En vue d’apporter des changements au système de justice pénale canadien, le ministère de la Justice a récemment publié un rapport portant sur une stratégie en matière de justice pour les personnes noires.
Produit par « neuf experts et dirigeants des communautés noires », ce document nous apprend dans l’introduction que notre système judiciaire a été conçu pour nuire aux personnes noires — rien de moins — et demande au bas mot l’instauration d’un système de justice à géométrie variable. Le citoyen ordinaire est-il bien conscient de ce que mijote son ministère de la Justice ?
La prémisse du rapport, qui s’appuie sur l’omniprésence du « racisme systémique », est que le système de justice actuel serait vicié de bas en haut par le racisme anti-noir.
Son origine dans une histoire coloniale et esclavagiste [l’esclavage qui concerna peu de gens fut aboli en 1834 au Canada et s’appliqua en Nouvelle-France surtout à des Indiens prisonniers de guerre] fournirait l’explication ultime par exemple de la « surreprésentation » des personnes noires dans les prisons.
Le système de justice « ayant été conçu pour nous nuire », affirme sans sourciller le groupe à l’origine du rapport, il doit être déconstruit et reconstruit de manière « afrocentrique », un principe qui « place les personnes et les communautés noires au centre de l’élaboration des politiques et des stratégies ». Si le gouvernement va de l’avant avec cette vision de la justice, assistera-t-on bientôt à une vague de demandes provenant de différentes communautés ethniques qui s’estiment également lésées ?
Des recommandations décoiffantes
Le rapport cible cinq secteurs prioritaires sur lesquels agir, dont le premier vise la désincarcération de certains détenus. En plus de demander au gouvernement de réduire de 50 % les taux actuels d’incarcération des personnes noires et des Autochtones « relativement à leur proportion dans la population » d’ici 2034, les « experts » indiquent que le Canada devrait également « remettre en liberté les personnes actuellement en détention ». Quels types de délinquants bénéficieraient de cette mesure ? Fraudeurs, vendeurs de drogues, proxénètes, meurtriers ? Le document ne précise pas ce « détail ».
Plus de 114 recommandations ont ainsi été soumises au gouvernement. En voici une liste non exhaustive :
- étudier les possibilités de réparations pour les personnes noires en raison de l’esclavage , de la ségrégation et des lois racistes ;
- ajouter les délinquants noirs à l’alinéa 718.2e) du Code criminel — cet alinéa oblige les tribunaux à s’attarder aux circonstances propres aux délinquants autochtones dans le cadre d’une peine ;
- lancer et maintenir un programme d’allégement de la dette d’études pour les personnes noires qui étudient en droit, qui comprend des taux d’intérêt plus bas, des périodes de remboursement plus longues, l’annulation de dettes et d’autres programmes d’allégement de la dette ;
- fournir du soutien aux familles des personnes noires incarcérées. Leur fournir, par exemple, une aide financière pour le transport et la nourriture et des subventions pour l’hébergement pour faciliter les nuitées. Ce financement devrait également couvrir les frais de garde d’enfants afin que les personnes incarcérées puissent rester en contact avec leur famille ;
- créer des programmes pour les prisonniers noirs qui sont adaptés à la culture des personnes noires et tiennent compte de leurs traumatismes.
En somme, le groupe d’« experts » recommande au gouvernement de « reconnaître les personnes noires comme un groupe distinct » et d’agir en conséquence en adoptant une loi. Les centaines de milliers de membres desdites communautés noires savent-ils qu’ils sont représentés par « neuf experts et dirigeants » autoproclamés qui exigent de telles réformes en leur nom ?
Des réactions unanimes
Bien que le rapport, accueilli favorablement par le ministre de la Justice, ait été publié en pleine saison estivale, après la fin des séances parlementaires — est-ce là une stratégie pour passer sous silence la publication de ce document controversé auprès des élus ? —, les réactions négatives ne se sont pas fait attendre sous la publication du compte officiel du Ministère sur le réseau social X.
De nombreux citoyens se sont en effet insurgés contre ce système à deux vitesses qui risque d’être mis en place.
Plusieurs ne sont pas convaincus de l’impact causal de l’héritage esclavagiste du Canada, sachant que la très grande majorité des Canadiens noirs sont issus d’une immigration assez récente ou sont nés ici dans les 50 dernières années (selon Statistique Canada, ils étaient 34 400 en 1971 alors qu’ils sont maintenant 1,5 million).
Ainsi, le temps est venu de se demander sérieusement si nous sommes prêts en tant que société à assumer les conséquences pratiques de la « reconnaissance du racisme systémique » : soit, en fin de compte, la fragmentation de l’État destiné dans cette logique à se morceler en autant de mini-États qu’il y a de communautés ethniques sur le territoire canadien.
Source : La Presse
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