Christophe Bouillaud analyse les conséquences politiques en France du Brexit. Selon lui, c'est le FN qui en profite. Christophe Bouillaud est professeur agrégé de science politique à l'Institut d'Études politiques de Grenoble depuis 1999, agrégé de sciences sociales (1988), ancien élève de l'Ecole normale supérieure.
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Christophe Bouillaud (extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page) : Le Front National est de facto le grand gagnant du Brexit, car il est cohérent face aux événements qui se déroulent au Royaume-Uni. Alors même qu'il n'est pas obligé d'être en alliance avec d'autres mouvements dans la mesure où le Front national adopte une ligne nationaliste, il parvient à obtenir des soutiens d'autres partis européens. Une sorte d'Internationale des nationalistes est en train de se former. Il bénéficie aussi énormément des choix des autres partis français qui, faute de crédibilité de leur propre discours sur l'Europe, sont obligés de se rapprocher de la ligne frontiste. La droite tend ainsi à valider le discours eurosceptique.
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Le FN gagne surtout en crédibilité, car l'histoire semble se dérouler comme il l'avait prévu. Jusque dans les moindres détails. Regardez par exemple le vote britannique des classes populaires en faveur du Brexit, celui-ci valide le clivage frontiste du peuple contre les élites. C'est vrai que ses adversaires vont attribuer tous les malheurs du Royaume-Uni à ce choix populaire et que le FN n'aura d'autre choix que d'assumer jusqu'au bout ce soutien au Brexit, quoiqu'il advienne. En même temps, c'est une arme à double tranchant pour la gauche et la droite, car aujourd'hui, on ne sait rien de l'issue finale du Brexit, notamment en matière économique.
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Loin des catastrophes annoncées, on peut parfaitement imaginer que la situation britannique s'améliore. Ce serait alors un succès considérable pour le Front national. On parle à chaud de baisse de la livre sterling, de la bourse de Londres, etc. mais ce sont des réactions épidermiques et instantanées. En réalité, les économies bougent de façon beaucoup plus lente que ça. Ce qui compte au Front national, c'est de continuer à tenir un discours qui soit validé petit-à-petit par l'histoire. C'est en tenant la plume du débat européen, en imposant aux autres partis de se positionner, que Marine Le Pen compte avancer.
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L'euroscepticisme frontiste, qui n'a pas toujours existé, et qui tend en plus à se transformer en europhobie ou indépendantisme à la façon UKIP, s'est révélé être un excellent investissement de long terme au point que le Front national dispose en la matière d'un quasi-monopole auprès des électeurs. Le souverainisme de droite reste extrêmement limité autour de Nicolas Dupont-Aignan, tandis qu'à gauche, le souverainisme de Jean-Luc Mélenchon est extrêmement jeune, consécutif à ses déboires post-2012. C'est une certitude aujourd'hui: tous les ennuis de l'Europe sont des atouts pour le Front national,, conclut Christophe Bouillaud (fin des extraits adaptés ; voir lien vers source en bas de page).
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Adaptation et mise en page de Michel Garroté
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http://www.lefigaro.fr/vox/
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Rectification: la baisse de la bourse de Londres a été suivie d’une hausse qui a dépassé tout ce qui c’est passé depuis plusieurs mois et même après l’annonce fantaisiste de l’échec probable du Brexit. Il s’agit donc bien d’une intox pour disqualifier le Brexit. Quant à la chute de la £ivre elle est bienvenue puisqu’elle compensera largement plus que les droits de douanes qui seront exigibles par l’U.E. et favorisera l’économie anglaise.
Si Boris Johnson s’est débiné, c’est que le coup était prévu depuis longtemps, pour favoriser ceux qu’on essaie de nous imposer parce qu’ils sont comme par hasard anti-Brexit. Dès que j’ai vu Boris Johnson, j’ai tout de suit compris qu’il y avait anguille sous roche. Il ressemblait un peu trop à Rob Ford, l’ex-maire de Toronto… récemment décédé. Donc le complot anti-Brexit était préparé de longue date par des forces osbcures que je n’ai pas encore eu le privilège d’identifier. Mais j’espère que d’autre plus connaisseurs le feront à ma place.
Imaginez-vous M. Blocher et l’UDC démissionner après le Non à l’UE en décembre 1992?
Je pense, au contraire, que les chefs de file du “Brexit” (Johnson, Farage) ont atteint leur but : sortir du conglomérat européen, et laissent sagement la société civile s’organiser de manière libérale pour recouvrer les réflexes de l’indépendance nouvelle. Pour cette tâche nouvelle, il n’y a pas besoin de “leaders” (ou Guides). Évidemment, nous ne sommes pas habitués à cela, surtout dans un pays jacobin comme la France et dans une Europe totalitaire.
Certes, dans un premier temps, le Brexit peut s’avérer bénéfique pour Marine Le Pen. Cependant, j’ai quand même quelques craintes que la situation ne se retourne contre elle et contre nous, les eurosceptiques des autres pays: avec D. Cameron qui ne veut pas gérer la sortie de l’Europe, avec B. Johnson qui s’esquive des charges auxquelles on le voyait destiné et avec N. Farrage qui démissionne de l’UKIP, c’est comme une baudruche qui se dégonfle… Au lieu d’assumer droit dans leurs bottes, les tenants du “Leave” se dérobent et ne proposent rien tandis que les médias et les élites se déchaînent contre le résultat du référendum. Y a-t-il d’autres observateurs que ces faits laissent également perplexes? J’apprécierais de lire vos avis.