Vers une interdiction de critiquer l’islam au Québec ?

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Le Premier ministre du Québec Philippe Couillard annonçait récemment la formation d'un groupe de représentants de la communauté musulmane pour «lutter contre la radicalisation des jeunes et la montée de l’islamophobie».

Dans le cadre de la lutte contre l'islamophobie, le président de la Commission des droits de la personne, Jacques Frémont, recommande d'ajouter à la Charte des droits et libertés de la personne une nouvelle disposition qui interdirait «l'incitation publique à la haine» visant les groupes protégés contre la discrimination. Or la critique de l'islam est assimilée à un «discours de haine» par les islamistes.

 

 

Lors d'une interview à Radio-Canada, Jacques Frémont a justifié la pertinence de limiter la liberté d'expression, en s'appuyant notamment sur les enseignements de la Cour suprême du Canada, sur une cause pendante devant la Cour suprême des États-Unis, et sur des recommandations de l'ONU:

Cette nouvelle disposition «permettrait à des personnes victimes notamment de propos et actes haineux de faire des plaintes, et éventuellement de recevoir des compensations, le cas échéant.

«Avec l'article 10.1 de la Charte, qui reconnaît le droit à l'égalité sans discrimination ou harcèlement, «il faut que le préjudice soit personnel et individualisé, c'est-à-dire qu'il faut qu'il y ait une victime qui arrive et qui démontre qu'elle été victime, qu'elle a été affectée, et qu'elle a droit à des dommages, et à ce moment-là l'article 10.1 sert à cette fin.

«Maintenant il est évident qu'avec la nouvelle disposition que nous proposons, lorsque par exemple il y a un site web qui déblatère, et qui a des propos, des incitations à la haine par rapport à certains groupes particuliers, pensons à des groupes musulmans, on a vu certains de ces sites, actuellement personne n'a l'intérêt suffisant pour se présenter chez nous et faire la demande. Avec la nouvelle disposition, à ce moment-là, il y aurait moyen pour nous d'enquêter (nous-mêmes, même si il n'y a pas personne qui se présente) et pour une personne qui, par exemple, si le site web vise les musulmans, et on a une personne québécoise francophone, la personne québécoise francophone pourrait se présenter et faire une plainte.»

La nouvelle disposition «vise de façon beaucoup plus générale l'incitation publique à la haine pour un motif interdit de discrimination. Donc on n'a pas besoin d'être une victime particularisée et de le démontrer.» 

«Ce qu'on propose, c'est un recours qui n'existe pas actuellement. Si on avait eu des plaintes par rapport à des sites web anti-musulmans, par exemple, (comme on en a eues), on doit les refuser dans la situation actuelle -- alors que désormais, si on avait cette disposition là, on pourrait les accepter et aller de l'avant.»

«Il est évident que ce que l'on propose, il faut que ça soit rattaché à la discrimination, au harcèlement et l'exploitation. Ce sont les trois critères.»

«Nous, on s'est inspirés d'une décision de la Cour suprême du Canada, parce que finalement, c'est la liberté d'expression qui est en cause. Et comme Commission des droits de la personne, la liberté d'expression c'est très important, donc il ne faut pas la restreindre outre mesure. Mais la Cour suprême nous enseigne que dans les cas de discrimination, de harcèlement ou d'exploitation, on peut aller de l'avant. C'est légitime et c'est légitime pour les provinces d'agir dans ce champ-là.»

«Il y a une recommandation de l’Assemblée générale des Nations unies, du Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’Homme, qui va exactement dans le même sens. Et d’après ce que je crois comprendre dans les dépêches dans les journaux, même la Cour suprême des États-Unis, actuellement au moment où on se parle, est prête à remettre en question de Premier Amendement lorsqu’on parle de discours haineux.

«Autrement dit, il y a un mouvement à travers le monde actuellement pour réagir, pour dire que les propos haineux de ce type ne sont pas acceptables dans quelque société que ce soit.

«C'est lorsqu'on a des propos généraux, des propos haineux généraux, de l'incitation à la haine, etc, où là il n'y a pas de victimes particularisées, c'est le groupe en général qui est victime -- c'est ça qu'on vise par cette disposition.»

 

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La décision de la Cour suprême du Canada

M. Frémont parle de l'affaire William Whatcott (jugement du 27 février 2013), un chrétien de Saskatchewan qui avait distribué des tracts dépréciant l'homosexualité, et qui a été condamné pour incitation à la haine des homosexuels.

Mario Roy en avait parlé dans un éditorial de La Presse publié en 2011, soit avant que la Cour suprême rende son jugement. M. Roy situait la poursuite contre Whatcott dans le contexte de la venue à Montréal, à l'invitation d'une association étudiante musulmane de l'Université Concordia, de prédicateurs musulmans connus pour prôner la criminalisation de l'homosexualité.

Si la Charte des droits est modifiée selon les termes décrits par M. Frémont, les homosexuels pourront se prévaloir des nouvelles dispositions à l'encontre de ce type de prédicateurs et de ceux qui les invitent (associations étudiantes, mosquées, etc.).

 

Cause pendante devant la Cour suprême des États-Unis

La cause à laquelle faisait référence M. Frémont est l'affaire Anthony Elonis, décrite par Radio-Canada: 

Lundi, la Cour suprême des États-Unis a entendu les arguments des deux parties dans le dossier d'Anthony Elonis, un résidant de la Pennsylvanie qui a été reconnu coupable d'avoir menacé de mort son ex-épouse.

L'homme avait notamment affiché, sur Facebook, un « poème » particulièrement violent à l'endroit de son ancienne femme. « Il y a une manière de t'aimer, mais des milliers de te tuer », écrivait-il. Il ajoutait ensuite qu'il ne trouverait le sommeil qu'après avoir dépecé son corps.

Si la majorité des messages virulents mis en ligne par M. Elonis s'adressaient à son ex-femme, d'autres visaient une policière du FBI venue l'interroger, les installations d'un parc d'attractions qui l'avait licencié, ou encore des écoles primaires qu'il menaçait de « la fusillade la plus haineuse jamais imaginée ».

La Cour suprême doit donc maintenant déterminer si ces publications de M. Elonis sont protégées par le premier amendement de la Constitution américaine, qui garantit le droit à la liberté d'expression.

 

Recommandation de l'ONU

 

Lorsque M. Frémont parle d'une recommandation du Haut Commissaire des Nations-Unies aux Droits de l'Homme allant dans le sens d'une limite à la liberté d'expression, il fait référence au Processus d'Istanbul, qui n'est rien d'autre que la suite des efforts continus de l'Organisation de la coopération islamique (OCI) depuis plus de dix ans, en vue de faire interdire le «dénigrement des religions» en droit international. Il s'agit d'une version moderne du délit de blasphème.

Dans son analyse Le «Processus d'Istanbul», un processus pervers, Nina Shea rend compte de la conférence qui s'est déroulée à Washington avec l'OCI dans le but de mettre en œuvre des résolutions de l'ONU qui, sous prétexte de combattre «l'intolérance religieuse», menacent de conduire à la répression de toute critique de l'islam. La réunion de Washington avait été planifiée à Istanbul, d'où le nom «Processus d'Istanbul». 

 

Rivalités sectaires au sein de l'islam

La modification proposée à la Charte des droits pourrait également être utilisée par des musulmans sectaires. A titre d'exemple, au Royaume-Uni, la chaîne satellitaire Fadak TV fondée par un chiite shiraziste anti-khomeiniste, et qui promeut la liberté de critiquer les religions, fait l'objet d'une enquête des autorités réglementaires anglaises pour «propagande haineuse» suite à des plaintes de sunnites et de Khomeinistes.

 

Au fédéral, Ottawa songe à criminaliser la glorification d'actes terroristes.

Selon La Presse:

Le ministre fédéral de la Justice, Peter MacKay, songe à faire adopter une loi qui rendrait criminel le fait d'applaudir à un acte terroriste.

La loi au Royaume-Uni s'attaque à «l'encouragement du terrorisme». Cet «encouragement» direct ou indirect est illégal. Une personne coupable de ce crime peut écoper jusqu'à sept ans d'emprisonnement.

Les groupes de défense des libertés civiles, au Royaume-Uni, s'en sont inquiétés.

 

Les initiatives en vue de limiter la liberté d'expression sont inquiétantes. Les islamistes cherchent à faire reculer les libertés en Occident, et en particuler la liberté d'expression, fondement de la démocratie. Quand un gouvernement prône la censure, il leur fait une dangereuse concession. En fait, on pourrait presque dire qu'il encourage le terrorisme, puisqu'à la suite de deux attentats... Québec veut limiter la critique de l'islam! Or si on ne peut pas critiquer l'islam, c'est qu'on vit déjà sous la charia. C'est quoi le message? Le message, c'est que le terrorisme, c'est efficace: ça fait reculer la liberté d'expression et avancer la charia. 

Si Ottawa renonce à son projet de punir l'apologie du terrorisme, on risque de se retrouver avec une situation absurde: l'apologie du terrorisme sera légale, mais la critique de l'islam dont se réclament les terroristes sera illégale. 

Le fédéral avait une disposition similaire à celle que propose la Commission des droits, à savoir l'article 13 de la Loi canadienne sur les droits de la personne qui donnait à la Commission canadienne des droits, des pouvoirs d'enquête sur les «discours de haine» en ligne. Ottawa a abrogé cet article, qui était utilisé de manière abusive. Ces abus sont expliqués dans un éditorial du National Post et un article de Lorne Gunter du Edmonton Sun

 

Lire aussi :

Dossier : Organisation de la Coopération islamique (OCI)

Le "Processus d'Istanbul", un processus pervers

USA : le "Processus d'Istanbul" est une bien mauvaise idée

USA : Département d'État contre Liberté d'expression

L'OCI relance ses efforts en vue de la criminalisation du dénigrement des religions

L'Union Internationale Humaniste et Éthique contre les lois sur le "dénigrement des religions"

GB : Un Cheikh chiite shiraziste plaide pour le droit de critiquer l'islam

Canada : la commission des droits perd ses pouvoirs de censure

Canada : un projet de loi vise l'abolition des pouvoirs de censure de la commission des droits 

 

 

 

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