Réagissant au nombre croissant de prières de rue en France, Céline Pina déclare :
"Il n'y a pas besoin d'occuper la rue. Mais pourquoi occuper la rue? (...) Le but du jeu est de marquer l'appropriation, car le point du jeu, c'est la visibilité. "
"Il y a clairement une forme d'emprise, de contrôle, et le troisième message est de montrer que la foi est supérieure à la loi et que la détermination du croyant lui permet en même temps d'occuper l'espace public et sans borne, puisque l'autorité publique, les politiciens, ne mettent pas un terme, y compris lorsque c'est parfaitement illégal ", ajoute-t-elle.
Céline Pina revient sur l'apparition d'événements interdits aux blancs. Sous couvert d'antiracisme, leurs organisateurs ressuscitent selon elle une nouvelle forme de racisme, fondée comme autrefois sur la science : non plus la biologie, mais les sciences humaines.
Ancienne élue locale, Céline Pina est essayiste et militante. Elle avait dénoncé en 2015 le salon de «la femme musulmane» de Pontoise et a récemment publié Silence Coupable (éd. Kero, 2016). Avec Fatiha Boutjalhat, elle est la fondatrice de Viv(r)e la République, mouvement citoyen laïque et républicain appelant à lutter contre tous les totalitarismes et pour la promotion de l'indispensable universalité de nos valeurs républicaines.
Dans certaines universités dites «en lutte», de Tolbiac à Paris VIII en passant par Nanterre, jusqu'au sein du syndicalisme enseignant, comme chez Sud Éducation ; via des séminaires de formation politique (camps décoloniaux), ou encore dans le cadre de festivals dits culturels, une nouvelle revendication apparaît: celle de la ségrégation raciale.
«Interdits aux blancs», tel est le mot d'ordre et le plan d'action qu'essaie de populariser une partie de plus en plus importante des indigénistes et de la gauche Big Brother. Ceux qui veulent remplacer la lutte des classes par la guerre des races et qui, comme dans 1984, de Georges Orwell, font de l'inversion des concepts et du retournement du sens, une arme de destruction des consciences et de soumission des esprits. C'est ainsi que dans l'univers mental du Parti des Indigènes de la République (PIR) et du Collectif Contre l'Islamophobie en France, comme dans les représentations de l'extrême gauche qui les soutient, l'antiracisme est devenu l'alibi de la haine du blanc, une forme de pensée qui réduit tout à la couleur de la peau. La conférence internationale «Bandung du Nord», organisée du 4 au 6 mai 2018 à la Bourse du travail de Saint-Denis en est la dernière illustration.
Oh bien sûr, chez ces gens-là, on ne dit plus «interdit aux blancs», c'est mettre son racisme en avant de façon trop éhontée et cela fait encore réagir. Les temps ne sont pas encore mûrs pour assumer la volonté de séparatisme racial et de pureté des origines, alors on utilise plus volontiers le terme «décolonial», «réservé aux racisés» ou encore «non-mixte». Mais il suffit de lire la présentation de ladite conférence pour que les masques tombent. C'est ainsi que notre raout indigéniste devient, par la magie du verbe, «la première conférence internationale de personnes de couleur prenant à bras-le-corps les questions concernant les non-blancs vivant dans le Nord global, afin de discuter de problématiques qu'elles ont en commun». On croirait entendre le vent se lever, en fait c'est juste Houria Bouteldja qui agite son éventail. Car quand on creuse un peu l'organisation de cette «conférence internationale», on ne peut que constater que tout cela repose largement sur le PIR assisté du CCIF avec quelques guest stars habituées à se compromettre avec cette mouvance. Ainsi, si Angela Davies est mise en avant, c'est surtout le parti des Indigènes et ses alliés qui composent le gros des intervenants. Sans surprise on retrouvera sur scène les Houria Bouteldja, Sihame Assbague, Nacira Guenif, Rokhaya Diallo, Ismahane Chouder, avec un nouveau venu, Nordine Saïdi, un islamiste belge très tolérant et compréhensif, membre de la liste Islam, qui refuse de condamner les attentats-suicide et prône la charia. Brandir la référence à la conférence de Bandung, qui avait d'autres ambitions et représente un moment historique important, pour finir à Saint-Denis à déverser sa haine raciste entre demi-sels de l'entreprenariat identitaire, cela dit tout du rapport au réel chez cette mouvance.
L'antiracisme raciste, voilà le bel oxymore qu'ils ont réussi à forger et à imposer. Pour eux le racisme n'est pas d'attribuer à une couleur de peau ou à une appartenance ethnique, des qualités morales, c'est un outil qui sert à mettre en accusation les «Blancs» et l'État de droit, le racisme devient donc un «système politique qui prive les non-blancs de parole et impose un récit dominant sur le terrorisme qui facilite la montée d'un état policier et cible les personnes non blanches». Selon eux nous vivons donc en France dans un régime fascisant qui pratique l'apartheid et la lutte contre le terrorisme n'est qu'un prétexte pour humilier les «non-blancs». Autant d'outrance devrait leur valoir une complète délégitimation. Et bien non… Une partie de la gauche soutient cette vision et le mouvement étudiant les a mis en avant lors de l'occupation des facs. C'est ainsi que l'on a retrouvé, dans le rôle du conférencier/commissaire politique, des militants du PIR venus parler d'homoracialisme, d'impérialisme gay et sommer l'extrême gauche de faire son autocritique pour oser mettre le social avant le racial. Laquelle gauche en est réduite à s'excuser pour ses militants blancs. La séquence était à ce titre instructive, qui montre, le 22 avril 2018, lors d'un débat sur l'évacuation de Tolbiac, Juliette, jeune militante gauchiste, s'excuser d'être blanche tellement elle a intégré ce discours essentialiste qui fait de la couleur de la peau la marque du dominant et la preuve de la faute.
La série de conférences tenue par les indigénistes à cette occasion révèle le fond de leur pensée et de leurs objectifs. Et toute la considération qu'ils ont pour leurs alliés objectifs. Ainsi un certain Wissam Xelka, militant du PIR explique qu'il faudrait que «les militants de l'antiracisme politique prennent le contrôle des blancs, les guident, leur fassent lâcher le gouvernail, leur retirent la main mise sur la contestation».L'obsession de la race est telle que même entre alliés, la question de ce que l'on pense, dit ou fait est évacuée au profit de la seule référence à la couleur de peau. C'est ainsi qu'après avoir défini la race comme «faisant référence aux théories racialistes qui postulent l'existence biologique des races humaines et de leur hiérarchisation avec le Blanc au sommet», le jeune militant se défend de vouloir «reprendre ces théories pseudo-scientifiques, en inversant la hiérarchie, afin de placer les Blancs tout en bas». Pourtant, souvent, lorsqu'on se défend par avance d'une objection que personne n'a soulevée dans une salle acquise, c'est surtout parce que s'en défendre permet d'exprimer sa pensée profonde sans avoir à l'assumer. Ce que confirmera la fin de l'intervention de notre apprenti révolutionnaire, au terme de 7 pages d'un discours aussi pédant que creux.
C'est ainsi que la référence obsessionnelle à «l'impérialisme occidental» glisse vers la dénonciation de la «férocité blanche» et que la revendication identitaire devient un enfermement essentialiste: «Proclamer à la face du Blanc», «Je suis arabe», «Je suis musulman»,» Je soutiens les Arabes parce qu'ils sont Arabes et les musulmans parce qu'ils sont musulmans (…) est une proclamation éminemment politique». En effet, mais quand on ne se définit que par rapport à un ennemi caractérisé par la couleur de sa peau, quelle autre issue a-t-on que la vengeance, donc la violence ethnique? On voit aussi à quel point la notion de choix disparaît au profit de l'affirmation ethnique ou confessionnelle: «Être Arabe ou musulman» devient une position politique dès que cette identité est exhibée en face d'un Blanc. C'est le degré 0 de l'intelligence et de l'émancipation, mais une manière imparable de réaffirmer la clôture communautariste et de faire du rejet et de la haine de l'autre, la base de l'affirmation de soi. Dans le même esprit, lors de la conférence sur «l'impérialisme gay», le militant du PIR explique ses choix de positionnement politique par son appartenance raciale: «le camp politique indigène est un courant qui place les intérêts politiques des non-blancs au cœur de ses préoccupations.(…) Je prends parti pour le camp politique indigène parce que je fais partie de ce camp» (de par sa couleur de peau). Il n'est plus là question de choix, de pensée, de réflexion. L'apparence définit l'appartenance et se suffit à elle-même. On est dans la lignée d'Houria Bouteldja qui dit appartenir à «sa race, son clan, sa famille, l'Islam». Ce genre d'affirmation est souvent le premier coup de semonce du renoncement aux libertés individuelles et civiles pour les remplacer par la course à la pureté ethnique et au dogmatisme religieux et/ou militant.
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