Michel Garroté -- Choisir entre les Saoudiens sunnites et les Iraniens chiites, serait-ce choisir entre la peste et le choléra ? Serait-ce choisir entre une monarchie sunnite intégriste et une république chiite, elle aussi intégriste ? A cet égard, force est de constater que les "experts" en la matière et leurs inepties font sourire. De l'Arabie saoudite et de l'Iran, lequel des deux est le plus grand pourvoyeur de terrorisme en Europe, à Nice, Paris, Manchester et Berlin ? Certes, les actes terroristes perpétrés en Europe l'ont été par des terroristes sunnites, se réclamant de l'Etat Islamique (EI), lui aussi sunnite (depuis 2014, 600 personnes ont perdu la vie, dans les attentats de l’Etat Islamique en Europe).
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Mais l'Iran chiite finance des organisations terroristes chiites, telles que le Hezbollah terroriste chiite libanais, le Hamas terroriste gazaoui (pourtant sunnite), certaines factions arabes sunnites en Judée-Samarie (dite également "Cisjordanie") et des groupes chiites (terroristes, et, pas terroristes) en Irak, en Syrie, au Yémen et au Bahreïn. Au stade actuel, la situation en Syrie semblerait être prioritaire. Est-ce vrai ? Au stade actuel, c'est peut-être vrai. Mais le douloureux problème des actes terroristes perpétrés en Europe, n'est-il pas, lui aussi, prioritaire, notamment aux yeux des peuples européens, qui en ont assez, et, dont l'avis, n'intéresse pas leurs propres dirigeants ? Un autre problème pourrait être considéré comme prioritaire.
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C'est celui des dirigeants iraniens face à l'Arabie saoudite. Dans l'islam, 80% des musulmans sont sunnites et 20% sont chiites. Les saoudiens, les qataris sont sunnites. Ils sont suspectés de financer le terrorisme sunnite, y compris le terrorisme sunnite de l'Etat Islamique (EI), en Syrie, en Irak et en Europe. L'Iran chiite intervient en Syrie, dirigée par des alaouites (donc des chiites) et en Irak, dirigé par des sunnites, des chiites et des kurdes. Pour anéantir l'Etat Islamique en Syrie, on peut compter sur l'Iran et la Russie. Et pour mettre fin aux actes terroristes sunnites perpétrés en Europe, sur qui peut-on compter ? Sur nos dirigeants ? Certainement pas. Car nos dirigeants sont à l'abri du terrorisme.
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Pourquoi sont-ils à l'abri du terrorisme ? Parce qu'ils sont hyper protégés par les services de sécurité. Le terrorisme est ainsi "réservé au peuple". Le thème du présent article c'est, d'une part, le terrorisme (sunnite) ; et d'autre part, l'Arabie saoudite. Vu sous ces deux angles (et sans compter le problème de la Syrie dirigée par des alaouites, une composante du monde chiite), le problème majeur ne serait-ce pas, finalement, l'Arabie saoudite sunnite qui commande, au plan religieux - via sa monarchie et via La Mecque - 80% des musulmans de la planète, notamment ceux du Moyen-Orient ?
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Si la réponse à cette question était "oui", alors, au stade actuel, nos principaux ennemis, ce seraient, peut-être, les saoudiens. Mais dans ce cas, la coalition occidentale en Syrie et en Irak, et, les forces russes déployées en Syrie, ne devraient-elles pas, un jour, intervenir contre l'Arabie saoudite, sur son territoire, et, dans son espace aérien ?
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Le Hezbollah chiite libanais téléguidé par l'Iran :
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Le Hezbollah chiite libanais, téléguidé par l'Iran, a réorganisé ses forces en Syrie et au Liban. Le Hezbollah a retiré ses unités d’élite – y compris la division Al-Radwan – de Syrie et les a transférées au Sud-Liban, au sud du Litani, sur le front avec Israël. la division Al-Radwan, équipée de matériel logistique spécial, est stationnée dans la région des fermes de Chebaa et se trouve en état d’alerte maximale. En effet, les dirigeants du Hezbollah - sur ordre des dirigeants militaires iraniens - ont commencé à retirer leurs unités d’élite de diverses régions et villes en Syrie.
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L’organisation terroriste libanaise a déplacé ces unités vers des régions militairement sensibles au Liban, et, les a remplacées en Syrie, par des unités de commandos d’infanterie moins entraînées. Les dirigeants du Corps des gardiens de la révolution islamique iranienne (CGRI), ont approuvé un retrait partiel du Hezbollah de Syrie, ainsi que des changements dans le déploiement de ses forces militaires, après une réunion, à Damas, entre les Iraniens et les haut-commandants de l’armée russe. En clair, le Hezbollah chiite libanais redéploie sa branche militaire afin de se focaliser sur une nouvelle et éventuelle confrontation qu'il envisagerait contre Israël.
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Les milices chiites irakiennes soutenues par l'Iran :
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Des miliciens chiites irakiens (les Forces de Mobilisation populaire) soutenus par l'Iran ont annoncé - dimanche 28 mai 2017 - avoir chassé les djihadistes sunnites de l'Etat Islamique (EI) de plusieurs villages situés à l'ouest de Mossoul et avoir progressé en direction de la frontière syrienne. Parmi les villages repris par les Forces de Mobilisation populaire figure celui de Kojo, où l'EI avait enlevé des centaines de femmes yézidies. Kojo et plusieurs autres villages de la région montagneuse du Sindjar vont ainsi être restitués à la communauté yézidie.
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Pendant que l'armée et la police irakiennes concentrent leurs efforts sur la reprise de Mossoul - où l'EI sunnite ne tient plus qu'une petite enclave autour de la vieille ville - les miliciens chiites irakiens visent à sécuriser la frontière irako-syrienne, en coordination avec les forces du président syrien Bachar al Assad. Cette région frontalière est pour le moment, contrôlée, pour partie, par l'EI, et, pour l'autre, par les miliciens kurdes syriens.
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Le Guide suprême de la Révolution islamique iranienne :
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Le Guide suprême de la Révolution islamique, l'ayatollah Ali Khamenei, véritable chef de l'Iran chiite (auquel est soumis le mollah et "président" Rohani), a déclaré, samedi 27 mai 2017, que les dirigeants sunnites saoudiens courraient à leur perte pour s'être alignés sur les Etats-Unis. L'ayatollah Ali Khamenei a en effet déclaré : "Les dirigeants saoudiens agissent chaleureusement avec les ennemis de l'islam tout en adoptant une conduite opposée envers les populations musulmanes chiites du Bahreïn et du Yémen". Ils encourent une chute certaine".
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L'Iran chiite et les Etats arabes sunnites du Golfe soutiennent des camps opposés dans les guerres en Syrie, au Yémen et au Bahreïn. Les mauvaises relations entre Iraniens et Saoudiens, se sont encore détériorées, après la visite de Donald Trump en Arabie saoudite. Le président américain a accusé - à juste titre - l'Iran de soutenir le terrorisme dans la région. L'Iran dément ces accusations et accuse l'Arabie saoudite d'être la source véritable de financement des djihadistes sunnites, y compris de l'EI. Cette accusation, portée par l'Iran contre l'Arabie saoudite, est, semble-t-il, parfaitement exacte.
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Certains diront que Trump ne s'en prendra pas aux Saoudiens, parce qu'il vient de signer avec eux un gros contrat d’armement ; et parce qu'il fait de l'Arabie saoudite un partenaire majeur de la lutte antiterroriste. D'autres diront que notre ennemi le plus dangereux, c'est l'Iran, en raison de son programme nucléaire offensif toujours en vigueur (je pense qu'on peut compter sur Israël pour régler ce problème dans le "temps favorable"). D'autres encore, diront que nous payons aujourd'hui le prix de 40 ans de "politique arabe" complice du monde arabo-musulman (de l'Organisation de la Coopération Islamique et de ses Etats-membres). Certes. Mais la question demeure : la coalition occidentale en Syrie et en Irak, et, les forces russes déployées en Syrie, ne devraient-elles pas, un jour, intervenir contre l'Arabie saoudite, sur son territoire, et, dans son espace aérien ?
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Michel Garroté pour Les Observateurs
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France : un anti-terrorisme inefficace
Michel Garroté - Oui, en France, l'anti-terrorisme est inefficace. Je ne dis pas qu'ailleurs, il soit meilleur ou plus efficace. Je note simplement qu'en France, il est inefficace, particulièrement inefficace. A gouvernement inefficace, anti-terrorisme inefficace. J'écris "gouvernement", car ce n'est pas l'armée qui est inefficace, mais les dirigeants politiques. La France a annoncé qu'elle sortira de l'état d'urgence le 26 juillet. Huit mois après les attentats de Paris et de Saint-Denis, la France sortira donc de l'état d'urgence. En clair, à la fin du mois. Encore une mauvaise décision. Ajoutons que l'ensemble des services de renseignements français sont mal structurés et mal coordonnés. Ce n'est pas nouveau. Mais c'est une erreur de plus de la part des gouvernements successifs de la France. Face au terrorisme, ce n'est plus excusable. C'est même scandaleux.
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A propos de lutte contre le terrorisme, certains notent que "L'opération Sentinelle" est un trompe-l'œil (ci-dessous, extraits adaptés du texte original ; voir lien vers source en bas de page). Pointée du doigt par la commission d'enquête parlementaire, dite commission Fenech, l'opération de déploiement militaire a montré ses limites lors des attentats. L'historienne Bénédicte Chéron dénonce son inefficacité. Créée au lendemain des attentats de janvier 2015, l'opération Sentinelle vise à déployer massivement des militaires sur le sol français pour prévenir les actes de terrorisme.
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La commission d'enquête parlementaire sur les attentats de 2015 en France, a pointé dans son rapport, rendu public mardi 5 juillet, l'inefficacité de ce dispositif dans le cadre des attentats du 13 novembre. "Les policiers de la BAC, arrivés les premiers, voulaient au moins que les militaires de l'opération Sentinelle, arrivés sur place, leur prêtent leurs fusils d'assaut Famas, puisque les militaires n'avaient pas le droit de tirer. Et ils ont essuyé un refus !" fulmine le député Les républicains Georges Fenech, président de la commission d'enquête.
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L'opération Sentinelle est-elle une coquille vide ou a-t-elle un rôle à jouer dans la lutte contre le terrorisme en France ? Pour l'historienne Bénédicte Chéron, chercheuse à l'IRICE (Identités, Relations Internationales et Civilisations de l'Europe) - Paris-Sorbonne, ces troupes peuvent jouer un rôle préventif mais doivent être repensées en vue d'intégrer davantage de souplesse. Bref, en clair : l'anti-terrorisme français est inefficace (ndmg - tiens, c'est ce que j'écrivais !).
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Maïté Hellio - En quoi consiste l'opération Sentinelle ?
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Bénédicte Chéron - L'opération Sentinelle a mis en place d'importants moyens humains depuis janvier 2015 pour lutter contre le terrorisme. L'armée participait certes déjà au plan Vigipirate depuis 25 ans mais il ne s'agissait pas d'une opération à part entière. Avec Sentinelle, 10.000 soldats sont déployés dans toute la France. Leur mission, sous l'autorité du ministère de l'Intérieur, est d'assurer une présence continue sur le territoire, en particulier aux abords des lieux sensibles : lieux de culte, sites touristiques, zones d'événements sportifs...
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Maïté Hellio - Pourquoi ce dispositif est-il jugé inefficace par la commission Fenech ?
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Bénédicte Chéron - Les attentats du 13 novembre n'ont pu être évités malgré l'existence de cette opération. La portée dissuasive de l'opération Sentinelle n'était pas à la hauteur des attentes, puisque des militaires se trouvaient non loin du Bataclan et des terrasses et n'ont rien pu faire.
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Maïté Hellio - Pourquoi ces patrouilles n'ont-elles pas pu intervenir ?
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Bénédicte Chéron - Elles souhaitaient engager le feu mais on leur a donné l'ordre de ne pas faire usage de leurs armes. L'action des militaires est extrêmement réduite et leur chaîne de commandement est très complexe.
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Maïté Hellio - Faut-il en conclure que l'opération Sentinelle est inutile ?
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Bénédicte Chéron - Rien ne prouve aujourd'hui que la présence d'une patrouille Sentinelle a permis d'éviter un attentat. Il y a bien eu au départ un rôle psychologique : voir des militaires en kaki partout, dans les rues, dans les transports, rassure la population car la menace est bien réelle. 93% des Français font confiance à l'armée pour lutter contre le terrorisme, tandis que l'antimilitarisme n'est que résiduel en France : il tourne autour de 10%.
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Mais on peut aussi ajouter qu'en décembre 2015, si 70% des Français approuvaient l'opération Sentinelle, ils n'étaient que 50% à la juger efficace, selon un sondage Ifop pour le ministère de la Défense. Il y a également une part importante de communication politique. Les militaires bénéficient d'une bonne image dans l'opinion publique, le gouvernement joue donc cette carte. L'opération Sentinelle fonctionne en réalité selon le principe du trompe-l'œil : elle diffuse une image de puissance dans les rues mais on ne peut que constater son impuissance effective.
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Maïté Hellio - N'y a-t-il pas néanmoins des situations au cours desquelles ces patrouilles se sont illustrées ?
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Bénédicte Chéron - Les militaires de Sentinelle ne sont en tout cas pas mis en avant dans le cadre de ce qui devrait être le coeur de leur action : la lutte contre le terrorisme. Un militaire, c'est fait pour faire la guerre. Les militaires de Sentinelle endossent davantage le rôle d'auxiliaires de police de proximité. par leurs présence dans les transports et dans les rues. Une étude réalisée par Elie Tenenbaum, chercheur à l'Institut français des relations internationales (Ifri), souligne que les patrouilles Sentinelle d'Ile-de-France ont été victimes de 1.300 "actions contre la force" entre janvier et septembre 2015, dont 70% d'actes malveillants.
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Parmi les auteurs de ces violences, certains étaient peut-être des fanatiques, mais ça, rien ne permet de l'affirmer...Et il est évidemment compliqué de faire le tri parmi les personnes qui ont commis ces actes. Cette mobilisation de tous les instants est usante pour les soldats... Comme l'a récemment rappelé le général Sainte-Claire Deville, commandant des forces terrestres, avant 2015, les militaires passaient 5% de leur temps en opération intérieure (principalement dans le cadre du plan Vigipirate) et 15% en opération extérieure. Le reste du temps, ils s'entrainaient et se reposaient. Depuis le début de Sentinelle, ils sont mobilisés 50% de leur temps en opération intérieure et 15% en opération intérieure. Leurs temps de repos et de formation sont donc considérablement entamés. Des troupes fatiguées et peu entraînées sont sans aucun doute bien moins efficaces.
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Maïté Hellio - Comment expliquer que les militaires soient autant sollicités ?
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Bénédicte Chéron - C'est d'abord une question pratique et économique. Les militaires sont rapidement mobilisables, efficaces, fiables. Si l’on raisonne à court terme il est également moins onéreux de les utiliser massivement que de recruter et mobiliser à niveau équivalent les forces de l’ordre.
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Maïté Hellio - Faut-il supprimer ce dispositif ou peut-on l'améliorer ?
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Bénédicte Chéron - De plus en plus de spécialistes, comme Michel Goya [spécialiste des armées], plaident pour sa suppression ou, tout du moins, pour un réaménagement drastique, qui permettrait de mobiliser un nombre beaucoup plus faible de militaires, dans des dispositifs plus souples et moins statiques. Mais l’opération Sentinelle ne peut de toute façon pas être pensée isolément : la question de la lutte contre le terrorisme est surtout celle des services de renseignement et de police l'œil, conclut Bénédicte Chéron (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Introduction, adaptation et mise en page de Michel Garroté
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http://tempsreel.nouvelobs.com/attentats-terroristes-a-paris/20160705.OBS4039/terrorisme-l-operation-sentinelle-est-un-trompe-l-il.html
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