de toutes les pensées libératrices ?
C’est à Spinoza, l’auteur de l’Ethique exclu de la synagogue le 27 juillet 1656, que nous devons ce merveilleux constat : plus l’homme connaît les autres, plus il se connaît lui-même et plus il est joyeux…
Richard Labévière, 11 mai 2015
Il n’y a pas d’islam des lumières. Et tant que les musulmans penseront que la vérité appartient à Dieu et non aux hommes, que celle-ci est inscrite dans le coran, que cet ouvrage est la matérialisation de la parole divine, que de ce fait on ne peut en changer une seule virgule, ce qui crée un pouvoir strictement descendant, de type totalitaire, il n’y en aura pas.
S’enrichir de la connaissance des autres est une chose, se faire envahir par eux et à terme submerger en est une autre. L’histoire n’a jamais montré que deux populations adhérant à des projets de sociétés radicalement différents – et encore moins quand on a à faire à un suprématisme conquérant – puisse vivre en bonne intelligence sur le même sol. Cela fini toujours par la disparition de l’une ou des deux (par mélange).