Défense de l’identité (II)

Christian Vanneste
Président du RPF, député honoraire

 

La notion d’identité est inséparable de la liberté et de la démocratie. Elle fonde, contrairement à ce que la gauche essaie de faire croire, notre système de valeurs. Comme l’a très bien montré Tocqueville, la priorité accordée à l’égalité dans l’évolution démocratique engendre une menace sur les libertés. Les prétendues « avancées » de l’égalité et de la « démocratie » sociale et sociétale constituent une menace pour la démocratie politique fondée sur la libre volonté des citoyens suffisamment indépendants du pouvoir pour faire de celui-ci l’expression de la volonté générale. Les Suisses ne sont pas obsédés par l’égalité sociale, mais ils ont une égale liberté de choisir ce que la Suisse doit faire, lorsqu’ils participent aux référendums régulièrement organisés. Le 9 Février, ils auront à se prononcer sur l’immigration. Les Français n’osent même pas en rêver.  La France ressemble de plus en plus au « nouveau despotisme » décrit dans « la Démocratie en Amérique »: « une foule innombrables d’hommes semblables et égaux qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs… Au dessus…un pouvoir immense et tutélaire qui se charge seul d’assurer leur jouissance ». La confusion généralisée entre les sexes, les cultures, le citoyen et l’étranger efface les identités tandis que la dépense publique asphyxie le corps social et que les libertés fondamentales de penser, de s’exprimer, de circuler, d’enseigner sont écornées jour après jour. La liberté responsable laisse la place à la licence qui est son adversaire le plus sournois. « L’impulsion du seul appétit est esclavage, l’obéissance à la loi que l’on s’est prescrite est liberté » écrivait Rousseau, plus genevois que jamais.

La vraie démocratie repose sur la liberté de personnes capables de faire des choix rationnels à chaque niveau de subsidiarité, de la commune à l’Etat en sachant s’abstraire de toute préoccupation individualiste ou  communautaire pour ne retenir que l’intérêt général ou, mieux, le Bien Commun. Ces personnes ne peuvent être des individus égoïstes, ni des « ego » sartriens, détachés de tout et capables du pire. Inscrits dans une famille, dans une nation, ils doivent pouvoir adhérer à la formule de  Montesquieu : « si je savais quelque chose utile à ma famille et qui ne le fût pas à ma patrie, je chercherais à l’oublier Si je savais quelque chose utile à ma patrie, et qui fût préjudiciable à l’Europe, ou bien utile à l’Europe et préjudiciable au genre humain, je le regarderais comme un crime. » Le citoyen, héritier de traditions, acteur de projets, obéissant raisonnablement aux « pattern » de comportements indispensables à la vie sociale, ce que les maniaques de la gomme appellent des « stéréotypes », est vraiment libre car il sait à chaque instant ce que son passé et son avenir lui commandent de faire. Seules des nations formées de ces citoyens responsables sont également libres de conduire leur destin, si elles demeurent souveraines, et non soumises à des oligarchies technocratiques.

Aux deux niveaux, de l’individu comme de l’Etat, l’identité fonde la liberté, parce qu’elle dessine les limites, celle de la personne qui s’accepte et s’affirme pour ce qu’elle est, celle de l’Etat à l’intérieur de ses frontières. La liberté de l’homme ne peut être sans limite, fondée sur la transgression des traditions ou de la nature. La liberté d’une Nation, de même, a besoin de frontières qui garantissent son autonomie comme celle de ses voisins. Jean-Louis de Lolme disait que le Parlement britannique pouvait tout faire, sauf changer une femme en homme. La folie actuelle envisage que des lois puissent autoriser de satisfaire le fantasme du changement de sexe. Mais on ne sait plus très bien quel parlement le décidera, ni qui il représentera, ni à quel groupe de pression il sera soumis. La démesure, l’Hybris des Grecs, détruit la liberté par les deux bouts : en bas, l’individu déresponsabilisé, ivre de droits et ignorant de ses devoirs, la tyrannie en haut exercée par une caste agrippée au pouvoir et à ses privilèges, démagogue et dénuée de courage. La perte de l’identité, celle de la personne, celle de la nation,  dissout le lien entre un citoyen structuré et une démocratie nationale forte : à la place de la première, règne l’individu qui « s’éclate » en émotions, en pulsions justificatives, en besoins immédiats ; la disparition du sentiment d’appartenance à la seconde fait s’évaporer le patriotisme dans d’absurdes engagements dans des idéologies du lointain.

La liberté et la démocratie ne sont pas des abstractions. Ce sont des réalités vécues au quotidien, et qui ne peuvent l’être que par des acteurs en chair et en os, qui affirment ce qu’ils sont, comme ils reconnaissent l’identité des autres, ce qui est le plus sûr moyen de la réciprocité et de l’échange.

Christian Vanneste, 31 janvier 2014

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