L’asile ou le cimetière des illusions

Yvan Perrin
Ancien Conseiller national
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Au risque de chagriner les bonnes âmes, force est de constater que les mesurettes proposées çà et là ne constituent que de vaines manœuvres dilatoires mettant clairement en évidence la lâcheté du monde politique sur le dossier et son incapacité à faire ce qu’il faut

Il y a quelques mois de cela, nous avions eu l'occasion ici-même de dire tout le bien que nous pensions de la merveilleuse idée née dans la tête de la Conseillère d'Etat genevoise Isabel Rochat, illumination que nous avions surnommée la prime au crime. Souvenez-vous, il était question de verser de l'argent aux Maghrébins multirécidivistes qui accepteraient de nous débarrasser de leur encombrante présence, principe étonnant qui revenait à payer les délinquants alors que les requérants respectueux de notre ordre juridique restaient les mains vides. Naturellement, nos modestes remarques déclenchèrent un tsunami réprobateur, les partisans de cette curiosité mettant en avant le caractère pragmatique et efficace de la chose, la réelle prise en compte de tous les aspects du problème et la recherche de solutions praticables, bref tout le contraire de ce que fait un parti populiste bien connu qui a le mauvais goût d'être le premier de Suisse.

Service après-vente

Aujourd'hui, c'est Pierre Maudet qui assure le service après-vente avec une étonnante discrétion. Aucun bilan chiffré quant au nombre de bénéficiaires, probable modification de ce plan en vue d'un traitement dans le cadre d'une politique migratoire globale, en clair, échec sur toute la ligne.

Observateur attentif comme l'avait confirmé le Conseiller d'Etat de l'époque Jean Studer, le canton de Neuchâtel ne va donc sans doute pas se lancer lui aussi dans le sponsoring du crime vagabond mais reste tout-de-même un concurrent redoutable pour la lanterne rouge du classement en matière d'asile. La barre est désormais placée très haut avec l'expulsion définitive de huit requérants résidant au centre d'accueil de Perreux près de Boudry.

Retour à la nature

Après avoir durablement et parfois violemment perturbé la quiétude des lieux, ces fauteurs de troubles ont été jetés dans la nature, livrés à eux-mêmes sans moyens d'existence légaux. Naturellement, ces individus n'ont eu d'autre recours que de commettre divers délits au préjudice de la population neuchâteloise qui goûte modérément à cette présence turbulente.
Dans un canton à la pointe au niveau de l'intégration, qui dispose même d'un service ad hoc dit de la cohésion multiculturelle, pareille violation des principes constitutionnels fédéraux et cantonaux ne peut que surprendre. En renvoyant ces personnes, l'administration contrevient en effet aux articles 12 de la Constitution fédérale et 13 de la Constitution cantonale neuchâteloise qui prévoient que quiconque, sans restriction, a droit en résumé à un toit, une soupe et l'assistance médicale de base. Appelé à la rescousse, le Procureur général du canton Pierre Aubert a évoqué une nuance juridique audacieuse, à savoir l'application de la Constitution proportionnée aux circonstances.

N'en déplaise à ce distingué juriste, il ne fait aucun doute que cette décision sera cassée dès qu'un avocat aura fait recours, ce qui vaudra une nouvelle fois au canton de Neuchâtel de faire la une à son détriment. Les tristes héros de ce fait divers seront alors réintégrés dans le centre auréolés de leur victoire sur les autorités.

On ne saurait tolérer plus longtemps pareille situation. La seule solution efficace consiste à interner dans des centres fermés ces requérants qui viennent en Suisse "avec d'autres ambitions que d'obtenir la protection de notre pays" comme le relève la directrice de Perreux avec un remarquable sens de l'euphémisme. Au risque de chagriner les bonnes âmes, force est de constater que les mesurettes proposées çà et là ne constituent que de vaines manœuvres dilatoires mettant clairement en évidence la lâcheté du monde politique sur le dossier et son incapacité à faire ce qu'il faut. On pourrait s'en gausser s'il n'appartenait pas à la population d'en faire les frais.

Yvan Perrin

Un commentaire

  1. Posté par Gil Favre le

    Bonsoir Monsieur Perrin,
    Comme vous abordez le sujet de l’asile, que pensez-vous de la proposition de votre collègue ?
    http://www.parlament.ch/f/suche/pages/geschaefte.aspx?gesch_id=20123718
    Je me suis déjà exprimé sur ce sujet et n’y reviendrai pas :
    http://www.lesobservateurs.ch/societe/le-cas-cvetkovic

    Cela étant, l’UDC a voulu un débat pour enlever la qualité de réfugié aux déserteurs (alors que la désertion n’est pas en soi un motif d’asile, au contraire de la sanction démesurée qui peut frapper une telle personne (Erythrée)).. mais là, votre parti fait vraiment fort. Vous demandez carrément à la Suisse d’octroyer l’asile à toutes les minorités du Kosovo … où ai-je mal compris ce qu’implique sa proposition ?

    Sinon, si vous voulez une mesure efficace pour accélérer les procédures. Il suffirait de modifier l’art. 14 de la loi sur l’asile pour que le délai de 5 ans pour une régularisation ne soit pas compté dès l’entrée en Suisse de la personne concernée, mais à partir de la clôture de sa dernière procédure (qu’elle soit ordinaire ou extraordinaire). Il n’y aurait ainsi plus aucun motif à déposer des demandes de réexamen/révision/etc puique la personne concernée retarderait ses chances d’obtenir une régularisation humanitaire… Les tribunaux seraient en outre invités à accélérer le traitement des demandes, puisqu’il n’y aurait rien à gagner humainement à laisser pourrir un dossier. Enfin, cette mesure rétablirait une certaine égalité de traitement avec les clandestins qui doivent vivre sans aucune aide de l’état pendant ces 5 ans, tandis que les requérants d’asile en procédure bénéficient de tout le soutien de l’Etat et peuvent dès lors proposer des dossiers avec le concours de professionnels. 🙂

    Mais peut-être que cette mesure “simple” serait trop efficace ?

Et vous, qu'en pensez vous ?

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