Il était une fois, dans une manifestation contre la réforme des retraites, une dame cégétiste qui s’exprimait devant une forêt de micros. Une jeune journaliste qui se tenait à son côté en vint à lui poser une question. La dame cégétiste regarda le micro, échafauda en hésitant quelque peu une esquisse de réponse, s’entendît mentionner le fait que le micro était celui de la chaîne honnie CNews (à ses yeux d’extrême droite, raciste, homophobe, anti-pauvres, etc, etc, etc.), et fit cette réponse merveilleuse :
« Je ne souhaite pas répondre à CNews. Parce que je ne vais pas sur vos plateaux. Je m’adresse à tous les médias qui garantissent la liberté d’expression et la pluralité. »
Passons sur le fait que l’élection de Sophie Binet, puisqu’il s’agit d’elle, nouvelle secrétaire générale de la CGT se disant écologiste et féministe, en remplacement de Philippe Martinez, sa grosse moustache, ses merguez tièdes et ses gros bras de la CGT qui fleuraient bon le syndicalisme à l’ancienne, en disent plus long sur l’évolution de la gauche vers les luttes intersectionnelles que dix thèses universitaires.
Mais arrêtons nous sur cette rhétorique qui, elle, dit tout de ce qui tient lieu de dénominateur commun à la gauche française d’aujourd’hui.
On lui tend un micro qu’elle rejette, mais c’est le micro qu’elle accuse de rejeter le pluralisme. Plus c’est gros, plus ça passe.
À radio France, les « humoristes » font profession d’insulter Marine Le Pen, la Manif pour tous, Nadine Morano ou Zemmour, on n’entend des voix de droite qu’au nom de l’égalité du temps de parole ou invitées en tant que bizarreries surnuméraires.
Dans les universités, c’est au nom de la tolérance qu’on interdit de conférences des intellectuels ayant le malheur d’être à la droite de Yannick Jadot ou d’avoir déjà accordé une interview au Figaro.Dans la culture, la critique persécute le film aux 200 000 entrées du Puy du fou en même temps qu’elle encense des navets pro-migrants sans public mais financés au biberon des subventions publiques.De l’autre côté, à CNews, on peut voir des membres de l’aile radicale de la CGT, des macronistes, la CFTC, d’anciens socialistes. Tout comme on peut lire dans Valeurs actuelles, journal lui aussi accusé par cette même gauche radicale, Manuel Valls, Alexis Corbière, Marlène Schiappa, Emmanuel Macron, Jean-Christophe Cambadélis, etc.
Anecdote personnelle: Valeurs actuelles organise, dans quelque jours, la deuxième édition de son « grand débat ». Parce que nous pensons qu’il est plus intéressant de débattre avec des contradicteurs que de causer dans l’entre soi, nous avons invité plusieurs dizaines de personnalités de gauche à venir croiser le fer sur la scène du Palais des Sports. Certains n’ont jamais répondu. D’autres ont posé des questions, discutaillé, ont longuement hésité, avant de décliner. Certains ont été à un demi doigt d’accepter avant de renoncer. Par peur des réactions dans leur camp, souvent.
On ne dira jamais assez, à l’aune de ces histoires, que la gauche est plus que jamais le camp de l’intolérance, du sectarisme, du deux poids deux mesures, de l’autosatisfaction, de la consanguinité idéologique et auto reproductrice. Jusqu’à la nausée.
Mais si les gauchistes ne se remettent à ce point jamais en question, s’ils continuent à refuser certains micros, c’est qu’ils savent qu’ils ont table ouverte ailleurs, dans les journaux subventionnés, sur le service public, ou on leur déroule le tapis rouge. Pour sa première interview de nouvelle patronne de la CGT, Sophie Binet s’est invitée sur France Inter où elle a pu dérouler sa logorrhée sans interruption, vêtue d’un tee-shirt orné d’une inscription en soutien aux grévistes de la station… Briser le monopole idéologique de la gauche médiatique est un combat vital pour l’avenir du pays. Peut-être même la mère des batailles. |
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Geoffroy Lejeune, 08.04.2023
Directeur de la rédaction de Valeurs actuelles |
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