"Quelles souffrances obligeront les souverainistes à quitter leurs certitudes ? Quand les pro-européens occuperont-ils de nouveau le devant de la scène ?"
François Chérix continue de gémir dans le Temps, incapable de faire son deuil de l'accord-cadre. Il vaut néanmoins la peine d'étudier ses lamentations de manière attentive, la vérité sortant de la bouche des enfants. "Et rien n’est plus légitime aujourd’hui que l’amertume d’Européens que la Suisse a roulés deux fois dans la farine. La première en se qualifiant de futur membre du club pour obtenir les accords bilatéraux sectoriels après le refus de l’EEE; la seconde en laissant croire durant des années qu’elle souhaitait un cadre pour consolider les liens établis."
"En se qualifiant de futur membre". Le masque tombe. Les accords bilatéraux nous avaient été présentés comme une alternative à l'adhésion, comme un modus vivendi avec notre grande voisine à laquelle nous ne souhaitions pas adhérer. Et voici que M. Chérix avoue que la chose avait bien été présentée à Bruxelles comme une voie détournée visant le but ultime, faire de la Suisse un protectorat européen.
"En laissant croire durant des années qu’elle souhaitait un cadre pour consolider les liens établis." Il me semble qu'il n'y avait pas qu'un partenaire à la table des négociations. L'Union européenne pouvait elle aussi en tout temps mettre un terme à ce qui est présenté aujourd'hui comme un jeu de dupes. Tirer les choses en longueur, ne jamais décider, voici ce que pratique volontiers la Commission européenne qui aime avancer dans le brouillard. Ca lui évite d'annoncer ses intentions au grand jour. On le voit avec la Turquie qui continue de négocier son adhésion avec la commission tout en faisant de son pire pour s'en prendre aux valeurs qu'elle prétend siennes.
François Chérix ose les comparaisons audacieuses. Il nous fait savoir que "toutes proportions gardées, la liquidation de la voie bilatérale fait penser à la révocation de l’édit de Nantes." Oui, comme la France de 1685, la Suisse s'appauvrira et perdra des compétences précieuses parties sous des cieux plus cléments. A ce propos, merci à Louis XIV qui m'a permis de naître suisse. Pour le reste, on a déjà entendu cela maintes et maintes fois. Et si les diseurs de mauvaise aventure avaient eu raison, nous nous trouverions en plein désert de Gobi. Il en ira encore une fois comme en 1992. Il y aura de gros grains mais nous resterons à la barre pour guider notre pays dans la tempête. Mieux vaut être libres dans l'effort qu'esclave dans le confort. Concluons encore une fois avec Victor Hugo. Sauvons la liberté, la liberté sauvera le reste.