Industrialisation et subventions à la sauce socialiste: l’exemple du solaire

Bruno Pellaud
Bruno Pellaud
Physicien
post_thumb_default

En Suisse, en quelques semaines, la presse nous prédit la sortie du solaire de Von Roll, Oerlikon, Flexcell et d’autres encore. La cause, on la connaît…

En Allemagne, la société de panneaux solaires Q-Cells tombe en faillite, une de plus. Les 9000 francs que j'y avais investis voilà cinq ans ont fondu comme neige au soleil. En Suisse, en quelques semaines, la presse nous prédit la sortie du solaire de Von Roll, Oerlikon, Flexcell et d'autres encore.  La cause, on la connaît; même le Téléjournal du 29 mars l'avoue: ce sont ces panneaux chinois vendus à vil prix, au dumping forcé, fabriqués dans des conditions de travail et d'impact écologique dignes du socialisme soviétique. Même notre École Polytechnique de Lausanne touche des subventions pour couvrir ses toits de panneaux chinois, alors qu'elle abrite sous ces toits des projets prometteurs de panneaux helvétiques à technologie avancée. Quelle ironie, Monsieur Patrick Aebischer! C'est bien le "faire-savoir" médiatique, encore faudrait-il se battre pour protéger le "savoir-faire" de ses propres laboratoires.

Fabriqués en Chine

Dans tout cela, le parti socialiste suisse fait une nouvelle fois preuve de son incurabilité profonde à formuler une politique économique cohérente. Monsieur Christian Levrat monte sur  les barricades pour dénoncer la "désindustrialisation" de la Suisse. Il condamne ces industriels et ces PME qui font fabriquer ailleurs les produits développés aux portes de nos écoles supérieures. Oui, en Chine ou ailleurs en Asie du Sud-Ouest. Des décisions "désespérément conservatrices" dit-il. Il demande une augmentation du taux plancher de l'euro pour rendre plus compétitif le coût du travail en Suisse. En fait, il souhaite que l'État intervienne et en quelque sorte subventionne la fabrication de produits suisses en Suisse.

Une autre étoile de ce Parti socialiste, Roger Nordmann, monte lui sur ses grands chevaux pour exiger la levée du plafond adopté par la Confédération pour le subventionnement des panneaux solaires. Ces panneaux chinois sont installés à tour de bras par les membres charpentiers-monteurs de Swisssolar, association dont il est président et lobbyiste en chef, une fonction qu'il exerce avec brio puisque le marché solaire se calculera bientôt en milliards de francs. Il désapprouve vertement les propos de Madame Leuthard qui n'envisage une part de 20% de solaire dans la production d'électricité suisse qu'en 2050, alors que lui la veut pour 2020 -  sans se demander si ses camarades de Swissolar pourraient suivre le rythme pour passer en huit ans du modeste niveau actuel de 0,2% à celui de 20%.

Les mauvais choix de la Confédération

Au Téléjournal, le patron d'une PME romande annonçait son abandon du solaire en expliquant que tant la Confédération que les milieux pro-solaires privilégient la "surface vendue" plutôt que la "promotion technologique". Évidemment, ces panneaux chinois installés à la hâte, c'est facile et les bénéfices s'engrangent tout de suite. A l'inverse, les grandes écoles, universités et PME qui développent de la valeur ajoutée, qui tentent de fabriquer leur savoir-faire en Suisse pour renforcer l'industrialisation de notre pays doivent mendier les centimes d'un budget fédéral de la recherche remis en question chaque année.

Alors à quand, un grand débat rouge-rouge à Infrarouge entre Messieurs Levrat et Nordmann sur le maintien des places de travail dans une économie industrielle moderne par le biais du marché, par des encouragements à la recherche ou par des subventions sans limites de produits étrangers. On pourrait aussi y inviter Pierre Veya, qui dans le Temps du 30 mars s'indigne du droit des nouvelles centrales nucléaires américaines à passer un éventuel surcoût aux consommateurs, mais qui en tant que rédacteur en chef d'un journal à "vocation économique", reste très indifférent au tonneau des Danaïdes que représente le marché de panneaux solaires chinois subventionné par les consommateurs d'électricité de ce pays. Que ces trois en décousent!

Plus sérieusement. Quand Madame Doris Leuthard va-t-elle intervenir, elle qui se plaignait il y a quelques jours que la production de panneaux solaires suisses restait insuffisante? Et Patrick Aebischer pour défendre ses plates-bandes, et ces radicaux, que l'on dit amis de l'économie réelle? Une refonte du système fédéral de subventionnement s'avère impérative, dans l'intérêt de nos places de travail à haute valeur ajoutée, et une valeur exportable, il va sans dire.

 

 

3 commentaires

  1. Posté par Pierre Cretegny le

    Dire que les politiciens sont des incapables est une banalité. Une règle simple devrait être appliquée par les citoyens : s’interdire d’élire des avocats et des juristes et n’élire que citoyens qui ont fait leurs preuves dans leur métier.
    D’autre part je croirais à l’égalité homme-femme quand il y aura égalité homme-femme dans la création d’entreprise.

  2. Posté par Daniel Paul le

    De quand date le dernier grand succès industriel conçu par des Socialistes ou des Verts ?
    Je n’en vois guère….
    En Suisse, le programme d’encouragement aux énergies renouvelables (RPC)est d’abord profitable à l’Etat. En effet, ce programme est financé par une surtaxe du prix du Kwh payé par tout consommateur d’électricité. Lorsque ces montants (RPC) sont ensuite versés aux producteurs de photovoltaïque ou d’éolien, ils sont taxés comme revenu, disons à un taux moyen de 25 % ou 30 % par les cantons et la confédération. Il s’agit donc bien d’un impôt “au carré”….un impôt perçu sur le revenu d’une taxe !

    En ce qui concerne l’industrie du matériel photovoltaïque, il est assez illusoire de vouloir installer des “forges de silicium” dans des pays ou l’on fait monter le prix de l’énergie, par exemple en sortant précipitamment du nucléaire. Les firmes Européennes ou Suisses qui sont en difficulté ne fabriquent (pour la grande majorité) aucune cellule solaire. Ils assemblent des modules photovoltaïques, ou produisent des machines effectuant cet assemblage, laminés, etc. ou des machines pour produire et tester les cellules). Il en va autrement pour les onduleurs (conversion du courant continu provenant des modules PV en courant alternatif propre à l’injection dans le réseau de distribution), qui sont généralement produits en Europe, aux USA, au Japon,,,,et en Chine.
    De toute manière, c’est historique, toute industrie dont une forte croissance initiale est “subventionnée” par les Etats est sujette à essuyer de grandes variations conjoncturelles. L’Allemagne, l’Espagne et plus récemment la France ont largement coupé leurs aides étatiques aux installations photovoltaïques, vers la fin de l’année 2010. Cette fin annoncée a créé une énorme demande additionnelle dans les derniers mois puis une chute rapide. Aucune industrie ne peut supporter de tels à coups sans souffrir.

    En Suisse, l’ambition de produire 20 % d’électricité photovoltaïque en 2020 ou même en 2034 semble assez irréaliste. L’un de “fans” de cette thèse (hypothèse ?) annonçait ce matin à la radio qu’en 2011 le “courant” photovoltaïque produit en Suisse représentait déjà 1.5% du courant total consommé ! Je ne sais pas ce que “courant “ signifie dans ce cas ! Ce que les chiffres de l’OFEN montrent c’est que l’énergie électrique photovoltaïque produite en Suisse représentait en 2010 le 0.12% (zéro virgule 12 pour cent), c’est à dire 80 Gwh par rapport aux 66’252 Gwh produits au total. La multiplication par 10 en l’espace d’une année, annoncée par cet intervenant, est franchement fantaisiste, nous n’avons vraisemblablement même pas doublé cette production entre 2010 et 2011..

    Avec la raréfaction des combustibles fossiles, nous devrons tous faire des économies d’énergie, c’est évident. Cependant la sortie précipitée du nucléaire imposera un tel rythme de régression que les dates suggérées semblent irréalistes. D’autres veulent nous faire passer d’un style de vie, d’une Société ou nous consommons environ 6000 Watts d’énergie totale par habitant sur une année, c’est à dire environ 52’560 Kwh par habitant et par an (pétrole, gaz, bois, électricité, etc) à un style de vie ou nous consommerons 2000 Watts. Récemment un mouvement s’est créé en Suisse pour nous conduire à une Société consommant pas plus de 1000 Watts par habitant., c’est à dire 8760 KWH par an, tout facteur énergétique confondu. A peine de quoi se nourrir et se chauffer ! Pas de viande à manger, pas de voyages, de très petits espaces vitaux, etc etc. Même l’ancien maire de Zurich, le socialiste Elmar Ledergerber a qualifié cette vision sociétale d’“horreur totalitariste”! Il est vrai que de telles restrictions imposées à tout un peuple risquent de générer de sérieuses vagues….
    Pour l’instant, gardons notre calme, attendons le rapport sur l’avenir énergétique de la Suisse qui sera produit par l’OFEN ou le Conseil Fédéral dans les prochains mois. Nous y verrons alors un peu plus clair et espérons y trouver beaucoup de pragmatisme pour tempérer les illusions ambiantes.

  3. Posté par B. Brunner le

    Subventionner des importations chinoises est aberrant, en regardant tomber en faillite des entreprises de pointes Suisses est tout simplement lamentable. Même des petits coups de pouce aux PME de pointe locales peuvent faire la différence entre succès mondial et faillite lamentable. Et la meilleure manière n’est pas en y investissant à fond perdu, mais en soutenant leurs ventes de manière préférentielle. Oui, préférentielle, un mot tabou… Vraiment ? Les technologies d’énergies solaires et renouvelables sont une “ressource naturelle” d’un pays. Veut-on vraiment une OPEP du panneau solaire, et suivre la trace des terres rares chinoises, où après un dumping destiné à détruire toute concurrence, la Chine a introduit des contingents à l’export? Nos politiques feraient bien de se réveiller. La course technologique qui déterminera la balance commerciale solaire dans 10 ou 20 ans, c’est maintenant.

Et vous, qu'en pensez vous ?

Poster un commentaire

Votre commentaire est susceptible d'être modéré, nous vous prions d'être patients.

* Ces champs sont obligatoires

Avertissement! Seuls les commentaires signés par leurs auteurs sont admis, sauf exceptions demandées auprès des Observateurs.ch pour des raisons personnelles ou professionnelles. Les commentaires sont en principe modérés. Toutefois, étant donné le nombre très considérable et en progression fulgurante des commentaires (259'163 commentaires retenus et 79'280 articles publiés, chiffres au 1 décembre 2020), un travail de modération complet et exhaustif est totalement impensable. Notre site invite, par conséquent, les commentateurs à ne pas transgresser les règles élémentaires en vigueur et à se conformer à la loi afin d’éviter tout recours en justice. Le site n’est pas responsable de propos condamnables par la loi et fournira, en cas de demande et dans la mesure du possible, les éléments nécessaires à l’identification des auteurs faisant l’objet d’une procédure judiciaire. Les commentaires n’engagent que leurs auteurs. Le site se réserve, par ailleurs, le droit de supprimer tout commentaire qu’il repérerait comme anonyme et invite plus généralement les commentateurs à s’en tenir à des propos acceptables et non condamnables.

Entrez les deux mots ci-dessous (séparés par un espace). Si vous n'arrivez pas à lire les mots vous pouvez afficher une nouvelle image.