Michel Garroté - Ancien dirigeant du département antiterroriste du MI6, les services secrets britanniques, Richard Barrett indique, dans le Daily Mail, qu’Anis Amri, abatu ce vendredi par la police italienne (il a crié : « allah akbar ») et auteur de l’attentat de Berlin, n’est qu’un terroriste parmi des milliers de terroristes potentiels très extrêmes et dont le nom apparaît dans les registres. De plus, si l’on inclut l’ensemble des Länder d’Allemagne, ils ont environ 7'000 cas existants, ajoute-t-il. Charmante nouvelle...
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De son côté, Lisa Murr Nehme, Franco-libanaise, professeur, historienne, politologue et islamologue a récemment écrit, à propos de l'aide fournie par les Occidentaux aux islamistes (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : L’aide diplomatique et militaire accordée par les Anglais au chérif Hussein, était semblable à l’aide accordée par les Américains de nos jours d’abord à Ben Laden et à Al-Qaïda, puis à Daech, et maintenant, au Front Nosra ou Fatah-el-Cham.
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Lisa Murr Nehme : Elle ressemblait également à l’aide accordée par les Américains aux Frères Musulmans en Égypte et ailleurs. Elle a été le pétrole jeté sur le feu d’un mouvement qui n’était que latent, et qui est devenu assez puissant pour survivre aux modes communiste, socialiste, nassérienne, etc. Grâce à ce climat quasi hystérique, Hassan Al-Banna, grand-père de Tariq Ramadan, a pu fonder le mouvement des Frères Musulmans et avoir beaucoup de succès. Et son ami le mufti Hajj Amine Husseini, fait par les Anglais mufti de Jérusalem, a été en position de créer une guerre entre les juifs et les Palestiniens non-juifs, qui dure encore, ajoute Lisa Murr Nehme (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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A ce propos, dans Challenges, l'éditorialiste français Bernard Guetta écrivait notamment, AVANT les attentats de Berlin, Ankara et Zürich (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : Combattu par les Occidentaux et non pas par les Russes, Daech recule sur tous les fronts, perd ses hommes, ses stocks de munitions et ses sources de revenus mais rien n’est plus dangereux, on le sait, qu’une bête acculée. Il y aura d’autres tentatives d'attentats. Certaines seront déjouées, d’autres pas mais il y aura d’autres attentats comme ceux d’Ankara et de Berlin car Daech est à la fois dos au mur et oeuvrant à son rebond. L’Etat islamique en Irak et au Levant, Daech, est en train de perdre Mossoul, la plus importante de ses deux places fortes.
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Bernard Guetta : Un quartier après l’autre, cela dure parce que la coalition arabo-occidentale conduite par les Etats-Unis se refuse à écraser sous les bombes la population de cette ville irakienne que les djihadistes martyrisent depuis plus de deux ans déjà. Comme prévu, l’opération prend du temps car les Occidentaux ne veulent pas se comporter comme les Russes à Alep mais Mossoul sera libérée et la coalition se prépare maintenant à chasser ces sanguinaires criminels de Raqqa, en Syrie. Sous quelques mois, d’ici l’été au plus, Daech aura perdu la partie en Irak et en Syrie comme il l’a perdue à Syrte, en Libye. Combattu par les Occidentaux et non pas par les Russes, Daech recule sur tous les fronts, perd ses hommes, ses stocks de munitions et ses sources de revenus mais rien n’est plus dangereux, on le sait, qu’une bête acculée.
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Bernard Guetta : L’Etat islamique doit montrer à ses troupes et ses sympathisants de par le monde qu’il existe encore et peut toujours frapper. Les attentats relèvent pour lui d’une nécessité vitale et il va d’autant plus les multiplier qu’Alep écrasée et l’insurrection syrienne largement défaite, l’état-major de Daech ambitionne de réaliser une OPA sur ce qui reste des différents courants de l’opposition au clan Assad. Quand l’assassin de l’ambassadeur russe à Ankara hurle, avant d’être lui-même abattu, « Souvenez-vous d’Alep ! », il se pose en vengeur des victimes de la Russie. Quand Daech ensanglante la Turquie, il lui fait payer le retournement d’alliances qu’elle a opérée en se rapprochant de Moscou par peur de voir émerger, en Syrie, un Kurdistan indépendant pouvant réveiller l’irrédentisme de ses propres Kurdes.
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Bernard Guetta : Quand Daech réitère Nice à Berlin, il proclame qu’il n’y aurait pas de différence entre l’Europe et la Russie puisque les Européens, malgré les protestations françaises, ont laissé Vladimir Poutine faire à Alep ce qu’il avait fait à Grozny: la réduire en cendres. Des Kurdes aux sunnites irakiens en passant par l’ensemble des opposants syriens, laïcs ou Frères musulmans, l’Etat islamique va tenter de fédérer tous ceux contre lesquels s’est scellée l’alliance de la Russie, du régime syrien, de l’Iran et de la Turquie. Il n’est pas du tout prouvé qu’il y parvienne. Ce sera en tout cas difficile puisque l’insurrection syrienne avait chassé Daech d’Alep il y deux ans et que les combattants kurdes le combattent sur tous les fronts. Entre Daech et ceux qu’il voudrait, désormais, rallier à un front commun, il n’y a que des points de divergence et des coups échangés jusqu’aujourd’hui mais les attentats servent cet objectif. Assassinats ciblés ou tueries de masse, c’est par la terreur, la seule arme qui leur reste, que les djihadistes veulent prouver, premièrement, qu’ils sont seuls capables d’infliger des pertes aux ennemis communs et à ceux qui les laissent faire et, deuxièmement, que l’ennemi de mon ennemi étant mon ami, il faudrait oublier le passé et s'unir.
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Bernard Guetta : Il y a là plus de désespoir que de chances de succès mais imaginons qu’à la faveur de leur alliance, la Turquie écrase les Kurdes ; que les dernières villes syriennes tenues par l’insurrection connaissent le sort d’Alep ; que le régime Assad reconquiert la majeure partie de la Syrie ; que la Russie finisse ainsi de se réimplanter au Proche-Orient dans une alliance avec l’Iran et que les Iraniens consolident leur emprise sur la Syrie, l’Irak et le Liban. Cela n’aurait rien d’impossible. C’est, au contraire, devenu le plus probable mais cela ne changerait rien aux réalités de la région. Les Kurdes syriens aspireront toujours à l’indépendance. En Irak, la minorité sunnite ne voudra toujours pas vivre sous un pouvoir chiite appuyé par l’Iran. En Syrie, la majorité sunnite, plus de 60% de la population, n’attendra que le moment de la revanche et les puissances sunnites ne laisseront pas l’Iran chiite prendre les commandes d’une si grande part du monde arabe. Guerre régionale, le conflit syrien est tout, sauf fini et c’est cette évidence que sont venus rappeler les deux attentats de lundi, en attendant les autres, ajoute Bernard Guetta (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Introduction & Adaptation de Michel Garroté pour https://lesobservateurs.ch/
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http://www.breizh-info.com/2016/12/23/55791/lisa-murr-nehme-anglais-levant-etat-islamique
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http://www.challenges.fr/monde/ankara-berlin-la-raison-de-ces-nouveaux-attentats_443821
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