Du capitole à la roche tarpéienne, de la Place Beauvau à l’Elysée, il n’y a qu’un pas. Manuel Valls a sans doute pensé suivre Sarkozy sur le second itinéraire, mais il a en fait pris le premier. Le chouchou a chuté dans les sondages. L’explication en est simple. Il bénéficiait à droite d’un courant de sympathie pour tenir le discours ferme du Premier Flic de France. Mais il a révélé quatre faiblesses. La première appartient à la technique de communication. Sarkozy est un débatteur redoutable qui a rarement été dominé par ses contradicteurs, si ce n’est lors de la célèbre anaphore de Hollande. On se demande encore ce qui l’a retenu de faire un bon mot sur l’anticipation aventureuse et sur le narcissisme de la formule « Moâ président »… Philippot a éclaté Valls sur France 2. Devant le calme et la modestie de son opposant, Valls affichait un visage ulcéré qu’on lui voit souvent maintenant. Manque de technique, manque de maîtrise de soi, ça ne pardonne pas. « Le meilleur imprésario de Dieudonné », devenu incapable d’écouter son adversaire, assénait les poncifs de la gauche sur le Front National qui, l’un après l’autre tombaient dans le vide.
Mais le débat avait touché juste sur la seconde faiblesse, le sectarisme d’un Ministre de l’Intérieur adversaire de la liberté d’expression, notamment sur Internet. La provocation éhontée des forces de l’ordre à l’issue de la manifestation du « Jour de Colère », empêchant les manifestants de se disperser dans le calme, pour générer des incidents et procéder à 250 interpellations afin de pouvoir brandir le spectre d’une extrême-droite factieuse, a également montré ce visage du manipulateur partisan quand beaucoup de Français avaient cru voir en lui le seul Ministre républicain attaché à sa mission. Quatre interpellations seulement après l’action des casseurs d’extrême-gauche à Rennes ont dévoilé la manoeuvre d’un Ministre qui souhaite diaboliser l’extrême-droite, et par amalgame jeter le soupçon sur l’ensemble de la droite qui manifeste. L’acharnement contre Dieudonné et les décisions inespérées et ultra-rapides du Conseil d’Etat ont soulevé le discrédit sur un homme de pouvoir manipulateur et intolérant. Pendant sa gesticulation politicienne, les chiffres de la délinquance tombaient et ils n’étaient pas bons.
Troisième reproche : les résultats sont mauvais. Certes, il faut les prendre avec circonspection. Les manipulations existent. La main courante allège le dépôt de plaintes. Le glissement des faits d’un mois sur l’autre, leur dénomination permettent d’édulcorer le bilan. Le changement de logiciel empêche les comparaisons. Néanmoins, l’Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales a souligné l’augmentation des cambriolages de 6,4% en zone urbaine, et de 4, 7% en zone rurale. Les résidences secondaires ont été privilégiées avec une croissance de 17,7% en zone gendarmerie. Les homicides volontaires sont moins nombreux, sauf à la campagne où ils ont progressé de 14,9%. On parle de stagnation de la violence parce que son développement se ralentit. On oublie que la délinquance, contrairement à l’inflation, par exemple, n’a pas un potentiel de volume illimité. Elle agit sur une population limitée et il faut considérer toute croissance comme un échec. Les vols avec violence sont apparemment en recul, mais les autres augmentent. Leur lien avec l’immigration de l’est de l’Europe avait été établi par le Ministre lui-même, lorsqu’il était sérieux. Entre sa politique d’immigration, d’intégration, et de naturalisations qui dément son discours apparemment ferme et le laxisme pénitentiaire de Mme Taubira, la délinquance a de beaux jours devant elle et les Français le savent. M. Valls veut 100 000 naturalisations par an, ce qui diminuera le nombre des étrangers sur le territoire et pourra donner l’illusion d’un ralentissement de l’immigration. Un clandestin ou un détenteur de CDD peut à nouveau être naturalisé. Ce n’est ni en récompensant l’illégalité, ni en favorisant la précarité qu’on diminuera la surdélinquance étrangère ( 13% de condamnations pour 6% de la population). Pour faciliter l’intégration, la feuille de route gouvernementale exige que les Français de coeur plus que de papier abandonnent d’encombrantes marques d’identité nationale auxquelles ils sont bêtement attachés. Voilà de quoi les rassurer.
Enfin, M. Valls, a pris la grosse tête. Lorgnant sans doute sur Matignon, il a commencé à écraser les plates-bandes de ses collègues, en faisant des annonces intempestives. Il a oublié qu’il agaçait déjà à gauche et que l’estime de la droite n’avait rien de profond. Les Français peuvent tolérer la présomption lorsqu’elle est suivie d’une certaine efficacité, comme Sarkozy en donnait au moins l’illusion. « Grand causeux, petit faiseux », ils n’aiment pas et le font payer au coupable. Or c’est ainsi que M. Valls est désormais perçu.
Christian Vanneste, 20 février 2014
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