Après que la pensée de Bourdieu eut déstabilisé l’école de la République pour en chasser les “héritiers” de la “culture bourgeoise”, Thomas Piketty veut déstabiliser notre système successoral et substituer l’impôt révolutionnaire à l’impôt républicain. À cinquante ans d’intervalle, la cible est toujours la même ; les familles et ce qu’elles ont à transmettre.
À cinquante ans d’intervalle, le sociologue et le jeune économiste se retrouvent pour stigmatiser les familles et ce qu’elles ont à transmettre.
Le sociologue Pierre Bourdieu était convaincu d’avoir débusqué le diable caché qui tirait les ficelles d’une société française faussement méritocratique. Ce démon avait un visage, celui de la “reproduction sociale”, et un agent redoutable, l’école de la République. Dans les Héritiers,publiés en 1964, le chercheur accusait le système scolaire de venir légitimer des savoirs qui, en réalité, ne devaient rien aux mérites des élèves mais tout à leur origine sociale. En réservant l’Université à des enfants de cadres et d’enseignants, l’école se contentait de reproduire des hiérarchies sociales uniquement fondées sur la détention d’un capital culturel familial. Les enfants de milieux modestes, qui avaient réussi par leurs seuls mérites, n’étaient en réalité que des « oblats », vendus au système scolaire en échange de leur promotion sociale comme autrefois certains enfants pauvres se voyaient offerts par leurs parents à l’Église. Depuis un demi-siècle, tous les étudiants en sciences politiques ânonnent ces principes comme autant de sourates d’un texte sacré. C’est en son nom que l’on a créé le collège unique, ouvert le baccalauréat à 80 % d’une classe d’âge et fait la chasse aux humanités réputées bourgeoises. On connaît aujourd’hui le résultat de cette brillante politique. Les théories de Bourdieu appliquées à l’école française ont eu à peu près le même effet que celles de Mao sur l’économie chinoise, la famine en moins.
Devant un tel échec, il était permis d’espérer que ce pays n’irait plus chercher dans la pensée marxisante les outils conceptuels de son avenir. C’était compter sans Thomas Piketty, jeune économiste qui, dans son dernier ouvrage, le Capital au XXIe siècle, dénonce la nouvelle accumulation du capital économique aux mains de quelques-uns et appelle de ses voeux une révolution fiscale qui viendrait rétablir l’égalité. Après que le siècle dernier eut été marqué par une formidable décrue des fortunes privées, la concentration des richesses, en France comme ailleurs, serait en train de retrouver son niveau du XIXe siècle. L’Ancien Régime serait devant nous !
On objectera bien sûr que c’est à deux guerres mondiales apocalyptiques et à des révolutions particulièrement sanglantes en Russie comme en Chine que le XXe siècle doit cet “appauvrissement” des plus riches au seul profit de systèmes étatiques souvent totalitaires. En vain, car l’intelligentsia française, qui n’entend rien à l’économie, frétille déjà et encense le nouveau prophète.
Après que la pensée de Bourdieu eut déstabilisé l’école de la République pour en chasser les “héritiers” de la “culture bourgeoise”, Thomas Piketty veut déstabiliser notre système successoral et substituer l’impôt révolutionnaire à l’impôt républicain. À cinquante ans d’intervalle, la cible est toujours la même ; les familles et ce qu’elles ont à transmettre.
Source : Camille Pascal, Valeurs Actuelles, 23 septembre
C’est encore “un grand bond en avant” du socialisme à visage français; de grand bond en grand bon les marxisants lasseront leur dernières recrues; si encore aucun de ces fameux grands bonds n’avait fait de victimes! Hélas ! Elles sont toujours plus nombreuses les vies écrabouillées au nom des lendemains radieux; il a donc fallu attendre un Thomas Piketty pour constater que les échecs ne rebutent jamais les marxistes-léninistes, toujours à croire et à dire “ça n’a pas marché jusqu’ici, mais la prochaine fois, c’est sûr, ça doit marcher”, on ne sait d’ailleurs au nom de quoi. C’est bien Ernest Renan qui disait déjà “…un des grands avantages du socialisme, c’est de ne jamais se corriger de ses erreurs..” Donc, avec ce Thomas Piketty on est bien repartis pour un tour de manège sanglant, comme devant! A le lire, ce Piketty, il vous vient la même phrase que disait Voltaire:” C’est du galithomas”