Trump rencontre Poutine

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De notre correspondant permanent aux Etats-Unis. – Cela devait enfin arriver. Après cinq mois de supputations, d’hypothèses, de calculs sur un face-à-face entre Donald Trump et Vladimir Poutine, l’événement tant attendu par la presse et les gouvernements était programmé hier vendredi à Hambourg, en marge – très en marge – du G 20, le sommet économique des vingt pays les plus industrialisés du monde. Pour la première fois, les deux « grands » du monde occidental chrétien devaient se rencontrer, se mesurer, évaluer leurs forces et leurs faiblesses réciproques, plonger dans le regard de l’autre pour y découvrir l’ombre menaçante ou la lueur complice. Chaque geste, chaque mouvement, chaque pli de paupière a dû compter dans cette muette exploration mutuelle. Ceux qui ont vécu les 50 ans de guerre froide peuvent mesurer le chemin parcouru. Pour la première fois au cours d’un tel sommet, on ne dut parler ni de course aux armements massifs, ni de missiles balistiques intercontinentaux. On a l’impression que cette fameuse et interminable guerre froide s’est officiellement terminée hier.

Les griefs et les requêtes abondent sans doute des deux côtés, mais voyons plutôt ce qui rapproche les deux hommes. Ils ont prouvé l’un et l’autre qu’ils sont des patriotes, hostiles par tempérament aux injonctions de l’hydre globaliste. L’un et l’autre se disent partisans d’une consolidation de leur zone d’influence respective au sein d’un environnement stable, c’est-à-dire dépouillé de tout ferment belliqueux. Ni l’un ni l’autre, ennemis déclarés de l’Etat islamique, ne souhaite considérer la Syrie du président Assad comme une pomme de discorde qui viendrait empoisonner leurs relations. Des divergences existent entre les Etats-Unis et la Russie, mais nullement au point de dégénérer en réchauffement diplomatique, annonciateur habituel de bruits de bottes. Tout cela a dû être une question d’appréciation, de dosage entre l’Américain, maître incontesté du marchandage, et le Russe, champion reconnu de la manipulation. On pense à une partie de poker qui est bien davantage un jeu de personnes qu’un jeu de cartes.

La presse aux ordres a monté toute une campagne pour expliquer que cette rencontre était une nécessité (évidence) et qu’elle comportait un risque (truisme) compte tenu de l’inexpérience de Trump dans le domaine des contacts internationaux. Personne n’a mis en doute la nécessité d’un tel sommet et personne ne l’envisagea sans aucun risque. La presse aux ordres découvrit la lune mais c’était pour bien souligner que tous les conseillers de la Maison Blanche avaient vécu quelques journées d’angoisse avant le départ pour l’Europe. Une atmosphère minutieusement décrite qui servit à amplifier l’orchestration générale visant à déstabiliser le président. Est-il de taille à affronter Poutine ? A-t-il tous les dossiers en tête ? Ne va-t-il pas être emporté par son impulsion ? On nous décrivit Trump comme un homme vulnérable, prêt à exploser à la moindre secousse, alors qu’il a montré au cours de sa première tournée internationale au mois de mai qu’il savait de plus en plus se maîtriser.

En l’absence d’accords majeurs à signer, Trump et Poutine devaient se borner à étaler leurs atouts afin d’accorder un minimum de concessions. Qu’avaient-ils en tête, l’un et l’autre, comme sujets importants à débattre ? Trump voulait reprocher à son homologue ses ambitions annexionnistes en Ukraine et en Crimée, tandis que Poutine se promit de demander à son interlocuteur la levée des sanctions économiques dont souffre la Russie depuis qu’Obama décida de la punir pour ses aventures guerrières.

Il était question également que le Russe tente de persuader l’Américain de revenir sur la saisie ordonnée par le même Obama de deux parcs d’attractions appartenant à la Fédération, l’un situé dans l’Etat de New York, l’autre dans l’Etat du Maryland. Une saisie pour punir le Kremlin, cette fois pour avoir interféré dans l’élection présidentielle américaine de novembre 2016. On a sans doute parlé de cette interférence pour permettre à Poutine de la nier et à Trump de la minimiser : sa victoire doit rester sans tache, c’est-à-dire sans aide extérieure.

La Syrie, bien sûr, a dû être au centre des discussions. C’est par excellence le sujet brûlant. L’essentiel de la discorde concerne l’avenir du président Assad. Trump le voit condamné ; Poutine le veut conforté. A terme, Assad devra passer la main pour une restructuration durable de son pays. Mais quand ? Question de circonstances. Trump, ayant moins d’intérêts directs à défendre sur place, est plus pressé d’en finir. Poutine, ayant investi dans la région (bases militaires permanentes), est plus enclin à gagner du temps. On devait également aborder le problème des zones tampons, les risques de collisions aériennes. Trump a dû exiger de son interlocuteur qu’il empêche Assad d’utiliser ses obus chimiques contre des civils. A-t-il été aussi résolu lorsque l’on ouvrit le dossier de la Corée du Nord ? Sans doute pas. Le président chinois Xi vient de faire comprendre à Trump qu’il ne pouvait rien contre les missiles nucléaires de Kim. Poutine serait-il capable de jouer un rôle dans la péninsule ? La question reste en suspens. Les deux grands ont dû rencontrer à cette occasion leur talon d’Achille.

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