Crise économique en Allemagne : l’échec de l’éco-socialisme

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Longtemps présentée comme le moteur économique de l’Europe, l’Allemagne est désormais son maillon faible. En récession depuis deux ans, elle se situe dans la moyenne basse des pays de la zone euro en matière de croissance du PIB, à côté de l’Autriche, de la Lettonie et de l’Estonie. 

La production baisse dans le secteur manufacturier depuis 2020, que ce soit dans l’industrie manufacturière et minière (– 4,8 % en 2025), l’industrie chimique, la métallurgie ou l’industrie papetière (- 7,5 %). Les faillites sont, elles, en hausse continue depuis 2021 (+ 9,4 % en 2025 par rapport à l’année dernière), y compris au sein de fleurons de l’industrie allemande : Mayer & Cie, entreprise de 120 ans, a déposé le bilan ; le groupe Brüder Schlau est au bord de la faillite ; Gärtner Pötschke est en liquidation… Les plans de licenciements s’accélèrent dans d’autres entreprises : Lufthansa va réduire ses effectifs de 4 % d’ici 2030, Bosch, de 10 %, Ford abandonne ses projets dans les batteries de voitures électriques et licencie en conséquence… Le taux de chômage atteint 6,3 %, son plus haut niveau depuis dix ans. Comment expliquer cette situation ?

Un virage énergétique raté

Tout d’abord, l’Allemagne a connu une catastrophe énergétique en 2022. Jusqu’alors, les ménages, les entreprises et les industries profitaient d’une énergie bon marché grâce à l’importation de gaz russe. La construction du gazoduc Nord Stream 2 en 2018 avait pour but d’abandonner le charbon, mais aussi le nucléaire civil en vertu de l’Atom-Moratorium. L’Allemagne a en effet fait le choix d’investir massivement dans les énergies renouvelables (c’est la fameuse Energiewende ou « transition énergétique »). Elles représentaient 58 % de la production brute d’électricité et 55 % de la consommation intérieure brute en 2024.

L‘invasion de l’Ukraine a été le point de bascule : le gouvernement allemand a décidé de ne plus dépendre des combustibles fossiles russes. Contrairement aux autres pays côtiers de la mer Baltique, l’Allemagne n’avait pas construit de terminaux méthaniers ou GNL (gaz naturel liquéfié) pour compenser la baisse des importations russes. Le gouvernement n’a eu d’autre choix que d’importer de l’énergie beaucoup plus chère en provenance, notamment, de la Norvège, des Pays-Bas et de la Belgique. Le renchérissement des prix de l’électricité a empêché les entreprises de rester compétitives, surtout celles qui ont le plus besoin d’énergie pour produire (industrie chimique, métallurgique, verrière, papetière…). De ce fait, en 2025, 73 % des industriels allemands envisageaient de se relocaliser.

Ensuite, l’économie allemande subit une baisse de son secteur exportateur, alors qu’elle en dépend grandement (5,73 % du PIB en 2024) beaucoup plus que le Japon, la Chine, la France ou les États-Unis. Or, cette dépendance aux exportations la rend plus vulnérable aux baisses de la demande internationale. Ce second point est intimement lié au premier : les entreprises allemandes ont perdu en compétitivité dans la concurrence internationale et, depuis 2022, la Chine, principal pays importateur de l’Allemagne, a diminué ses importations, en particulier dans les machines industrielles et l’automobile. En parallèle, les entreprises chinoises font concurrence aux entreprises allemandes en inondant les marchés européens, en réponse aux droits de douane américains.

Endettement et dérive budgétaire

Pour investir massivement dans la défense et les infrastructures, le gouvernement a décidé d’aggraver l’endettement du pays, en rupture totale avec sa doctrine budgétaire traditionnelle. La règle d’or budgétaire, jouant un rôle de frein à l’endettement (Schuldenbremse) et inscrite dans la Constitution allemande en 2009, a été réformée par le Bundestag le 18 mars 2025. Désormais l’Allemagne veut investir massivement et recourir à l’emprunt. Une réforme, soutenue par la CDU/CSU et le SPD, prévoit, entre autres, la création d’un fonds spécial de 500 milliards d’euros sur douze ans pour les infrastructures et la « protection » du climat.

Ainsi, en septembre 2025, le quotidien allemand Bild titrait : « Les finances de l’Allemagne sont au bord du gouffre ! », en référence à un rapport rendu par la Cour fédérale des comptes sur le budget 2026. Près d’un euro sur trois sera dépensé « à crédit », ce qui signifie que la Fédération « n’est plus en mesure de financer durablement les missions essentielles de l’État à partir de ses recettes ». Friedrich Merz, le chancelier allemand, et Lars Klingbeil, le ministre des finances, ont l’intention de contracter 851 milliards d’euros de dettes supplémentaires d’ici 2029, alors que la dette fédérale a déjà augmenté de 46 % depuis 2020. Pour la Cour fédérale des comptes, le danger de ces nouvelles dettes est une « augmentation considérable des dépenses d’intérêts » : un euro sur huit provenant des impôts pourrait être consacré au paiement des intérêts en 2029. Certes, la dette publique allemande est relativement maîtrisée par rapport aux autres pays européens : 62,5 % du PIB en 2024, contre une moyenne de 81 % du PIB au sein de l’UE (c’est 82,1 % du PIB en Finlande, 101,8 % du PIB en Espagne et 113 % du PIB en France). Le danger, c’est que l’Allemagne s’installe durablement dans une logique keynésienne, au risque de déstabiliser le modèle européen de rigueur budgétaire et de miner la crédibilité du pacte de stabilité des pays de la zone euro.

La fin du modèle allemand ?

L’Allemagne paie aujourd’hui les conséquences de l’éco-socialisme, qui a consisté à affaiblir sa souveraineté énergétique au nom d’idéaux d’inspiration écologiste. Le choix idéologique d’abandonner le nucléaire – pourtant 40 fois moins émetteur de CO2 que le gaz – s’est transformé en suicide industriel. Cette crise n’est pas conjoncturelle ; elle est le résultat d’une décennie d’erreurs politiques.

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2 commentaires

  1. Posté par antoine le

    ”Cette crise n’est pas conjoncturelle ; elle est le résultat d’une décennie d’erreurs POLITIQUES.”
    Merci qui ?
    La Mutti Mme Merkel et les verts de gris, verts pastèques (communistes) !

  2. Posté par Radar le

    Les effets les plus évidents des décisions désastreuses imposées par l’UE sont maintenant abordés.

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