V pour Vendetta, chaque génération a ses icônes résistantes, ou V pour Victor, son prénom d'emprunt dans l'interview qu'il a donnée au Matin, l'étudiant de 28 ans est lui-même dépassé par le succès de sa page Facebook, qui avoisine les 1'500 adhérents. Interview.

Lesobs: Etes-vous un fâcheux, un râleur, un quérulent, cherchez-vous à faire la morale aux autorités, comment justifiez-vous, en fin de compte votre démarche ?

V: (Sourire) je ne suis pas une personne comme vous le décrivez. Je suis un jeune homme qui voit les choses mal tourner et qui aimerait pouvoir aider. Ma démarche est simple, loin des politiques et de leurs futiles disputes de pouvoir, je souhaite simplement être en paix chez moi. Il y a un sentiment d'insécurité qui monte en puissance et il faut que cela cesse! Alors je fais ce que chaque citoyen est en droit de faire, je montre ma fatigue et je rassemble les gens qui partagent mon point de vue.

Votre initiative est-elle le constat d'un sentiment généralisé d'une population lâchée par ses élites politiques ?

Je pense pouvoir affirmer que oui. Il y a un fossé énorme entre la population et les élites politiques. Nous (citoyens) voulons une chose simple, la sécurité chez nous, la paix et la tranquillité pour nos enfants. Eux, d'après moi, sont plus en quête de pouvoir et de satisfaction personnelle et ils ont peur de se mouiller. Il faut juste avoir du bon sens remarquer les problèmes de nos villes.

Votre interview donnée au Matin du 25 septembre commence par une profession de foi anti-raciste. Que penser d'une société qui doit d'abord se justifier de vouloir combattre la criminalité.

C'est triste! Si vous ne précisez pas vos intentions, vous êtes catalogué et l'étiquette que l'on vous a collée ternit votre objectif, aussi louable soit-il.

Dans cette-même interview, vous semblez encore tout attendre de la police, mais votre démarche ne consacre-t-elle pas l'évidence d'une incapacité des forces de police à réagir ?

Oui ma démarche en est effectivement la cause, mais il ne faut pas oublier que nos agents de police sont comme nous. Ils en ont ras-le-bol de ne rien pouvoir faire. A présent il ne sert à rien de révolutionner le système, il faut faire avec ce que l'on a. Les policiers font du bon boulot et je pense qu'avec un peu plus de droits en leurs faveurs, les choses changeraient.

Pensez-vous qu'il y ait encore une volonté politique de combattre la criminalité ?

Je l'espère bien! La seule chose qui nous manque, ce sont des personnes qui seraient d'accord de se mouiller. Ca ferait avancer le Schmilblick.

Que pensez-vous de la réduction de peine relative à la consommation de cannabis. Est-on sur le bon chemin ?

Je pense que oui. Il faudra un jour ou l'autre que l'on règle la chose. Je ne suis pas un consommateur mais pourquoi ne pas envisager des endroits, bars, cafés, où il serait possible d'en trouver et d'en consommer. Avec des restrictions, bien évidement, pas dans la rue, dans les endroits publics. C'est un sujet où nous pouvons apprendre beaucoup de nos voisins européens, comme les Anglais qui ont de très bon moyens de communication envers la population.

Se chauffer la bile entre internautes, est-ce vraiment la solution ? Vous récoltez un matériel précieux, qu'allez-vous en faire ?

Chauffer la bile. J'aime votre façon de voir la chose. Nous sommes en Suisse et les gens partagent leurs avis sur la question. Ce n'est peut-être pas la bonne solution mais au moins les avis s’échangent. Il y aura toujours des points de vue divergents, et heureusement. Les personnes qui parlent le font à visage découvert et ceci est la preuve qu'ils savent ce qu'ils font et je les encourage à continuer ainsi.

Pensez-vous que la population puisse concrètement agir pour réduire la criminalité ?

Evidemment, sinon je n'aurais jamais créé des pages dans un réseau social. Une fois unis, nous sommes capables de faire n'importe quoi. Une voix n'est pas grand-chose, mais accompagnée d'autres, elle se fait entendre et commence à déranger.

L'Etat, à terme, laissera-t-il agir la population ? Ne pensez-vous pas que certaines tendances cherchent à entretenir sciemment un climat de dépendance sécuritaire ?

Voulez-vous que l'on finisse comme dans certains états américains avec des armes sur les citoyens ? Pour ma part, je ne veux pas! L'état a un rôle à jouer et il doit s'y mettre encore plus sérieusement. Pourquoi ne pas couper dans un budget comme, par exemple, l'armée, pour aider les cantons dans leur sécurité ?

Avez-vous été menacé depuis la création de votre page Facebook ? Quelles ont été les réactions ?

Oui j'ai été menacé. Ceci me fait peur mais prouve qu'il y a des gens que je dérange, alors je vais continuer.

Qu'attendez-vous concrètement de votre initiative ?

Je voudrais que d'autres me suivent, que d'autres pages soient créées et que les choses changent. Des groupes vont fleurir au Tessin, en Suisse Alémanique et, j'espère aussi, ailleurs.