Si l’ignorance d’un sujet traité et les raisonnements contradictoires tuaient, alors le Conseil fédéral serait en danger de mort.
Mais soyons charitable ! Admettons que les conseillers fédéraux savent lire mais n’en ont pas le temps et que c’est seulement leur administration qui ne sait pas lire.
Si l’ignorance d’un sujet traité et les raisonnements contradictoires tuaient, alors le Conseil fédéral serait en danger de mort. En effet, le communiqué du Conseil fédéral du 9 avril dernier relatif à l’initiative populaire contre la sexualisation à l’école maternelle et à l’école primaire montre d’une part que les membres du Conseil fédéral n’ont pas lu le texte – c’est d’ailleurs souvent le cas avant un communiqué – on se rappelle un communiqué relatif à l’adoption des couples de même sexe qui était bourré d’erreurs et de contradictions (voir Le Temps du 6 janvier 2014 , « Adoption : dans les brouillards du Conseil fédéral »), d’autre part que les auteurs de ces communiqués n’ont pas peur des contradictions.
Le Conseil fédéral propose de rejeter l’initiative contre la sexualisation à l’école maternelle et à l’école primaire pour les motifs suivants :
1) « Le cours d’éducation sexuelle doit rester une compétence cantonale. »
2) « L’initiative va à l’encontre de la pratique actuelle en vigueur à l’école primaire en empêchant la réalisation du mandat de formation public, lequel impose l’enseignement des bases relatives à la sexualité à des fins de prévention dans le domaine de la santé ».
3) « Le Conseil fédéral entend maintenir la répartition actuelle des compétences…. D’après le droit en vigueur, les parents sont les premiers responsables de l’éducation sexuelle des enfants et des adolescents. L’école soutient les parents par le biais de cours d’éducation sexuelle … ces cours sont intégrés au domaine disciplinaire « la nature, l’être humain et la société. Il n’y a pas de branche d’éducation sexuelle à proprement parler et il n’y en aura pas à l’avenir non plus. Cet enseignement a fait ses preuves et fait partie intégrante des plans d’études cantonaux des écoles depuis de nombreuses années ».
4) « L’éducation parentale et l’enseignement de l’éducation sexuelle sont incontournables pour une prévention efficace des agressions sexuelles, des maladies sexuellement transmissibles et des grossesses non désirées… Accepter cette initiative populaire reviendrait à empêcher la prévention. »
A :- Les contradictions des arguments du Conseil fédéral
- Si le cours d’éducation sexuelle est bien une compétence cantonale et doit le rester – idée qui nous enchante personnellement ! -, alors comment expliquer qu’il y ait, selon le communiqué, un « mandat de formation public lequel impose l’enseignement des bases relatives à la sexualité » ? Ce mandat de formation public est apparemment fédéral. Où est la compétence cantonale ?
- Si l’éducation sexuelle obéit à l’obligation de « l’enseignement des bases relatives à la sexualité à des fins de prévention dans le domaine de la santé », et qu’il est en particulier « incontournable pour une prévention efficace des agressions sexuelles, des maladies sexuellement transmissibles et des grossesses non désirées.. . », peut-on affirmer que ces domaines, qui relèvent tous clairement du droit fédéral, sont réellement de la compétence cantonale ? On sait que l’Office fédéral de la santé est notamment chargé de la lutte contre le sida, maladie sexuellement transmissible, prétexte à toutes les dérives fédérales en matière d’éducation sexuelle.
- Si le cours d’éducation sexuelle relève bien de la compétence cantonale, comment le Conseil fédéral peut-il affirmer : « il n’y a pas de branche d’éducation sexuelle et il n’y en aura pas à l’avenir non plus » ? Lit-il à livre ouvert dans les consciences des 26 cantons ? Ou entend-il interdire à ceux-ci à l’avenir, d’exercer leur compétence ?
B. :L’ignorance crasse, par les conseillers fédéraux, du contenu de l’initiative.
- Si les conseillers fédéraux avaient lu le texte de l’initiative, ils auraient vu que celle-ci autorise des cours facultatifs d’éducation sexuelle dès 9 ans révolus, donc en primaire, et ils n’auraient pas écrit, dans leur communiqué qu’ « elle va à l’encontre de la pratique actuelle en vigueur à l’école primaire », où précisément ces cours sont donnés actuellement, en général dès 9 ans révolus et restent facultatifs.
- Si les conseillers fédéraux avaient lu le texte de l’initiative, ils auraient vu que celle-ci affirme que les parents sont responsables de l’éducation sexuelle, l’école les soutenant par des cours facultatifs et que l’initiative est donc en parfaite harmonie (et non pas en contradiction !) avec « le droit en vigueur, d’après lequel les parents sont les premiers responsables de l’éducation sexuelle des enfants et des adolescents ».
- Si les conseillers fédéraux avaient lu le texte de l’initiative ils auraient vu que celle-ci prévoit « un cours destiné à la prévention des abus sexuels envers les enfants et pouvant être dispensé à partir de l’école maternelle » et ils n’auraient jamais osé écrire dans leur communiqué que « accepter cette initiative populaire reviendrait à empêcher la prévention ».
- Si les conseillers fédéraux avaient lu le texte de l’initiative, ils auraient vu que cette dernière a le courage d’élever la question de la sexualité de l’enfant au rang de droit fondamental de l’enfant ; ils auraient donc vu que l’initiative qu’ils rejettent d’un communiqué méprisant ne se contente pas seulement de protéger le « bien-être » de l’enfant – idéal prétendument défendu par le Conseil fédéral quand il rejette l’initiative – mais, ce qui est beaucoup mieux, qu’elle veut protéger la personnalité de l’enfant, donc la reconnaissance de son droit au respect de sa qualité d’être humain.
Mais soyons charitable ! Admettons que les conseillers fédéraux savent lire mais n’en ont pas le temps et que c’est seulement leur administration qui ne sait pas lire.
Suzette Sandoz, 12 avril 2014
Excepté les mots argent et rendement on peut d’ores et déjà se demander si au niveau communal d’autres n’imitent pas la Berne Fédérale.Mais peut-être qu’à Strasbourg les mots n’ont pas la même raisonnance qu’en Suisse ,allez savoir