France et Allemagne jouent à « Je t’aime. Moi, non plus ». Wolfgang Schaüble avait pourtant joué les grands frères compatissants en disant : « la France doit poursuivre le chemin des réformes structurelles. Elle sait qu’elle a des coûts administratifs et du travail trop élevés. »
C’était plutôt sympathique de voir des réformes structurelles dans un brouet de contre-sens, de mesures complexes et de réformettes, assaisonné, il faut le dire, d’un net changement lexical présidentiel, qui permet de dire compétitivité ou entreprise privée, sans donner l’impression de proférer un gros mot. En bon professeur soucieux d’encourager un mauvais élève qui témoigne d’un peu de bonne volonté, l’Allemagne veut surtout que l’exécutif français prenne ses distances avec le discours idéologique et démagogique qui l’a amené au pouvoir et avec le Parti Socialiste. Celui-ci, comme un taureau harcelé par le picador gauchiste, continue bêtement à voir rouge. Certes, le PS aime l’Allemagne, mais pas les conservateurs allemands. Pas de chance : ils sont au pouvoir et comptent bien y rester. Alors, Ayrault twitte en allemand un mot doux pour Angela tandis que Hamon, toujours prêt à exhiber une intelligence qui devient légendaire, s’en prend à Merkel coupable, selon lui, de croire que l’austérité, çà marche. La confrontation souhaitée par Bartolone entre la France et l’Allemagne se produit, mais c’est entre les deux discours socialistes, celui des réalistes qui pensent que ce n’est pas parce qu’on a dit une chose pour accéder au pouvoir qu’il faut se priver de dire le contraire pour s’y maintenir et les doctrinaires, les obsédés de l’exception française, de la dépense publique improductive érigée en modèle. Pour dissimuler le changement de cap du pédalo présidentiel, il y a heureusement le brouillard des mots : croissance contre austérité. Dans le fond, l’opposition franco-allemande existe sur ces deux termes, et la division des socialistes se résume à une nuance dans le ton : dialogue franc et amical ou polémique.
Un allié vient au secours des Français : le nouveau gouvernement italien veut aussi en finir avec l’austérité de Monti. Mais il faut se souvenir que les mots dissimulent autant qu’ils révèlent. Lorsque Letta ferme la page de l’austérité, c’est pour ouvrir celle la baisse de la pression fiscale sans endettement, qui ne peut se concevoir qu’avec une diminution de la dépense publique. Ce n’est pas la voie choisie par l’exécutif français, et encore moins celle réclamée par le PS qui demande, comme d’habitude de faire payer par l’impôt des riches la réhabilitation de la dépense publique et l’allongement sine die du retour aux équilibres. La vraie frontière passe entre les pays du nord et ceux du sud de l’Europe. Au nord les bons élèves, les fourmis qui ont fait les réformes nécessaires à temps, dans l’Euroland ou en dehors, et au sud, les cigales qui sont entrées dans l’Euro avec leurs mauvaises habitudes, rachetées, dans le passé, en spoliant les épargnants par des dévaluations, devenues impossibles. L’écran protecteur de l’Euro s’est transformé en piège. Au nord un travail moins rémunéré pour une partie de la population. Au sud un chômage insupportable. Au milieu, la France, avec son secteur public démesuré, ses amortisseurs sociaux qui atténuent les symptômes mais l’empêchent de guérir. L’Espagne subit une cure drastique, mais voit son commerce extérieur s’améliorer. La France faute d’avoir su mettre en œuvre les réformes structurelles indispensables, voit les mauvais chiffres s’accumuler, alors que ses atouts géographiques, démographiques, culturels, ses infrastructures, sa réputation pourraient en faire aisément le champion européen.
L’Allemagne est aujourd’hui ce champion. Son chômage est à 5,4 % quand le nôtre est à 10,8%. 25% des jeunes Français sont touchés contre 7,7% des Allemands. La croissance allemande est depuis près de dix ans supérieure à la nôtre. Son industrie représente 21% du PIB contre 12 % en France, doublée par le Royaume-Uni. Son excédent commercial est de 190 Milliards d’Euros quand notre déficit, qui persiste de puis dix ans, est en 2012 de 67 Milliards. Les Allemands nous vendent 104 Milliards de marchandises et nous en achètent pour 64 Milliards. Ces résultats sont dus à des choix qui ont été faits avec courage de l’autre côté du Rhin et devant lesquels nous avons reculé. L’UMP ose aujourd’hui reprocher à la gauche d’en appeler à l’héritage, mais durant 10 ans j’ai entendu les gouvernements de droite critiquer les 35 heures et leurs effets sans qu’ils aient l’audace de les abroger ! L’Allemagne a tiré le bilan du recul de l’Europe et elle l’a fait alors même qu’elle devait supporter le poids de la réunification et de la parité du Mark.Elle bénéficie désormais d’un Mark avantageux qui s’appelle l’Euro. Elle a préservé son industrie avec un coût du travail à peine inférieur au nôtre, mais avec un rapport prix-qualité mondialement reconnu. Elle n’a pas hésité à décourager le chômage et à baisser le pouvoir d’achat des salaires dans les services. Elle a choisi le travail. La France, de gauche comme de « droite » a choisi le chômage et l’assistance. Alors, plutôt que de se battre sur les mots, il faut maintenant décider : ou quitter l’Euro et restaurer notre compétitivité grâce à une monnaie dévaluée, soit baisser le coût du travail par une série de vraies réformes structurelles qui comprendront nécessairement la TVA sociale, le système des retraites, la remise en cause du mille-feuille administratif. La droite, hyper-majoritaire pendant de longues années n’a pas eu le courage de le faire. Peut-on raisonnablement imaginer qu’un exécutif de gauche, revenu à la raison, puisse le faire ?
Christian Vanneste
Je ne vois pas le rapport entre le cout du travail et les 35 heures….. Tout le mondre met en cause les 35 heures.
Mais la compétitivité, c’est le cout horaire, pas le temps de travail.
Plutot que de partager la richesse, ne faudrait-il mieux pas partager le travail ?
A l’appuis de mon propos voici une citation:
“Il est une chance que les gens de la nation ne comprennent pas notre système bancaire et monétaire. Parce que si tel étais le cas, je crois qu’il y aurait une révolution avant demanin”. Henry Ford.
Vu sur le site http://www.comprendrelargent.com