Samedi, Emmanuel Macron était sur la chaîne de télévision du Qatar, Al Jazeera, média incontournable dans le monde arabe. Al Jazeera revendique près de 40 millions de téléspectateurs. Macron a donc tenté d’expliquer ce qu’était, selon lui, la laïcité à la française. Mais il est bien tard pour redresser la barre : l’hôte de l’Elysée est désormais détesté par 2,8 milliards d’êtres humains, qui confondent allègrement dans une même haine Charlie Hebdo, la chrétienté, la France. Merci, président.
En 2015, Présent titrait « Nous ne sommes pas Charlie », ce qui avait parfois suscité l’incompréhension voire l’indignation chez ceux qui n’avaient jamais ouvert Charlie. Bien évidemment, il ne s’agissait pas de manifester une quelconque indifférence devant le massacre de ces dessinateurs dont certains (on pense notamment à Cabu) étaient talentueux. Et ce n’est pas à des partisans de la peine de mort pour les terroristes et quelques autres qu’il faut venir donner des leçons de résistance face à la déferlante islamiste.
Mais la culture du blasphème, très peu pour nous. Bruno Gollnisch le rappelait encore la semaine dernière dans les pages de Présent. Cela fait cent ans et plus que les chrétiens la subissent en France, et depuis bien plus longtemps en terre islamique.
Macron, réalisant les dégâts de son positionnement dans cette affaire, l’image détériorée de la France en Afrique et en Orient, a donc voulu « lever des malentendus », « rétablir une certaine vérité ». Mais qu’il regarde peut-être d’abord quelle est sa part dans les désordres dont il se plaint, selon la formule de Freud. Car enfin peut-on proclamer comme il l’a fait que la France a commis des crimes contre l’humanité en terre d’islam et déplorer une image dégradée de la France dans ces mêmes régions ? Peut-on faire constamment repentance (colonialisme, esclavage, etc.) avec une mémoire hémiplégique et s’étonner que ces pays en viennent à nous détester ?
Nous n’étions pas Charlie, Macron l’était
Sur les caricatures obscènes de Mahomet (et de Benoît XVI ou de Jésus, au passage), était-il nécessaire que, au-delà de la stigmatisation des criminels islamistes, le gouvernement les reprenne en quelque sorte à son compte ? Nous n’étions pas Charlie. Macron l’était, il en paye le prix aujourd’hui. Il s’est défendu à Al Jazeera d’être à l’origine de la publication des caricatures, comme de leur rediffusion, mais cette utilisation dans les écoles, pour illustrer la liberté d’expression, a bien été autorisée, et même favorisée, par les pouvoirs publics. Et quand, dans son discours d’hommage à Paty, il s’est écrié : « Nous ne renoncerons jamais aux caricatures », beaucoup de musulmans ont cru entendre : « Nous soutenons ces caricatures blasphématoires ». Devant les caméras d’Al Jazeera, Macron a laborieusement expliqué qu’il n’était pas (ni son gouvernement) à l’origine de ces caricatures, mais il faut maintenant en convaincre des pays entiers, et même des chefs d’Etat, tel Erdogan pour qui les engagements macronistes en soutien à ces caricatures ont été du pain bénit.
En revanche, on ne peut que suivre le chef de l’Etat quand il explique qu’en France les femmes ne sont pas des êtres inférieurs, et que « les gens qui croient ça, qu’ils aillent le faire ailleurs, pas sur le sol français ». Mais à la vérité, sur cette voie de bon sens, nous l’avions précédé.
L’audience de l’émission a été importante. Cela sera-t-il suffisant pour calmer les fanatiques ? Nous n’en sommes pas encore là. •
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