Comprendre l’Holocauste pour comprendre le vingtième siècle

Jan Marejko
Philosophe, écrivain, journaliste

Dans notre contexte culturel de nivellement et de narcissisme, les occasions d’admirer, sont rares. Lundi 21 octobre, un sujet d’admiration nous a été donné. La conférence de Timothy Snyder à la toute nouvelle Maison de la paix à Genève. Titre de son exposé : « The Holocaust as a Global History ».

Titre surprenant quand on a lu son livre, lui aussi admirable, « Terres de sang ».[i] Cet ouvrage, en effet, décrit toutes les horreurs qui se sont produites en Europe entre 1933 et 1945, horreurs dont Auschwitz est certes un exemple, mais aussi un aspect ou un pic seulement. Dès lors, comment l’Holocauste pourrait-il constituer une histoire globale ?

 

D’emblée, Timothy Snyder s’est montré conscient de cette contradiction. L’a-t-il vraiment expliquée ? Difficile de répondre, tant son exposé était riche. Une chose s’est toutefois dégagée. Nous ne devons surtout pas banaliser Hitler en faisant de lui une sorte de grand méchant loup dans une bande dessinée. Il avait une vision du monde, s’appuyait sur des considérations de géopolitique, mettait clairement en avant une politique raciale. Pour comprendre ce qui s’est passé sur notre pauvre continent, il ne suffit donc pas de vouer Hitler aux gémonies. Il faut encore saisir ce qui l’animait. C’est ici que nous trouvons une réponse possible à la contradiction relevée plus haut. L’Holocauste est un élément dans le déluge de sang et de larmes de la Deuxième guerre mondiale, mais c’est aussi un symbole qui ne doit pas susciter une diabolisation mais une compréhension, démarche qui, comme n’a cessé de le rappeler Raymond Aron, n’a rien à voir avec une justification.

 

Hitler a été le catalyseur d’idées qui flottaient dans l’air de son époque, celle de racisme, bien sûr, mais aussi celle du « Lebensraum », celle de l’importance de l’agriculture. Il avait une vision du monde et il importe de comprendre cette vision dont l’un des fondements concerne la science moderne. Pour Hitler, elle était ce qui donne accès au réel, et il citait Galilée comme référence. Voilà qui donne à penser. Un autre aspect de cette vision est l’importance qu’a eue, aux yeux de Hitler, la colonisation de l’Amérique et l’extermination de nombreuses tribus d’Indiens d’Amérique du Nord au-delà du Mississipi. A ses yeux, la Volga allait jouer le même rôle pour les Allemands.

 

Reste la question de savoir pourquoi, exactement, Hitler a été un catalyseur. Timothy Snyder a évoqué le « deuxième livre » de Hitler après « Mein Kampf ». Je dois avouer que je n’en avais pas connaissance, pas plus que mes amis à qui j’en ai parlé. La réponse à cette question s’y trouve peut-être en partie.

Jan Marejko, 27 octobre 2013

 



[i] J’ai publié un compte rendu de cet ouvrage dans la revue genevoise Choisir du 30 mai 2013

Un commentaire

  1. Posté par RIVAT Caroline le

    A la question que pose M. Jan Marejko: “..pourquoi, exactement, Hitler a été un catalyseur.” A cette question, je répondrais qu’il nous faut nous replonger dans nos livres d’histoire et nous souvenir du schéma politico-économique Mondial qui a précédé la seconde guerre. D’abord, il y a eu la crise économique et le crash boursier de 1929 qui ont engendré chômage et appauvrissement dans les populations Américaines puis Européennes. L’Homme a besoin de coupables pour expliquer et supporter sa condition. L’histoire l’a démontré. De plus “ON” le conforte dans cette idée. C’est ce qu’à fait Hitler. Opportuniste, ce petit caporal Autrichien dans l’armée Allemande lors de 1ère guerre mondiale, est arrivé à point nommé et a su manipuler les Allemands afin d’assouvir sa soif de pouvoir.

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