A l'heure où Google et Apple vont s'allier pour permettre le traçage numérique des personnes infectées par le coronavirus, l'application de messagerie Signal, qui fonctionne par un chiffrement des données de bout en bout, a des priorités bien différentes. Dans un post de blog publié sur le site de Signal, Joshua Lund, un des développeurs de cette application à but non lucratif, a ainsi fait part de sa vive inquiétude quant au projet de loi EARN IT (Eliminating Abusive and Rampant Neglect of Interactive Technologies), proposé par le sénateur républicain Lindsey Graham au Congrès américain.
Derrière l'objectif louable de lutter contre la diffusion en ligne d'images pédopornographiques, le projet de loi entend en effet poser des conditions aux plateformes pour qu'elles puissent profiter de l'article 230 du Communications Decency Act, dont elles bénéficient actuellement. Cet article exempte les plateformes en ligne de toute responsabilité légale quant au contenu publié par leurs utilisateurs.
«Ce que le projet de loi propose est un système dans lequel les entreprises doivent gagner la protection de l'article 230 en suivant un ensemble de "bonnes pratiques", dont il est extrêmement improbable qu'elles permettent le chiffrement de bout en bout», s'alarme Joshua Lund. Le chiffrement de bout en bout permet de protéger le contenu d'une communication de toute personne autre que l'expéditeur ou le destinataire.
Une disposition essentielle aussi bien pour la «sécurité nationale» que pour «la vie privée des citoyens de part le monde» selon Joshua Lund, qui rappelle qu'un bataillon de l'armée américaine a recommandé à ses troupes d'utiliser l'application, qui fait par ailleurs le bonheur de certains élus. D'autant que d'après lui, cette loi n'aurait aucun effet sur les personnes se livrant à ce genre d'activités criminelles : «Les criminels continueront simplement à utiliser des logiciels largement disponibles (mais moins pratiques) pour passer à travers les mailles du filet, et continuer à avoir des conversations cryptées.»
Pour Joshua Lund l'équation est simple, une telle loi menacerait l'existence de Signal sur le sol américain. «Les géants de la technologie pourraient hypothétiquement assumer l'énorme fardeau financier de la gestion de centaines de procès s'ils devenaient soudainement responsables des propos de leurs utilisateurs. Mais il ne serait pas possible pour une petite organisation à but non lucratif comme Signal de continuer à opérer aux Etats-Unis», conclut-il.
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