« Pourquoi encore en parler ? C’est derrière nous » : 10 ans après les attentats du 13 Novembre, des habitants de Molenbeek (Belgique) se disent toujours victimes de stigmatision et appellent à tourner la page

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Dès le 14 novembre 2015, les enquêteurs suivent la trace de Salah Abdeslam vers la Belgique. Il a réussi à convaincre deux connaissances de venir le chercher en voiture à Paris. Le terroriste est arrêté en mars 2016 à Molenbeek-Saint-Jean. Avec une des plus fortes densités de population de la capitale belge, Molenbeek reste une des plus pauvres des 19 communes de Bruxelles. Plusieurs des terroristes de Paris en sont originaires ou bien y ont séjourné. (…)

RFI

Dans la cour du Foyer, à Molenbeek, Bachir M’rabet salue les jeunes qui passent avant de lâcher, dans un soupir : « Pourquoi faut-il encore parler des attentats ? La presse, comme certaines personnes qu’on croise, aime nous le rappeler. Mais c’est derrière nous maintenant, il faut avancer. » Educateur et coordinateur au sein de l’ASBL depuis 40 ans, il dit tout haut ce que beaucoup ici ressentent tout bas : la lassitude d’une commune qu’on résume trop souvent à ses blessures passées. (…)

Ayoub Ben Abdeslam et Bachir M’rabet, deux générations d’éducateurs à Molenbeek, unies par la même volonté de tourner la page des attentats.

Ayoub Ben Abdeslam, 30 ans, homologue néerlandophone de Bachir, parle avec calme, mais une certaine forme de saturation se lit dans ses yeux. « Je ressens de la frustration à l’idée de parler des attentats », confie-t-il. « J’ai l’impression encore de devoir me justifier alors que je n’ai rien à voir avec ce qu’il s’est passé. » (…)

« Je redoutais ce moment, j’ai tenu plusieurs jours avant de dire que je venais de Molenbeek. Ce n’était pas simple. Certains comprenaient immédiatement à l’évocation du nom, d’autres pas. Je craignais d’être pointé du doigt ou catégorisé à cause de mon origine… Sans parler de mon nom de famille. Très souvent, on me demandait si j’avais un lien avec Salah Abdeslam. » (…)

« Il y a une sorte de fantasme autour de ce qu’est Molenbeek », reprend Bachir. « Les plus jeunes n’ont pas la même conscience de ce que nous avons vécu. » Reda et Chedia font partie de cette génération-là. Tous deux ont grandi ici, entre les murs du Foyer. En 2015, ils avaient 11 ans. Trop jeunes pour comprendre, assez grands pour sentir que quelque chose basculait. « Je me souviens d’une atmosphère bizarre », raconte Chedia. « Je voyais mes proches inquiets sans savoir pourquoi. Je comprenais que quelque chose de grave se passait, mais pas à quel point. C’est plus tard que j’ai ressenti les préjugés, le regard des autres. Une communauté a clairement été pointée du doigt. C’est difficile à effacer. Même si je n’y pense jamais. » (…)

Assis sur un banc dans la cour intérieure, Fares revient saluer son ancien éducateur. Il avait 16 ans en 2015. « Avant les attentats, on se sentait libres », dit-il doucement. « Aujourd’hui, cette liberté, on ne la connaît plus vraiment. Nos parents n’osaient plus nous laisser sortir… C’était parce que les auteurs étaient des visages connus du quartier. Il y a eu un vrai climat de méfiance qui s’est installé. » Fares ne cache pas qu’il a longtemps voulu fuir Molenbeek. « L’image de la commune ne me correspond pas. » Il laisse échapper un petit rire amer : « Au début, j’essayais de montrer que c’était autre chose. Mais il faut toujours lutter contre les préjugés… et c’est épuisant à la longue. »

Le Soir Belgique

 

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