L’ancien ministre Jack Lang maîtrise l’art de l’écran, non pas l’écran de cinéma ou de télévision, mais l’écran de fumée. Il se gargarise de grands mots, bien public, intérêt général, progrès, pour faire de l’islam l’alpha et l’oméga de la République.
Dans son dernier livre, il laisse accroire qu’il n’a que des buts louables : développer l’enseignement de toutes les langues étrangères dans les collèges, les lycées et les universités et réduire la domination de l’anglais. C’est enfoncer une porte ouverte : depuis longtemps (20 ou 30 ans), l’Union européenne a exigé de tous les États membres qu’ils développent l’enseignement des langues étrangères. Quant à la domination de l’anglais, elle résulte de la globalisation financière et de la mondialisation des échanges qui ont été conçues et imposées en France, en Europe et dans le monde après 1983 par les socialistes, dont Lang himself, sous la houlette de Delors. Étienne Dolet se gausse de ce ministre qui déplore les effets des causes qu’il chérit.
Venons-en à l’essentiel. Lang cite l’algèbre, la chimie, l’algorithme, dont il attribue l’invention aux Arabes. En réalité, le nom algèbre résulte de la latinisation d’un article suivie d’un nom – al jabr -, employé par Al Khawarizmi (fin IXe-Xe siècles), qui n’était pas arabe, dans le titre d’un traité sur les opérations de restauration et de réduction dans les égalités. C’est de la bonne arithmétique certes, mais loin de ce qu’est l’algèbre. Al jabr est un mot de la langue courante, l’algèbre est une discipline : il y a un abîme entre le mot et la chose. La survalorisation, totalement idéologique, des Arabes dans l’élaboration d’une civilisation, comme en témoignent les chiffres indiens, dits à tort arabes, et le zéro (qui n’est jamais dit arabe – par euphémisme sans doute), a pour effet l’effacement du nom et l’oubli de l’œuvre de celui qui a fait de l’algèbre une véritable science : François Viète, protestant et compagnon d’armes d’Henri IV. Jack Lang a été ministre de l’Éducation nationale. Il ne faut pas s’étonner que, sous l’emprise d’un politicien aussi obscurantiste, les écoles de France soient tombées dans les abîmes du trente-sixième dessous.
Il en va de même pour l’exemple de l’alchimie. C’est le mot lui-même qui vient des Arabes, qui l’ont emprunté aux anciens Égyptiens, lesquels avaient de vraies connaissances dans la transformation des matières organiques, ne serait-ce que pour réussir les processus de momification. Faire des Arabes les inventeurs de la chimie, sous le prétexte que le mot alchimie a été emprunté à leur langue, c’est guillotiner une seconde fois après 1794 Lavoisier, le génial inventeur de cette science qu’est la chimie. Voilà à quoi besogne un ancien ministre de la Culture et l’Éducation nationale. Pour lui, la culture est inculture et l’éducation un formatage idéologique.
Il en va ainsi de l’algorithme. C’est un mot valise, formé du mélange de deux mots : un mot emprunté à la langue espagnole (alguarismo) laquelle l’a emprunté à l’arabe et un mot grec arithmos (d’où arithmétique), qui signifie nombre. Il y a très longtemps, l’algorithme était l’art de compter avec les chiffres dits arabes ou le système de numération décimale en chiffres arabes. La science des algorithmes est toute différente et n’a quasiment aucun rapport avec le mot arabo-espagnol mâtiné de grec.
Quant aux mots arabes utilisés en français, ce sont surtout razzia, matraque, séide, Allah akbar, kouffar, djihad, chicha, haschich, Qoran, etc. et leurs équivalents : mécréants, associateurs, égorger, tuer, etc. Les termes désignant des réalités de la civilisation, jupe, sucre, abricot, ont été empruntés aux diverses langues de l’Italie, de l’Espagne ou de l’ancien Empire byzantin.
Certes, il y a depuis le XVIe siècle au Collège de France d’admirables orientalistes qui ont pris pour objet d’étude la langue arabe, la religion musulmane, les mœurs et les coutumes des Arabes. Mais, les chercheurs en sciences sociales et islamiques actuels les tiennent au mieux pour des mécréants, au pis pour des ennemis de l’islam et des Arabes. Lang ferait preuve de courage si, au lieu de les couvrir de mépris, il exhumait leurs œuvres. Mais le plus grand d’entre eux, Barthélemy d’Herbelot de Molainville (XVIIe siècle), était jésuite et sa Bibliothèque orientale reste méconnue.
Le livre Langue arabe, Trésor de France est au mieux de la propagande, au pis une énorme provocation, du type CRS SS ou Staline antifasciste ou Mitterrand résistant, slogan que Lang ânonnait déjà il y a un demi-siècle. Tout dans le titre, comme dans la volonté de faire de l’arabe une langue de France, pue la désinformation bête, le mensonge pourri, la propagande débile. Tout ça est bien digne d’un vrai socialaud.
Étienne Dolet
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