Evénement unique, mais une fois médiatisé, il est porté à la connaissance de centaines de milliers de personnes, révoltées, scandalisées, surtout de la part de nationaux, eux-mêmes dans la difficulté.
Le dimanche 24 juillet le quotidien Blick annonce en première page qu’une femme a reçu le congé pour son appartement que lui louait la commune de Berneck dans le canton de Saint-Gall.
La presse romande commencera à relayer l’information le mardi suivant (plus généralement: n’est–il pas surprenant de constater que la presse alémanique du dimanche dicte souvent l’agenda médiatique de la presse romande de la semaine qui suit?)
Raison donnée par la commune à la locataire: nous voulons y loger des requérants d’asile!
Ce "fait divers est certes inhabituel, rare, mais ceux qui procèdent ainsi semblent ne pas se rendre compte de l’impact d’une telle décision.
Evénement unique, mais une fois médiatisé, il est porté à la connaissance de centaines de milliers de personnes, révoltées, scandalisées, surtout de la part de nationaux, eux-mêmes dans la difficulté.
Qu’est-ce au juste qu’un événement? Certains responsables politiques ne semblent pas le savoir. Une telle décision n’est pas un fait particulier comme un autre. Il y a une grande différence entre une décision courante et une décision comme celle dont il est question resituée dans son contexte, avec son effet sur le public, sa réception, suite à sa médiatisation.
Rappelons qu’il y a quelques années encore un tel fait n’aurait même pas été médiatisé à cause de la bien-pensance ambiante, qui voit un danger immédiat de racisme dans la publicisation d’une telle décision.
Une telle décision devient un révélateur privilégié plus général; elle devient également un événement crisologique. Une crise a le pouvoir de révéler des dimensions non visibles en temps normal. Une crise, de même qu’un phénomène « pathologique », permet un diagnostic; la crise dérange la réalité et c’est par ce dérangement qu’elle va révéler des aspects invisibles, implicites.
La révélation publique et médiatique de cette décision de licenciement va perturber, déclencher et réveiller un ensemble d’autres phénomènes. Elle fait apparaître la protestation, la révolte contre des réalités inadmissibles pour beaucoup et auxquels peut conduire un phénomène comme celui des requérants d’asile, en l’occurrence. En langage courant, c’est la goutte qui fait déborder le vase.
Cet exemple montre ensuite comment la non maîtrise du phénomène des demandeurs d’asile peut engendrer des tensions politiques sérieuses, voire modifier des rapports de force politiques plus généraux, en ce sens qu’une telle expulsion paraît à certains tellement inacceptable qu’ils ne font plus confiance aux autorités en place et cherchent réponse auprès de discours, de mouvements et de partis politiques qui se servent de ce genre d’exemples pour justifier ce qu’une grande partie de la population souhaite à la suite de tels événements: une politique plus ferme, déterminée, voire expéditive.
Un tel événement entraîne une levée des inhibitions, des contraintes, des virtualités étouffées jusque-là. Il peut même engendrer des phénomènes d’emballements collectifs, qui une fois enclenchés peuvent devenir ingérables.
Un tel événement montre à quel point nombre d’autorités semblent ne pas se rendre compte du degré de gravité sociale et politique atteint par le problème de l’arrivée massive de personnes cherchant par tous les moyens à s’installer en Suisse, sans y avoir aucun droit pour la plupart.
La situation est pourtant soluble mais l’opposition à une intervention déterminée, au nom d’un sentiment de culpabilité, du politiquement correct ou encore de principes idéologiques travestis en principes humanitaires, empêche sa résolution. Malgré les tensions créées dans la population, les fronts se durcissent et chaque camp accuse, voire diabolise l’autre, ne se rendant pas compte à quoi peut conduire cet affrontement de principe, non seulement stérile mais responsable d’un emballement collectif potentiellement très dangereux.
Voilà à quoi il faudrait aussi penser à partir de ce qui est pour certains un simple «fait divers» mais qui pour d’autres, sans doute la majorité de la population, n‘a plus rien à voir avec un fait divers puisque ce dernier est devenu emblématique et révélateur de phénomènes plus généraux, et considérés par beaucoup comme totalement inacceptables et révoltants.
Le pire serait la répétition de ce genre de «faits divers» qui n’en sont plus depuis longtemps.
Le fait divers, perçu et analysé comme Evénement révélateur plus général, comporte encore une dimension crisologique. Et qui dit crise dit différentes possibilités de résolution: le statu quo( on ne réagit pas, mais dans ce cas les choses s’aggravent), la progression (on profite de la crise engendrée pour résoudre le problème à la racine et non au moyen d’ un emplâtre sur une jambe de bois) et enfin la régression( la plus dangereuse, avec exacerbation des tensions et conflits).
C’est cette dernière solution qu’il faudrait à tout prix éviter mais je dois bien avouer un certain scepticisme…
Annalyse très pertinente Dominique, vous devriez voir comment ca se passe chez nous en Gruyères, avant c’était tradition, bon vivre, mobilité et paysage magnifique… Mnt c’est plutôt bétonnage à outrance car faut bien les loger ces requérants et ces immigrés, par contre les prix ne sont bien évidemment pas accessible à la classe moyenne, vous pensez bien à environ 2000 le 3pcs/demi et bien sûr pas subventionné pour nous autres Suisses… Et que dire des balades dans nos villes et villages….. A vous dégouter: on ne se sent plus chez soit nul part, c’est presque nous les étrangers dans notre pays. et si par malheur on ose dire ceci tout haut tout fort, hop direct dans le panier des xénophobe inculte et bêtes….. TRISTE
Excellent commentaire Dominique Bianchi. Tout est dit, il n’y a plus d’obstacle à l’appât du gain, autrement dit jusqu’au faut-il aller au nom de l’économie ? Qu’est prêt à sacrifier au nom d’un plein emploi fictif et d’une croissance continue ? On pourrait parler d’une métaphore de la légende de Midas.
La pénurie de logement dans l’arc Lémanique provoque une hausse exponentielle des loyers, poussant une population autochtone à s’exiler dans des banlieues ou des campagnes bétonnées afin d’être remplacée par des employés venus de toute l’Europe engagés par les multinationales qui s’installent dans notre pays avec leurs cadres. Qu’ils vienne du bas avec l’immigration économique du tiers monde ou par le haut avec une immigration aisée attirée par les avantages fiscaux et salariaux, une population de remplacement issue de l’étranger est en train d’évacuer la classe moyenne et les suisses de modestes conditions hors de leurs villes. Cette exil forcé est mené par la droite affairiste d’un côté et par une gauche engluée dans des sentiments humanistes de façade de l’autre. Quoi qu’il en soit, les suisses ont le sentiment de subir une politique qui tend à les faire remplacer par “l’autre”, qu’il soit en guenille ou en costume Hugo Boss. Cette population autochtone méprisée se retrouvera fatalement au côté des immigrés les plus pauvres pour engager et soutenir des luttes sociales afin de lutter contre un ennemi commun: Ce libéralisme inhumain et calculateur qui les aura parqués à la périphérie étouffante d’une certaine Suisse qu’ils regarderont de loin.