Laurent Lagneau · 22 juillet 2020
Les protestations de l’Union européenne ainsi que les menaces de renforcer les sanctions à son égard n’y font rien : la Turquie continue ses forages gaziers dans la zone économique exclusive de la République de Chypre tout en entravant ceux conduits grâce à des autorisations délivrées par Nicosie. Et cela conformément, a priori, au concept de « Patrie bleue », c’est à dire un programme politico-militaire consistant à défendre avec agressivité les frontières maritimes turques, que ce soit en mer Noire, en mer Egée et en Méditerranée orientale.
La question de l’exploitation gazière au large de Chypre est liée avec la Libye. En novembre 2019, avec le gouvernement d’entente nationale de Tripoli [GNA], Ankara a en effet signé un protocole d’accord lui permettant d’étendre son plateau continental et, donc, d’appuyer des revendications territoriales en Méditerranée orientale, aux dépens de Nicosie, d’Athènes et du Caire.
« L’enjeu central pour la Turquie est de revendiquer une vaste zone économique exclusive en Méditerranée orientale » explique Ryan Gingeras, spécialiste de la Turquie et professeur au sein du département des affaires de sécurité nationale à la Naval Postgraduate School, [...]
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RTS info, lien vers l'audio: La Marine grecque en état d'alerte face à la présence turque en mer Egée
"Des unités de la Marine ont été déployées depuis hier (mardi) dans le sud et le sud-est de la mer Egée", a déclaré cette source. Ces unités "sont prêtes à répondre à toute activité", a ajouté l'officier. La Marine a également appelé les marins à ignorer une restriction de navigation maritime décrétée par la Turquie.
Le Premier ministre grec Kyriakos Mistotakis a organisé des rencontres séparées avec les dirigeants de partis politiques grecs, jeudi et vendredi, "sur des sujets nationaux", selon son bureau de presse.
"Escalade de la tension"
Dans le cadre de ses activités d'exploration d'hydrocarbone en cours, la Turquie a annoncé "publiquement" le déploiement de son vaisseau Oruç Reis en Méditerranée orientale à compter de mardi, selon un communiqué du ministère turc des Affaires étrangères daté de mercredi.
Athènes a protesté officiellement contre ces mouvements proches de l'île grecque de Kastellorizo. "L'annonce des explorations turques dans une section du plateau continental grec constitue une escalade de la tension dans notre région", a déclaré mardi le ministère grec des Affaires étrangères.
"Nous appelons la Turquie à cesser immédiatement ses activités illégales qui violent nos droits souverains et sapent la paix et la sécurité dans la région", a ajouté le ministère grec. Or Ankara affirme que la zone maritime où les explorations seront conduites se trouve "entièrement sur le plateau continental turc tel que déclaré aux Nations unies", selon Hami Aksoy, porte-parole du ministre des Affaires étrangères.
Celui-ci conteste que la seule île grecque de Kastellorizo, "large de 10 km2, à 2 km seulement d'Anatolie (en Turquie) et à 580 km du continent grec, puisse générer un plateau continental de 40'000 km2", selon un communiqué.
"Forages illégaux"
Pays voisins tous deux membres de l'Otan, la Grèce et la Turquie ont historiquement des relations tendues. Athènes dénonce l'accord turco-libyen controversé, signé l'année dernière, sur le partage des espaces maritimes entre Ankara et le gouvernement de Tripoli.
Athènes estime que cet accord vise à accroître l'influence de la Turquie en Méditerranée où ce pays a récemment effectué des forages exploratoires à proximité de Chypre, suscitant les protestations des pays voisins, Chypre, la Grèce et l'Egypte. L'UE a également dénoncé ces "forages illégaux" et menacé Ankara de sanctions.
ats/gma