[...] calculé par Kepios, un cabinet spécialisé dans les usages numériques, a progressé de 3,7% en un an, précise ce rapport édité par l’agence We are social et l’entreprise Meltwater.
Dans le même temps, l’augmentation de la population mondiale sur un an est restée inférieure à 1%. Le nombre de socionautes se rapproche ainsi de celui des internautes, qui représentent au moins 64,5% de la population mondiale (5,19 milliards), mais la croissance a fortement ralenti depuis la pandémie de Covid-19.
Global users now stand at 4.88 billion, which equates to just over 60% over the world’s total population. The average daily time spent using social media has hit two hours and 26 minutes, an increase of 2 minutes per day from Q4 2022. pic.twitter.com/oe6iJTSXxj
— We Are Social (@wearesocial) July 20, 2023
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article complet: https://www.letemps.ch/monde/plus-de-60-de-la-population-mondiale-est-presente-sur-les-reseaux-sociaux
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Le temps passé des temps modernes L'intimité mise à mort
À l’ère des réseaux sociaux, le désir d’apparaître pour être quelqu’un a pris le pas sur la pudeur. Quand ce ne sont pas les individus eux-mêmes qui arrachent le rideau protecteur, des malveillants s’en chargent.
[...] Mila, lycéenne aux cheveux bleutés, apparaît dans une vidéo et se met à converser avec quelques-uns de ses 9 000 abonnés. Un internaute lui fait alors des avances. Elle le rembarre. Le « live » se poursuit. À un autre abonné, elle confie qu’elle est lesbienne. Le soupirant éconduit voit rouge. Il la traite de « sale pute » et l’insulte au nom d’Allah. [...] Pour bien montrer qu’elle fait fausse route et que l’islam n’est qu’amour, on lui promet les feux de l’enfer. Dans une seconde vidéo postée le jour même, Mila, nullement impressionnée, persiste : « Votre religion, c’est de la merde. Votre Dieu, je lui mets le doigt dans le trou du cul. Merci et au revoir. »
Dans l’univers où chacun peut créer sa propre Stasi, les non-paranoïaques sont des inadaptés sociaux
Le client islam est roi
En réponse à cet adieu retentissant, diffusé partout sur la Toile, elle reçoit un tombereau de menaces et d’injures : « On va te retrouver et t’égorger, sale chienne ! » ; « sale française de merde » ; « t’es morte, on sait où t’habites » ; « si je te croise dans la rue, je vais te faire avaler tes organes ». [...]
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[...] Garants de la convergence des luttes, les grands hebdomadaires culturels de la gauche progressiste ont choisi de détourner les yeux et le site Mediapart (érigé en idéal dans toutes les écoles de journalisme) a publié une longue enquête sur les dérives sexistes et « LGBT-phobes » des chroniqueurs de l’émission phare de France Inter « Le Masque et la Plume ». Tout rentrait dans l’ordre : au procès permanent des phobies, le mâle blanc occupait seul le banc des accusés.
[...] La liberté d’expression est une conquête de la civilisation. Dans l’expression « Votre Dieu, je lui mets le doigt dans le trou du cul », la décivilisation est à l’œuvre. La vulgarité peut être roborative, mais le degré zéro de la parole articulée ne mérite pas le qualificatif de vulgaire. S’exprimer en public, ce n’est pas se lâcher, c’est, non pour se censurer, mais pour se grandir, parler sous le contrôle du surmoi. [...] si la langue la plus bêtement scatologique est désormais l’idiome distinctif des « gamines » et des « gamins » de 16 ans, alors il faut, de toute urgence, refaire un surmoi aux jeunes générations et remettre à l’honneur une notion que l’école républicaine et la bourgeoisie ont entraînée dans leur chute : bien élevé. Pour transgresser vraiment les règles de la bienséance, encore faut-il les avoir apprises.[...] De nos jours, l’informe règne et il s’étale. L’espace public n’a plus d’existence propre. Comme tant d’autres, Mila dit tout, indistinctement et sans jamais changer de registre, à tout le monde. Car pour vivre heureux dans le nouveau monde, on a cessé de vivre caché, on se montre, au contraire, on s’exhibe, [...]
La pudeur, notion-clé des Temps modernes européens, comme le rappelle Kundera dans Les Testaments trahis, c’est la liberté de n’être pas vu. Rien à voir avec la pruderie. La pudeur n’exclut pas l’impudeur d’Éros, elle le met à l’abri des regards étrangers : « Pudeur : réaction épidermique pour défendre sa vie privée, pour exiger un rideau sur une fenêtre, pour insister afin qu’une lettre adressée à A ne soit pas lue par B. L’une des situations élémentaires du passage à l’âge adulte, l’un des premiers conflits avec les parents, c’est la revendication d’un tiroir à clé pour ses lettres et ses carnets : on entre dans l’âge adulte par la révolte de la pudeur. »
On y entre maintenant en ouvrant le tiroir et en affichant tout ce qu’il contient sur Facebook ou sur Instagram. À la place de la clé, l’écran. « Le privé et le public, ajoute Kundera, sont deux mondes différents par essence et le respect de cette différence est la condition sine qua non pour qu’un homme puisse vivre en homme libre ; le rideau qui sépare ces deux mondes est intouchable et les arracheurs de rideaux sont des criminels. »
[...]... il nous incombe, pour ne tomber dans aucune machination, d’être constamment sur nos gardes. Dans l’univers où chacun peut créer sa propre Stasi, les non-paranoïaques sont des inadaptés sociaux. Il faut être malade pour ne pas se sentir épié. La méfiance généralisée devient le ciment du vivre-ensemble.Saccagée quand elle n’est pas sacrifiée par ses bénéficiaires, l’intimité subit une double mise à mort. Il n’en restera bientôt qu’un pâle souvenir.
https://www.causeur.fr/finkielkraut-mila-blaspheme-benjamin-griveaux-173754
Et vous, qu'en pensez vous ?