La diplomatie française continue de faire la leçon au dirigeants du Liban en crise politique et économique. En visite à Beyrouth le 7 mai, le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a menacé les responsables politiques libanais de sanctions afin, selon lui, de prévenir un «suicide collectif» pour le pays.
«Il est en effet urgent de sortir de l'impasse politique dans laquelle le pays se trouve», a déclaré Jean-Yves Le Drian à des journalistes, avant de quitter Beyrouth après sa visite de deux jours. «A ce jour, je constate que les acteurs politiques n'ont pas encore assumé leurs responsabilités et ne se sont pas encore mis à travailler sérieusement au redressement rapide du pays», a fustigé le ministre français. «Je suis là précisément pour éviter cet espèce de suicide collectif organisé par certains», a-t-il ajouté.
Le chef de la diplomatie française qui compare souvent le Liban à un «Titanic sans orchestre», a rencontré le 6 mai le président libanais Michel Aoun, le chef du Parlement Nabih Berri et le Premier ministre désigné Saad Hariri. «S'ils n'agissent pas dès aujourd'hui dans un sursaut responsable, ils devront assumer les conséquences de cet échec», a-t-il averti. Paris a récemment adopté des restrictions d'accès au territoire français à l'encontre de personnalités libanaises jugées responsables du blocage, sans toutefois dévoiler leur identité. «Si le blocage persiste, ces mesures pourront être durcies ou étendues», a averti Jean-Yves Le Drian tout en prévenant qu'«elles pourront aussi être complétées par les instruments de pression dont dispose l'UE», sans plus de précisions.
Le ministre français a également rencontré les représentants de plusieurs partis d'opposition qui veulent resserrer les rangs face aux barons de la politique, jugés corrompus et incompétents.
La diplomatie française chez elle au Liban ?
Ce n'est pas la première fois que la France hausse le ton vis-à-vis des dirigeants libanais. Que ce soit Emmanuel Macron ou son ministre des Affaires étrangères, le gouvernement actuel est souvent accusé d'ingérence dans l'ancien protectorat français. La visite d'Emmanuel Macron au Liban le 6 août, au surlendemain des explosions meurtrières à Beyrouth, a par exemple fait l'objet de critiques de la part de responsables et commentateurs politiques, qui ont vu dans certains des propos du président une forme d'ingérence.
Même chose pour Jean-Yves Le Drian qui n'a eu de cesse de tancer les dirigeants libanais. En juillet 2020, il s'était notamment illustré par une leçon de morale aux autorités libanaises en matière de lutte contre la corruption. Risquant une analogie pour le moins osée, le ministre français avait déclaré : «Vous connaissez l'expression française qui dit "aide-toi et Dieu t'aidera", ce que j'ai envie de dire aujourd'hui aux responsables du Liban c'est "aidez-vous et la France et ses partenaires vous aideront".»
Le Liban connaît une dépréciation historique de sa monnaie. Plus de la moitié de ses habitants vivent aujourd'hui sous le seuil de pauvreté, selon l'ONU. Sa situation économique déjà complexe a été aggravée par les effets de la pandémie et par l'explosion meurtrière survenue dans le port de Beyrouth le 4 août 2020. L'explosion de la pauvreté et du chômage, l'érosion du pouvoir d'achat et la précarisation provoquent la colère de l'opinion publique, avec des manifestations et des blocages de routes réguliers.
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