Les Suisses ont voté dimanche pour élire les membres du Conseil national, équivalent de notre Assemblée nationale. L’UDC, le parti de droite suisse (qualifié d’« extrême droite » en France, et de « conservateur » en Suisse), ne tournait pas autour du pot : ses placards publicitaires représentaient une pomme aux couleurs de la Suisse, rongée par des vers, avec ce message : « Allons-nous laisser la Suisse se faire dévorer par les gauchistes, les bien-pensants et les proeuropéens ? » Il faut croire que les Suisses craignent assez peu le « danger » gauchiste et pas du tout le danger « proeuropéen ». Les élections ont en effet été marquées par un recul de l’UDC, passée de 30 à 26 % des voix. Au profit du centre ou des socialistes ? Non, les gagnants sont les écologistes, qui ont doublé leur score.
L’un de nos lecteurs suisses (ils sont assez nombreux, au pays de Guillaume Tell) nous donne une explication : c’est la peur qui a fait voter écolo. Peur du « fascisme » ? du « populisme » ? Non, peur de voir la neige disparaître de leurs montagnes et, avec elle, les revenus tirés du tourisme, du ski. Mais notre correspondant nous rassure ; ce vote qui a fait passer les écolos de 10 % à 20 % des voix ne résistera pas aux solutions aberrantes qu’ils préconisent : « hausse du prix du carburant, taxe sur les voyages en avion, politique anti-armée, pression sur le trafic automobile ». D’autant que la fonte des neiges ne doit pas grand-chose aux Suisses eux-mêmes. Le discours écolo risque néanmoins de les influencer dans le domaine sociétal, et notamment la démographie. Interpellant les électeurs verts, notre correspondant constate : « Vous préférez ne pas avoir d’enfants car ce n’est pas bon pour la planète. Mieux vaut utiliser des moyens contraceptifs sûrement plus écolos […]. Mais est-ce bien naturel de court-circuiter la nature que vous défendez tant ? » Et notre correspondant de conclure : « L’écologie de bon sens, c’est une politique plus patriotique et conservatrice. Il y a quelques exemples simples et concrets : limiter l’immigration […], avantager les couples mariés avec des enfants, car plus tard ces enfants seront des entrepreneurs, des salariés, etc., qui feront tourner l’économie du pays […]. En consommant local et non du “bio” de pays lointains. »
Le relatif succès des écolos menace-t-il les valeurs traditionnelles qui font le charme de la Suisse ? Sans doute pas. D’abord parce que cette progression s’est faite pour partie, comme en France, au détriment d’un PS qui recule ici à 16,6 %. Ce vote reflète donc moins un progrès de la gauche qu’une forme de rejet de l’idéologie, à gauche. Ensuite parce que le courant écolo suisse s’incarne à travers deux partis : les Verts, qui ressemblent aux nôtres (13 % des voix), et les Vert’libéraux (8 %) qui, comme leur nom l’indique, n’ont guère de rapport avec le gauchisme.
En outre, remarque notre avisé correspondant, « malgré cette vague écolo, Dieu merci ! l’UDC reste le premier parti du pays », avec 53 élus sur 200 sièges. Par ailleurs, dans le système politique suisse, très proportionnel, l’UDC, les libéraux et les socialistes détiennent en principe chacun deux ministères, et le parti chrétien un ministère. Pour changer cette règle, fruit d’un compromis vieux de 60 ans, il faudrait une persistance et même une accentuation des évolutions électorales. Nous n’y sommes pas. •
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