La Grande Manip des fausses causalités. L’arme des tyrans

Bruno Bertez
Bruno Bertez
Analyste financier anc. propriétaire Agefi France

 

Voici une remarque fondamentale à la fois pour comprendre notre travail et, en même temps, pour analyser les situations. Elle complète une autre remarque, elle aussi fondamentale: la première des choses à faire quand quelqu’un parle, consiste à se poser la question de l’identité du locuteur et à se demander, « qu’est-ce qu’il veut », en s’exprimant. Derrière toute parole, il y a un désir, une intention, rien n’est innocent.

L’un des ressorts les plus puissants du dirigisme, du constructivisme et de la manipulation des peuples par les gouvernements, est le recours aux fausses causalités.

Par les discours officiels, par la répétition dans les médias, par la complicité des économistes de banque, on implante dans la tête des gens de faux liens de causalités. On escamote les vraies causalités, souvent cachées et complexes, pour les remplacer par d’autres plus faciles à comprendre, plus évidentes, mais fausses.

La juxtaposition des évènements, les amalgames, ce que nous appelons la méthode des Renseignements généraux, des flics, tout cela sert à créer de fausses causalités.

Ce que la Fed a réussi à imposer sur les marchés, grâce à la connivence des Goldman et autres, ce sont ces fausses causalités, multiples, croisées, en maillage et réseaux.  Cela se donne à voir par ce que l’on appelle les corrélations. Et la prolifération des Quants.

Le plus bel escamotage de cause économique des 5 dernières années, c’est celui de la notion de surendettement. Et pour cause, si la notion de surendettement venait à être reconnue, mise au grand jour, alors les gouvernements kleptos et socio-démos perdraient tout levier pour manipuler le monde. Ils se verraient imposer des limites. Confère la nouvelle récente que le monde global contenait maintenant 100 trillions de dettes, nouvelle qui n’a été, ni commentée, ni analysée, alors que c’est la nouvelle la plus importante de l’année.

Autre exemple de fausse causalité, on vous fait croire que la montée des pouvoirs de l’Etat, de l’appareil répressif, est liée au terrorisme, alors qu’il est lié au besoin de faire se tenir tranquille les peuples que, maintenant, l’on craint. La militarisation de la police en est le signe le plus révélateur ainsi que les écoutes généralisées. Le terrorisme, « ils » n’en ont pas peur, ils le forment, ils lui fournissent des armes, ils combattent à ses côtés en Libye, en Syrie, et en Ukraine, par exemple. On vous fait passer de la géopolitique de conquête et de contrôle, pour de la lutte anti-terroriste à l’extérieur et de la menace terroriste à l’intérieur.

Sous des dehors scientifiques et mathématiques, l’une des techniques utilisées pour cet enfumage est celle des corrélations.

Qu’est-ce qu’une corrélation? C’est le constat que lorsqu’une chose se produit, alors avec une forte probabilité, une autre évolue d’une certaine façon, prévisible.

Une corrélation, c’est l’établissement d’un arc de Pavlov. Je te montre un mouvement sur le yen qui sert de sous-jacent au carry global et hop, tu salives sur les marchés. Le maillage des corrélations, discours artificiel sur le réel, permet de faire disparaitre ce même réel. Le réel est peu à peu évacué des marchés, ils tournent en rond sur eux-mêmes. Même plus peur!

Plus fondamentalement, je te montre une politique monétaire non conventionnelle type ZIRP et QE, et tu salives le marché des actions à la hausse, sans voir que le vrai facteur causal qui a produit et permis la hausse, c’est la décision discrète prise à la mi-mars 2009 de modifier les règles comptables du FASB et, ainsi, d’écarter tout risque de faillite des banques.

Du coup, celles-ci sont miraculeusement devenues solvables, elles ont pu entrer dans le jeu de la politique non conventionnelle de la Fed et faire en sorte que personne ne « fight the Fed ». Elles ont joué le rôle de locomotive de la politique non conventionnelle, type JP Morgan dans les années de la crise de 29.

Cela dit, il y a eu, et il y a toujours, une trace de la vraie situation réelle, c’est la prudence des banques qui emploient moins que leurs ressources et accumulent les réserves de précaution oisives.

Cette méthode de manipulation/dirigisme par la création et l’implantation de fausses causalités, n’a, à notre connaissance, jamais fait l’objet de recherches sérieuses, alors que l’autre outil, la propagande, a lui été bien cerné et analysé.

La constitution d’une nouvelle extrême droite populiste en Europe procède de la même méthode vicieuse, la constitution de fausses corrélations et, maintenant, il suffit aux partis traditionnels de gouvernements d’appuyer sur un bouton et, hop, ils font ainsi monter le racisme, les rejets, les populismes, qui constituent des impasses pour les électeurs, mais des boulevards pour les socio-démos.

Ainsi, par la maîtrise des corrélations sociales et politiques, le Français Hollande a mis en place une stratégie de réélection, stratégie de long terme qui consiste à faire monter le Front National jusqu’au point où celui-ci passera devant l’UMP au premier tour des prochaines Présidentielles, ce qui assurera à Hollande la réélection dans un fauteuil. Le coup de Jospin, mais à l’envers. Hollande, le recours!

Autre exemple, l’idée monétariste qu’il y a un rapport entre la politique monétaire non conventionnelle, l’effet de richesse et la reprise de la croissance. C’est l’exemple de l’établissement de fausses causalités qui a permis de faire des cadeaux aux banques tout en faisant croire que l’on aidait Main-Street.

Les chercheurs ont montré qu’il n’y avait ni lien logique sérieux, ni lien pratique, entre les deux. La Fed elle-même reconnait ne pas avoir réussi « à comprendre par quels canaux, la politique monétaire non conventionnelle pouvait fonctionner » (Fed de San Francisco). Le rendement de la politique de la Fed est tellement faible, pour un risque colossal et non quantifié, que les économistes ont calculé qu’il aurait été cent fois plus rentable de se passer de la transmission par l’effet fictif de richesse et, à la place, de distribuer l’argent aux consommateurs. De même, plutôt que d’utiliser le carry et le levier et de faire remonter les prix de l’immobilier par les Blackrock et Blackstone, la Fed aurait pu, dès 2008, mettre en place une politique de rachat direct par le Trésor du parc immobilier excédentaire et faire gagner beaucoup d’argent à la collectivité.

Cela dit, là aussi, il y a des traces de la non-efficacité des politiques de Wealth Effect, ce sont les évolutions réelles des « revenus gagnés » des ménages américains et bien sûr les chiffres réels de l’emploi. Tous deux sont catastrophiques en réel.

La démocratie repose sur le savoir et la primauté de la Vérité, la tyrannie se développe sur l’entretien de l’ignorance. La manipulation des causalités entretient l’illusion du savoir et, à ce titre, constitue l’arme suprême des tyrannies.

Bruno Bertez, 13 mars 2014

3 commentaires

  1. Posté par Michel de Rougemont le

    La Vérité avec V majuscule n’existant pas il est illusoire de croire que la démocratie doive reposer sur elle.
    Quant au savoir, il est vrai que moins il y en a et que moins il est réparti, plus c’est facile de manipuler l’opinion.
    Dans un monde de lutte pour le pouvoir ce qui distingue les uns des autres ne sont pas les moyens mais les motifs.
    Les uns agissent par soif de gloire personnelle, y compris l’enrichissement monétaire.
    Les autres prétendent agir pour le bien commun, ce qui – nous explique Adam Smith – revient à être la même chose que pour les premiers.

  2. Posté par dominique degoumois le

    IL faut absolument voir sur youtube *devenir président et le rester* sur l’élection et surtout la REELECTION de mitterrand! Là hollande copie *le système Jacques Pilhan Gérard Colé*, mais vu la situation générale de l’Europe et du monde, il risque de faire choux blanc! Sur France Culture, la radio des élites manipulatrices, de 11/12 h, dans l’émission *Culture Monde* toute cette semaine est consacrée *aux droites dites extrêmes*! Et tout ce que vous dites plus haut est confirmé par l’ensemble de ces émissions! Et *Le bon plaisir* aussi sur youtube, film très moyen qui nous montre quand déjà en 1983, un mitterrand, très fatigué par le pouvoir et ses histoires de familles! On a même droit au vase brisé de l’Elysée, comme quoi l’histoire manque vraiment d’imagination!

  3. Posté par dominique degoumois le

    je regardais hier soir un reportage absolument Cash investigation France 2 Ces milliards de l’évasion fiscale! On voit d’anciens ministres français se laisser corrompre pour un repas gastronomique, amazone ne pas payer d’impôts en Europe, alors qu’elle ruine toutes les petite libraires et le petit commerce, et tous nos politiciens sont complices!

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