Pour un Conseil fédéral bourgeois

Le Conseil fédéral s'apprête à vivre une révolution bourgeoise inédite depuis bien longtemps. A la suite des dernières élections fédérales, le PLR et le PDC ont placé de nouvelles personnes à leur tête, nettement moins conciliantes avec la gauche que leurs prédécesseurs. Cela ne manquera pas d'influencer la composition du prochain gouvernement qui va marquer un fort virage à droite. S'il est toujours difficile de prévoir le résultat d'une élection au Conseil fédéral tant sont nombreuses les variables incontrôlables, on peut néanmoins se risquer à quelques pronostics. Favori pour succéder à Didier Burkhalter, le Tessinois Ignazio Cassis peut compter sur un fort soutien du camp bourgeois, las de voir des Conseillers fédéraux issus de ses rangs servir la soupe à la gauche. Aux côtés d'une UDC unanime, le PDC apportera lui aussi un fort soutien au Tessinois, ceci en vue du départ de Doris Leuthard. Les Démocrates-Chrétiens veulent eux-aussi profiter d'une personnalité conforme à la ligne défendue par Gerhard Pfister, ayant pour ce faire besoin du soutien bourgeois. Par la suite, il sera temps pour Karin Keller-Sutter d'entrer elle-aussi au Conseil fédéral, ce qui ne manquera pas de ravir le Parti socialiste, toujours soucieux de parité.

Disposant d'une confortable majorité aux Chambres, les trois partis bourgeois ont enfin décidé de traduire cette situation au Conseil fédéral, conscients qu'ils n'ont nul besoin de la gauche pour obtenir ce qu'ils veulent. Compte tenu du mode d'élection de nos Sages, la traduction du résultat des élections fédérales au niveau gouvernemental prend du temps mais elle s'annonce au cours de cette législature, au plus tard dès le début de la prochaine. Les représentants socialistes ne vont pas tarder à se sentir bien seuls face à une majorité enfin unie et cohérente et on se réjouit d'ores et déjà d'entendre Christian Levrat revenir avec l'idée de quitter le Conseil fédéral pour passer dans l'opposition, soutenu en cela par les Jeunes socialistes poussés encore plus à gauche par leurs prochaines déconvenues.

Le temps de l'arrogance est derrière pour le Président du PS qui, du haut de ses 20%, entendait soumettre ses adversaires à ses vues avec la complicité de Christophe Darbellay. Dorénavant, ses coups de menton n'atteindront plus que les membre du parti à la rose, heureux d'entendre que le grand chef ne va pas se laisser faire. Ailleurs, c'est peut-être avec joie que certains auront à cœur de ramener l'homme à sa vraie place, écoutant avec plaisir les glapissements outrés du personnage dont on aura rogné les dents.

A propos de dents, l'annonce de la candidature de Pierre Maudet ne surprend personne, l'homme se voyant en Macron helvétique, ce qui n'est pas du meilleur augure au vu de la chute du président français dans les sondages. Il est évident que PS et Verts vont lui trouver nombre de qualités, sa double nationalité, ses penchants europhiles ou la régularisation des sans-papiers étant de nature à séduire à gauche. Les camarades devraient néanmoins avoir les déclarations d'amour discrètes étant entendu que s'annoncer au sein des groupes parlementaires bourgeois en qualité de candidat de la gauche n'est pas une garantie de succès pour notre bouillant magistrat.

Nous verrons courant septembre si la stratégie retenue donne ses premiers résultats avec le retour du Tessin au Conseil fédéral. L'élection d'Ignazio Cassis constituera la première étape visant à doter notre pays d'un gouvernement enfin en phase avec sa population, un gouvernement conscient de nos intérêts et prêt à les défendre face à des partenaires d'autant plus voraces que nos Sages leur disaient oui avant de savoir quelles étaient leurs revendications. Il ne serait dès lors pas surprenant que l'armée soit très vite déployée à notre frontière sud, une frontière qu'Ignazio Cassis connait bien.

La Côte-aux- Fées, le 04 août 2017.                         Yvan Perrin